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dikhr

  • Une clé pour rendre libre

    Le véritable monothéiste n'est pas simplement celui qui croit en un Dieu unique mais bien plus profondément et réellement, celle ou celui dont le cœur est monothéiste parce que son regard en permanence fixé sur Allah ne consomme plus rien que cette vision où il se consume.(p.182)



    bidar.jpgAvec Les cinq piliers de l'islam et leur sens initiatique paru chez Albin Michel spiritualités, Abdennour Bidar  nous restitue sa vision intériorisée du dogme musulman et sa spécificité.
    La lecture est plaisante, réconfortante et riche en symboles. Il plane sur la pensée-vision de l'auteur un souffle de liberté et d'ouverture qui dilate le cœur et l'esprit, minimisant la loi pour ensemencer l'autonomie spirituelle.
    Préférant l'union à la soumission, la vision à la croyance ou foi, il prône un exercice spirituel universel, le dikhr (sorte de mantra verbal) comme moyen de transcender l'ego "illusionné" pour qu'advienne une "Réalité une et infinie" à travers l’œil d'un Témoin.
    Ce Témoin n'est autre qu'une Présence toute embrassante, préexistante à l'existence et qui Se louange (la prière), Se donne (aumône), S'incarne (le pèlerinage), rayonne (le jeûne) ou Se reflète (le témoignage) dans le cœur (au sens spirituel) de tout être qu'y s'y consacre quotidiennement par une concentration fervente. C'est en tous cas l'expérience du philosophe d'obédience soufie dont les mots réfléchis et reflétés touchent le quêteur spirituel.
    Abdennour Bidar convoque les grandes figures de l'ésotérisme islamique, de Ibn Arabi à Henry Corbin en passant par René Guénon, Iqbal, Attar, Rumi, Kubra ou Al Ghazali. Ce chemin balisé est traditionnel et initiatique puisqu'il vise à l'anéantissement ou l'extinction (fana) du moi, comme état spirituel ou station, souvent fruit d'une vie de pratique. Le véritable Roi n'est autre "l'ego même d'Allah témoignant de lui-même que son Moi est la seule réalité".
    Nous estimons que la spécificité de l'islam est cependant plus dans son rappel eschatologique que dans cette "théophanie" puisque chaque prophète (Moïse, Jésus, Abraham...) incarne cette union avec le divin en développant les moyens d'y parvenir. La shahada (profession de foi) musulmane ponctue et synthétise ce processus, comme le révèle ici l'auteur.
    Plus d'envoyé après Mahomet certes mais peut-être le temps d'individus-frères, semblables au modèle prophétique, qui est archétype du Témoin parfait, c'est du moins ce que laisse entendre cet essai probant.

     

  • Le travail intérieur

    "Un saint est un être qui est déjà mort au cours de son existence ; c'est à dire qu'il a rencontré les lieux de son âme capables de le guider, de l'orienter vers son Seigneur. Au terme de la navigation, incha Allah pourra t'il devenir goutte dans l'océan. Sans être confondue  avec la Présence divine - être toujours cette goutte, fondue dans l'océan de l'Être (p.200)".

     

    seuil.jpgLe soufisme naqshbandi est né à Boukhara. Cheikh Nazim Haqqani (1922-2014), l'avant dernier et quarantième guide de l'ordre, l'exporta d'Ouzbékistan et le fit connaître en Occident et à Paris.
    Au seuil de l'aube - un cheminement soufi, paru aux éditions du Relié relate de l'essence de cette voie ésotérique de l'Islam. Juliette Kempf (issue d'un théâtre aux racines spirituelles) a  mis en mots des échanges nourris avec Abd el Hafid Benchouk, l'un de ses représentants et également directeur de la maison soufie à Saint-Ouen. Sont abordées les pratiques (rites et dikhr) et la vision intériorisée presque symbolique du cheminant, sur la vie (étapes et événements) et l'époque.
    L'initiation soufie est proche de la source traditionnelle (dont R. Guénon a opéré une brillante reconstitution) mais sa forme reste musulmane, le prophète Mohammad étant le premier maillon de la chaîne.
    L'importance est accordée à la Présence (d'un rets de lumière a l'irradiation possible) divine en soi et cette relation vécue en chair s'accommode d'un travail de polissage de l'ego (les nafs de l'âme charnelle) pour le rendre plus docile et poreux à cette grandeur numineuse immanente. Cette "philosophie" rappelle celle du Christ en soi, qui croit à mesure que le "je" diminue, une ouverture à l'Autre qui provoque malheureusement encore l'ire des fondamentalistes et transcendants de tous bords.
    L'éveil et la praxis de cet Œil par lequel Dieu se voit dans le prochain est partagé par la communauté universelle des sages et saints de tous âges et les préceptes ainsi que l'éthique de la voie Naqshbandi, enluminée ici par Juliette Kempf et Annick de Souzenelle (postface) en offre une parfaite et profonde synthèse.

    L'ouvrage est en outre parsemé d'extraits du Coran traduits par Maurice Gloton ou André Chouraqui, ce qui ajoute de la valeur à cet essai déjà juste et vrai dans son axe.