"Quand la conscience médite sur elle-même, sa conscience de soi disparaît, ce qui implique qu'elle s'oublie. Ceci est appelé samadhi (l'union avec le Soi)"
"L'Amour de Soi" paru aux éditions les Deux Océans est un recueil d'enseignements oraux (notés par le disciple Shri Dinkar Kshirsagar) de Shri Nisargadatta Maharaj (1897-1981) qui fut un éveillé et Maître spirituel issu d'une lignée de Gurus en Inde.
Ce livre volumineux (plus de 500 pages !) relate de son message des deux dernières années de sa vie et s'adresse à deux types de dévots ou disciples plus ou moins avancés sur le chemin de la désidentification au corps, d'où l'impression de confusion parfois lorsqu'il parle de la conscience comme étant le tout ou le rien.
Ce volume ne se lit pas comme un roman. On y rentre de façon ardu, dérouté par le lexique indien et la précision chirurgicale des termes employés qui nécessitent une attention accrue et soutenue.
Par ailleurs il est réservé aux adorateurs du Soi (s'entend "la conscience auto-lumineuse, comme Dieu") néophytes ou convaincus et, comme le Coran par exemple, est un texte à clés dont la foi est le verrou.
L'enseignement en Soi est assez simple : "en réalité notre vraie nature est la félicité suprême et inconditionnée (le témoin qui est conscient de la veille et du sommeil) mais nous nous prenons pour des individus...et cette identité du corps donne lieu à l'orgueil, ce qui entraine de la souffrance".
Cette réalité vue et vécue par Shri Nisargadatta (qui signifie le Soi infini, complet et réel) Maharaj est martelée au cours des presque 150 journées d'enseignements (pas plus de trois pages à chaque fois) retranscrites et traduites avec précision du marathi en anglais (Mohan Gaitonde) puis en français, pour les besoins de la présente édition (Karina Bharucha).
L'ensemble agit comme un mantra et le cœur du message peut représenter un diamant que l'on envisagerait à chaque fois par une facette différente.
Notre culture judéo-chrétienne qui a fait de Jésus un Dieu a assimilé Son corps à la divinité, or ce concept est limité pour la lignée des sages indiens puisque le corps advient et se développe sans participation de l'individu conscient. Différent est Celui qui se place à l'origine de la conscience, qui oublie d'être quelqu'un et ne s'attribue ni nom ni forme. Celui-là serait alors comme Dieu avec "seulement de l'amour et de la joie d'être" comme besoins. Jésus n'aurait-il pas déclaré: "...vous êtes des dieux" (Jean 10,34) ? D'autres voix s'élèvent cependant (je pense ici aux Dialogues avec l'Ange ou à Satprem) qui redonnent au corps-lumière (plutôt qu'une lumière sans corps) toute sa noblesse et son potentiel illuminatif.
C'est au fruit de cette méditation soutenue et d'une certaine maturation spirituelle que nous invite feu Shri Nisargadatta Maharaj dont il ne nous reste que des paroles issues d'une source qui représente la quête absolue de tout chercheur de vérité : "En vous parlant, je ne vous considère pas comme un être humain mais je m'adresse à la Réalité qui est mon propre Soi en vous".
Un enseignement important, un livre opportun, balise et de bonne compagnie.