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olivier chambon

  • La porte étroite

    "D'un point de vue yogique, une propriété vraiment précieuse de ces plantes psychédéliques est qu'elles fournissent un moyen relativement facile d'expérimenter l'état de non-dualité décrit par plusieurs traditions, telles que l'hindouisme, le bouddhisme, le taoïsme, le soufisme, qui offrirait à l'homme de réaliser sa vraie nature par la compréhension intime qu'il ne fait qu'un avec tout".(p.194)

     

    schillinger.jpgStephan Schillinger propose dans la sagesse interdite paru chez Vega-Tredaniel, une vision sublimée de la nature et des plantes enthéogenes, qui "procurent une expérience spirituelle". Associées à une démarche spirituelle, il scrute les traces de ces dernières dans les textes ou rites sacrés (Bible, rituels soufis ou bouddhistes, Védas) pour valider des visions prophétiques (le buisson ardent, le char d'Ezékiel) ou des actes nimbés de mystère comme la cène, la crucifixion ou l'ascension nocturne de Mahomet. Le secret bien gardé étant une conscience cosmique atteignable de son vivant par dissolution de la structure égotique et ingestion d'enthéogene. C'est ce qu'il semble avoir vécu au bout de trois années d'initiation chamanique avec le peuple shipibo en Amazonie et la décoction ayahuasca (en sus de vingt années de quête spirituelle).
    De fait, tout en rejetant les dogmes religieux et leur "désir de contrôle",  il se rapproche de la philosophie bouddhiste en valorisant l'état de samadhi (état de conscience universelle) ou Éveil spirituel.
    En associant Jésus ou les prophètes à des "psychonautes", Stephan Schillinger escamote cependant  la richesse de la tradition et foi chrétienne : un verbe fait chair, une co-naissance, un double numineux, un Amour inconditionnel, une conscience connectée à la Source.
    Par ailleurs s'il suffit parfois d'une seule prise de psychédélique pour transformer à jamais notre vision du monde (notamment la peur de la mort ou l'évanescence de la structure égotique), elle peut aussi créditer comme véridiques après coup, des paroles inspirées ou révélées de textes sacrés. La substance psychoactive se révèle donc un outil parmi d'autres (méditation, arts martiaux, lectio divina, marche...) pour approcher le mystère du Vivant.
    L'information expresse que délivre l'enthéogene, liée à la fascination de voir ne doit pas gommer, à notre sens, le long et solitaire travail de maturation personnelle pour germer, croître et livrer un fruit digeste. Trouver le fameux Centre en soi comme prélude au rayonnement ?
    La sagesse interdite reste un livre bien écrit, intelligent dans sa structure et son propos, avec une enquête passionnante, probante et préfacée logiquement par Olivier Chambon mais qui se trompe parfois de cible ou de co-naissance à la nature véritable de l'esprit.

     

  • Un éveil déclenché

    Il s'agit d'une conception toute autre de la psychanalyse : ce qui nous guide réellement au cours de la vie, ce n'est plus un inconscient limitant qui nous échappe toujours,  ni un inconscient comme réservoir de pulsions aveugles ou aveuglantes, mais le lien avec une conscience "pulsion de vie", source d'énergie "intelligente".(p.65)


    chambon.jpgAvec "l'éveil psychédelique", paru aux éditions Leduc, le psychiatre Olivier Chambon met l'accent sur la spiritualité inhérente aux PDL (pour psychédéliques) et leur fonction d'initiateurs à une conscience élargie : “Ils révèlent l'âme”.
    Prenant appui sur les recherches récentes et ses propres expérimentations (dans des cadres légaux), il milite pour une médecine assistée sous PDL, propre à la culture occidentale, à l'instar de la stature équivalente d'un chamane outre-Atlantique.
    Les résistances seront peut être trop nombreuses dans les prochaines années (scientifiques encore trop matérialistes, pression des laboratoires pharmaceutiques,  contrôle politico-social...) pour éviter une médecine à deux vitesses, avec des barrières financières (seuls les riches...) ou dénuées d'esprit (en gommant tout bénéfice spirituel).
    Il apparaît pourtant évident aujourd'hui de dire qu'une expérience psychédélique raisonnée (environnement propice, état psychique sain, adepte d'un travail intérieur, présence d'un guide-thérapeute formé) ne nuit aucunement au "consom'acteur" et que tout au plus il se rapprochera d'une réalité cachée, celle d'être relié en conscience à tous et au tout (Dieu ou la conscience universelle pour ne pas le nommer), dans une vision coopérative, solidaire et écologique.
    Ce que sous tend la dissolution de l'ego (Il s'agit de la phase 3' de 3' en fonction du dosage ou état de conscience 6 qui comprend 6 degrés) n'est ni plus ni moins que la découverte d'une source de connaissance et d'amour inconditionnel en soi, patrimoine commun à toute l'humanité (quelle abomination !).
    Cette conscience unitive et ses "symptômes psi" est partagée par les mystiques ou les personnes ayant vécu une EMI (mort clinique) entre autres et serait, pour l'auteur, accessible au plus grand nombre si elle n'était prohibée et interdite, générant des prises sauvages sans contrôle sur la qualité de la substance psycho-active, dont acte.

    Avec ce livre synthétique qui forme une trilogie après “la médecine psychédélique” et “la révolution psychédélique”, Olivier Chambon souhaite instaurer un “nouveau modèle scientifique post-matérialiste fondé sur la conscience”, rejoignant ainsi les paradigmes chamaniques ou transpersonnels confirmés par la physique quantique, dans lequel la conscience existe indépendamment du cerveau. A l'image bien choisie d'un cerveau-transistor, le PDL permettrait juste de déployer l'antenne pour capter des ondes d'autres et d'outre-mondes (au-delà, univers parallèles, champs de conscience vibratoires, conscience universelle...).

    Le sel de cet opus réside résolument dans le partage d'expériences et de points de vue du thérapeute écrivain, intéressants pour certains (le choix de s'extraire volontairement d'un monde au modèle compétitif) mais discutables pour d'autres (les échanges tantriques par exemple). Il faut saluer le courage de l'entreprise, depuis plus de vingt années, à batailler presque seul en France, à contre-courant et en marge d'un système médical somme toute très voire trop scientifico-rationnel.
    Néanmoins, si la prise de PDL peut mener à une forme de métanoïa sur soi et sur le monde alentour, entraînant une éthique ou une hygiène de vie plus spirituelle voire religieuse, l'inverse n'est pas forcément vrai (impression de tricher ou de franchir un interdit par exemple). Par ailleurs, autre bémol à la thèse, cette prise de PDL peut parfois déborder du cadre uniquement spirituel dans lequel on voudrait trop l'enfermer, pour déboucher sur un symbolisme hautement sacré ou religieux. La vision serait alors celle d'un futur désirable, d'un devenir à faire advenir par un long processus de maturation, sans y adjoindre pour autant d'artifices, au risque de tomber dans une forme de dépendance affective avec la ou les substances enthéogenes...


    "Les PDL sont une voie royale d'exploration et de dépassement de notre conscience individuelle, un ingrédient de l’évolution de l'humanité".(p.231)

  • Un avis éclairé sur le tabac et l'ayahuasca

    "Dans ce petit livre, nous combinons le savoir indigène et la science, parce que nous pensons qu'ils se complètent et parce que leur juxtaposition met un large éventail d'informations à disposition de ceux qui pourraient s'y intéresser.
    Nous n'encourageons pas les lecteurs à consommer du tabac ou de l'ayahuasca mais à comprendre qu’approcher ces plantes puissantes requiert de la prudence, du respect et de la connaissance.
    "

    Narby.jpgUn petit livre paraît chez Mama éditions à l'initiative de Jérémy Narby, qu'il co-signe avec Rafael Chanchari Pizuri, la caution indigène (médecin et enseignant Ashaninca) sur les "deux plantes enseignantes (que sont) le tabac et l'ayahuasca". Le sous titre du livre est important puisqu'il s'agit de "deux éclairages visionnaires et complémentaires sur les plantes maîtresses".
    Le chamane livre ses connaissances issues de visions ou de récits oraux avec ou sur le tabac et l'ayahuasca, leurs substances/âme et effets sur la psyché ou le corps du patient. Cet entretien retranscrit par Jérémy Narby lui sert de matériau à l'exploration anthropo-scientifique desdites substances.
    Il va convoquer une somme impressionnante d'ouvrages et de thèses récentes en les matières pour essayer d'y voir plus clair sur la nicotine issue du tabac ou sur les éléments intervenant dans la conception de l'ayahuasca à proprement parler. Le résultat est pragmatique, intéressant et non conventionnel, puisqu'il déconseille vivement ( et sans appel) le tabac industriel et son mode de consommation effréné (ainsi que ses dérivés nicotinique comme la vape ou le tabac à priser) et qu'il nuance le rituel ayahuasca à la mode sans avoir de véritables connaissances sur le produit ou le type de médecine pratiquée ( la guérison est opposée à la sorcellerie, l'ayahuasca jaune/ciel à la noire...).
    Il rappelle que ces deux plantes sont maîtresses car puissantes. Je schématise volontairement mais elles ne sauraient livrer leur pleine aide et informations qu'utilisées à bon escient dans tout leur processus de fabrication et dans un esprit bienveillant, ce qui est de plus en plus rare. Les savoirs des deux camps (chamans et chercheurs) mériteraient de s'inter-écouter (malgré des divergences lexicales, les différences ont tendance à s'estomper avec l'avancée des connaissances) pour parfaire l'efficience des plantes-remèdes et causer le moins de nocivité possible. Olivier Chambon appelait déjà de ses vœux à l'époque de "la médecine psychédélique" (2009) une alliance médico-spirituelle (soit amérindienne et occidentale) à visée thérapeutique.
    Même si leur efficacité est démontrée dans un contexte chamanique précis comportant un mode opératoire culturellement admis (anxiété, peurs, traumas...), notre législation et type de société marchande consomme ces produits de manière sauvage ou déritualisée, amenant leur face sombre à s'exprimer (folie, cancer, intoxication...).
    Ce livre est un jalon de plus dans la coopération des savoirs et l'échange des connaissances. Bienheureuse initiative de Jérémy Narby dont le grand retour et espérons livre-clé sera pour 2022 avec un essai tout autant éclairé sur le cannabis.

    Nous avions interrogé l'anthropologue en 2009 (40 min) sur son parcours et ses idées. En l'état, tout était déjà là (en collaboration avec radio Lumières) :

    entretien avec l'anthropologue jeremy Narby.mp3

     

  • Une révolution psychédélique souhaitée

     

    Olivier Chambon,Jocelin Morisson,La révolution psychédélique  - une médecine de la conscience,GUy Trédaniel éditions,Marc Brami,ALexandre Quaranta,ALexandre Peyret,Romuald Leterrier,Isidore Moubengui,Arthur Waisblat,Vincent Basset,Octobre 2020Dix ans après “la médecine psychédélique”, le docteur psychiatre Olivier Chambon co-publie aux éditions Trédaniel avec le journaliste scientifique Jocelin Morisson, “la révolution psychédélique – une médecine de la conscience”.

    Il s'agit d'une réactualisation du livre originel avec un addendum sur les nombreuses expériences cliniques menées ces dix dernières années sur les huit principales substances psychédéliques : la kétamine, la MDMA ou ecstasy, le LSD, les champignons à psilocybine, l'Ayahuasca, l'iboga et le cactus à mescaline. Chaque substance est traitée par un spécialiste sur le sujet, la replaçant dans un contexte historico-culturel et médico-spirituel.

    L'ouvrage est à visée thérapeutique clinique puisque la pseudo dangerosité de ces substances vient essentiellement d'un manque d'informations, d'une ignorance du dosage et de la substance ingérés et d'un contexte expérimental parfois peu propice à un “bon voyage” (good trip).

    L'intérêt d'une “prise en charge” scientifique permet de jouer sur l'effet escompté en terme d'élargissement de conscience : performatif (en microdose), thérapeutique (psycholytique ou dose moyenne) ou mystico-spirituel (forte dose). Le spectre allant d'un contrôle absolu (l'homme augmenté en quelque sorte) à une capacité de décentration (assouplissement des défenses du moi permettant libérations émotionnelles et prises de conscience), jusqu'à une possible dissolution de l'égo (on touche la conscience imprégnant tout l'univers, la sensation océanique, le Tout).

    On se souvient en général pour toute une vie, d'une expérience psychédélique. Elle peut parfois même être à l'origine d'une métanoïa, soit un changement radical, une prise de conscience éveillée sur soi et le monde sur un plan personnel ou professionnel et dans un domaine sociétal, écologique, spirituel ou religieux. Cliniquement, à moyenne ou forte dose, elle peut aussi tout simplement guérir certaines pathologies comme la dépression, l'anxiété, l'addiction ou le stress post-traumatique.

    Dans un cadre local et chamanique (ayahusca ou iboga) l'expérience frôle l'initiation avec des guides horps pairs que sont les curanderos et peut flirter avec les mondes invisibles (esprit des ancètres, sensation de mort mentale., connections hors espace-temps..). Mais là aussi le tourisme international à la recherche de fortes sensations gangrène le tissu et l'éthique locales.

    Pour conclure, jamais les études cliniques (notamment aux Etats-unis) n'ont été aussi prolifiques que ces dernières années sur ces substances qui, validées par la psychiatrie moderne, permettraient d'enrichir grandement la pharmacopée et la durée des traitements proposés (quelquefois une à cinq séances peuvent suffire à guérir une pathologie aigüe). Reste aussi et surtout un changement de paradigme à inventer pour replacer l'expérience dans un modèle sociétal propice à l'ouverture de conscience ou ouverture de coeur suscitée...l'avenir le dira.

    Remise en lien de l'entretien qu'Olivier Chambon nous avait accordé il y a dix ans, en collaboration avec Radio Lumières (2 fois 20 min) :


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