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novembre 2022

  • Les années de formation

    J.D Beauvallet,les années new wave,GM éditions,post-punk,synthétiseur,années sombres,contre pouvoir politique,Novembre 2022L'entrée dans l'âge adulte nécessite un rite de passage que la culture peut symboliser.

    On se souvient de ces années d'effervescence, d'ouverture, de réceptivité à un courant musical qui sache capter l'ère du temps et les aspirations idéologiques d'une jeunesse en quête de sens et de révolte contre l'ordre établi.

    JD Beauvallet revient (après l'autobiographie Passeur) dans Les années New Wave (1978-1983), que publie GM Editions, sur cette période clé de sa vie. Cet objet ludique (textes, photos et playlists) n'exclut pas l'écoute de titres ou albums mis en exergue par l'auteur, qui officie en maître de cérémonie, témoin d'une époque qu'il a vécu, d'un milieu qu'il a côtoyé, d'une écoute qui l'a transformé à jamais.

    Le livre compile chroniques de disques, de concerts, d'entretiens, de billet d'ambiance sur une ville (Manchester, Liverpool, Bristol, New York...), une salle de concert (CBGB, Hacienda...), un disquaire, un label (4AD, Factory...) ou un animateur radio (John Peel, Bernard Lenoir...). Du punk à la naissance de l'indie rock en passant par la New Wave, quelques noms marquent à jamais cette odyssée : The Smiths, Joy Division, Patti Smith, Talking Heads, Clash ou encore Sex Pistols.

    Machines et couleur noire sont alors de rigueur pour refléter la décennie socio-économique sombre réservée à la jeunesse post-punk, qui fait suite à l'enthousiasme libertaire des années soixante, du moins dans les grandes cités anciennement industrielles. Et on se rend compte que les combats d'hier sont nos avancées d'aujourd'hui (racisme, politique d’austérité, genre, mode...).

    Une livre phare qui témoigne de la vie qui se perpétue a travers la création artistique comme autant d'enfants du rock, de l'électricité et de l'excentricité, avant que le rock indé puis le rap ne viennent à leur tour frapper l'identité et l'imaginaire des générations futures.

     

  • La voie de Najda

    Midi nous le dira,Joséphine Chaffin,Clement Carabédian,compagnie superlune,théâtre de la Renaissance,Juliette Gharbi,Anna Cordonnier,Bastien Guiraudou,Julie-Lola Lanteri,Théo Rodriguez-Noury,Mathilde Domarie,Mathilde Monier,Aurore Santoni,football féminin,rêve,passion,transgénération,Oullins,Novembre 2022Dans Midi nous le dira, programmé au Théâtre de la Renaissance d'Oullins, Najda veut être footballeuse professionnelle. C'est son rêve depuis toujours malgré les déterminismes de genre ou les peurs liées au corps des femmes. Néanmoins sa branche féminine transgénérationnelle l'encourage à aller au bout de sa passion et à se réaliser malgré les poncifs.
    Pendant une heure l'actrice athlète du verbe et physiquement affûtée,  Juliette Gharbi clame son envie en enregistrant une capsule temporelle pour son moi futur.
    Le texte de Joséphine Chaffin convoque les styles, les temps, les lexiques et, scandé dans une forme de transe (avec l'excellent et hypnotique accompagnement sonore d'Anna Cordonnier sur scène), parvient à saisir l'instant, le présent de tous les possibles.
    Avec Clément Carabédian, l'autrice propose une mise en scène minimaliste mais sonore qui sollicite l'imaginaire des sens, vision et ressenti.
    Plus qu'un manifeste féministe, un destin porté de vives voix et donc conscientisé.
    Entretien avec Joséphine Chaffin (Compagnie Superlune) à l'issue de la représentation du 25.11.22:


    podcast

    Midi nous le dira se joue mardi 29 et mercredi 30 novembre à l'espace St Marc à Lyon.

    Image: Compagnie Superlune

  • Une sainte reflexion

    "Jésus nous dit clairement que le Royaume de Dieu est au-dedans de nous, c'est donc en comprenant qui est Jésus et ce qu'il représente, en comprenant notre vraie nature, celle d'êtres crées par Dieu et ayant la potentialité de nous élever spirituellement pour "voir" Dieu face à face dans Son royaume...c'est en faisant cela que nous atteindrons cette fameuse vie éternelle dont parle si souvent Jésus". (p.268)

     

    staune.jpgLes éditions Plon publient Jésus l'enquête, par Jean Staune. Il s'agit d'une synthèse logico-déductive sur l'identité du rédacteur de l'Évangile de Jean (une grosse première partie), évangile qui tranche véritablement avec les trois autres synoptiques et amène à des considérations hautement métaphysiques, abordées ici dans une seconde partie (un Dieu exempt de puissance par exemple : le Tsimtsoum des kabbalistes).
    L'hypothèse valide un témoin proche du Christ, Jean l'Ancien et non l'Apôtre Jean, fils de Zebédée, qui serait également le disciple bien aimé présent à la Cène, au procès, à la crucifixion et au tombeau vide.
    Le "détail" (qui fait encore couler beaucoup d'encre) est important car en filigrane se dessine deux églises : celle des Apôtres avec Pierre en tête de liste, avec des rites, un dogme, des institutions ; et celle de Jean l'initié, plus ésotérique et intérieure (le royaume de Dieu). C'est de cette deuxième école que se réclament les adeptes d'une voie spirituelle, toute obédience confondue, pour l'universalité de son message, se souciant plus de rassembler que de diviser.
    Dans cette école prédomine également l'esprit sur la lettre (la seconde naissance de souffle et d'eau) et l'ouverture d'un "sensorium spirituel",  troisième œil ou conscience de veille (le discernement christique) qu'amène  l'effort dans la quête spirituelle.
    Cette approche synthétique de l'auteur se présentant comme philosophe des sciences, rejoint parfois celle de la foi absolue où les concepts d'éternité (une co-naissance hors espace-temps), de Père (un mouvement et un repos) ou encore de miracle (rayonner de joie par exemple) s'éprouvent dans la concret du quotidien.
    Les quelques thaumaturges cités à l'appui naviguaient d'ailleurs aisément entre les deux "écoles" (Maître Philippe de Lyon, Padre Pio...).
    Dans ce livre qui se lit comme un roman et sur un ton familier, Jésus retrouve sa stature de pierre d'angle de la Création (porte de l'au-delà, co-créateur, en provenance du Royaume...) et c'est une bonne nouvelle pour les sceptiques ou convaincus de tous genres.
    Une étude que n'aurait sans doute pas renié Rabelais... 

     

  • Immobile voyage

       Mon voyage à moi, Akiko Miyakoshi, Nadia Porcar, Syros, album, novembre 2022Partir à l’aventure, qui n’en n’a pas rêvé ? C’est ce qu’imagine chaque nuit le héros de Mon voyage à moi, raconté et dessiné par Akiko Miyakoshi aux éditons Syros (traduction : Nadia Porcar). D’ailleurs, le petit raton laveur est plutôt quelqu’un d’ordinaire qui accueille des animaux du monde entier dans son petit hôtel et écoute les mille histoires qu’ils vivent à l’autre bout de la planète. On se doute qu’il est un peu envieux et attend son tour. C’est un peu la même chose quand nous sommes petits et rêvons de devenir adulte pour enfin faire ce qu’on veut. Notre personnage est déjà grand mais n’ose pas encore prendre son envol, jamais simple de se lancer dans l’inconnu n’est-ce pas ?

    C’est pourquoi l’hôtelier attend que ses clients soient bien installés pour se mettre au lit et laisser voguer son imaginaire comme pour mieux se préparer au grand chamboulement. Après tout, rêver en couleurs au lointain, blotti sous sa couette, nous permet de ressentir, de vibrer d’une autre manière, presque plus poétique. Akiko Miyakoshi l’a bien compris. La dessinatrice utilise le noir et blanc pour la journée et de magnifiques jaunes, orangés, parfois rougeâtres, parfois bleutés pour les nuits agitées du raton laveur. Le pelage des animaux, la douceur ou la rugosité de leurs traits est parfaitement imitée grâce aux crayons utilisés par l’autrice. Les lecteurs ou lectrices ne peuvent s’empêcher de caresser les oreilles d’un lapin ou le museau de l’hôtelier en tournant les pages. Tout comme le vent semble fouetter le visage et l’odeur du café nous chatouiller les narines depuis la salle à manger commune.

    En refermant cet album, nous reste la douceur des personnages et du récit, l’émerveillement du voyage visuel et littéraire et l’envie, pour nous aussi, d’ouvrir la porte d’entrée puis de s’en aller découvrir la vie des autres, ailleurs. En attendant, notre héros reçoit des tas d’inconnus chez lui et c’est déjà une fabuleuse expérience.

    À partir de 5 ans

     

    Image: Syros

  • Un symbole numineux

     

    Françoise Bonardel,A la rencontre de Saint Christophe,éditions Trédaniel,légende,saint intercesseur et protecteur,voyageurs,épidémies,contemplation,image pieuse,Novembre 2022Françoise Bonardel publie aux éditions Trédaniel un beau livre plaisant à lire, sur la légende et figure de Saint Christophe.
    Neuf chapitres ponctués d'iconographies et de citations d'auteurs, font le lien entre la légende moyen-orientale du  douzième siècle et l'histoire pieuse occidentale de la légende dorée (Jaques de Voragine), entre le cynocéphale martyr chrétien du troisième siècle (feu, flèches et décapitation) et le porteur-passeur du Christ enfant.
    L'autrice, philosophe et essayiste, n'élude pas le symbolisme des profondeurs ni l'ombre du géant au grand cœur mais rappelle les nombreux signes et manifestations de sa ferveur très populaire. Fêté le 25 Juillet mais relégué récemment parmi d'autres saints intercesseurs il jouit d'un capital sympathie et représentatif hors norme à travers siècles, reflétant l'importance du don de soi comme acte charitable, en plus d'être un protecteur prolixe.
    Les associations sont multiples (Christophe Colomb par exemple ou encore le roi des Aulnes...) dans l'histoire (mythique ou non) et la culture littéraire mondiale mais aucune n'égale l'originel, son aura de candeur et d'innocence.
    Les Christophores ont de tout temps assumé un joug, pesant aux yeux du monde mais léger pour les âmes, leur permettant d'être instruits intérieurement par le Christ-Maître. Avec le temps et la patience, les énergies animales sont intégrées et spiritualisées et une nouvelle tête remplace celle de l'homme ancien, désormais reformé.
    L'image de Saint Christophe est à notre sens celle de l'icône du chrétien, son double lumineux, sa maturation et son devenir illuminatif : le Christ en soi.

     

  • Dejima, année Tigre de feu

    Les saisons d’Ohgishima , La lanterne de Nyx, Kan Takahama, éditions Glénat, seinen, Le Dernier envol du papillon, Art, relation franco-japonaises, exposition universelle, novembre 2022Le 6ème et dernier tome de La lanterne de Nyx, seinen* sorti début 2021 nous avait laissé comme un goût d’inachevé. Ce merveilleux manga dont l’histoire se déroule entre le Japon et la France a tout de suite été un vrai coup de cœur. Au delà du monde de l’art et des relations entre ces deux pays ce sont les personnages qui sont les plus touchants. Heureusement, Kan Takahama nous revient avec Les saisons d’Ohgishima (Tome 1), toujours aux éditions Glénat. Non seulement les thèmes abordés sont les mêmes mais la mangaka nous offre de retrouver les protagonistes de la Lanterne de Nyx, à une époque différente. Impossible de ne pas se plonger immédiatement dans le récit.

    Les saisons d’Ohgishima est la dernière partie de la trilogie de Nagasaki mais la chronologie n’est pas forcément respectée. Tout comme dans Le Dernier envol du papillon, les habitants évoluent entre le quartier des plaisirs et Dejima, quartier occidental. Nous sommes en 1866, à la veille de la révolution Meiji. Nous suivons d’abord Tamao, une enfant de 14 ans, apprentie auprès d’une courtisane avant d’en devenir une à son tour. Autour d’elle, les adultes s’émeuvent chacun à leur façon du sort qui lui sera réservé, comme à toute fille pauvre : devenir prostituée. Cela n’empêche pas la jeune Tama d’être curieuse de tout, joyeuse, rêveuse. C’est en marchant dans ses pas que tous les personnages nous apparaissent petit à petit (japonais, hollandais, français, métisses) ainsi que les relations qui se développent entre eux.

    Le grand format du manga permet de percevoir tous les détails du dessin. Du décor des rues et des maisons aux habits complexes et objets singuliers en passant par les expressions des visages, la beauté nous saute aux yeux. Le propos est à la fois romantique, historique, précis et délicat. La boîte à secret que propose Kan Takahama entre les chapitres nous permet d’en apprendre davantage sur les réalités de l’époque. C’est surtout la trajectoire de chaque individu qui rend palpable la marche du monde, dans ce Japon hésitant entre rites immuables, place figée dans la société et ouverture à la modernité, à l’étrange et à l’étranger. Ainsi les jeunes protagonistes, de par leurs choix de vie, encore hésitants, bouleverseront peut-être l’évolution de leur pays. Hâte d’en savoir plus dans le tome 2 à paraître en février 2023.

    *Seinen : mangas avec des thèmes plus approfondis/complexes ou destinés à un public plus adulte.

    Image: Glénat

  • Un écrit cathartique

    "On était prêt à tout pour la gloire, Fatalitas, comme aurait dit Chéri-Bibi, voilà que la scoumoune nous file Quille-en-buis en cabane. Un rouage essentiel de l'organisation. On voulait lui emprunter son pilon. Attention, pas à la gratuite, en l'intéressant aux affaires, en lui ristournant même des parts dans le capital, mais, comme c'est barré là, il y a du maigrichon dans l'espoir". (p.27)

     

    delaude.jpgLa porte aux crocodiles, paru aux éditions Myosotis, est un recueil autobiographique de Jean Delaude (1920-1998) qui paraît à titre posthume et qui évoque sa jeunesse de titi parisien (une version argotique et une version traditionnelle sont proposées), son adolescence artistique et son activisme de résistant jusqu'à sa déportation à Birkenau et ses péripéties de prisonnier (gracié un temps, en fuite à deux reprises...) jusqu'à sa libération en 1945.
    Sa vie de jeune homme riche et épique, de l'insouciance (façon 400 coups de Truffaut) à la barbarie nazie en passant par l'effervescence culturelle parisienne d'avant guerre (Piaf, Prévert, Henri Crolla...) est aussi le manifeste d'une vie pleinement vécue (plutôt que la survie) et assumée car il endossera également après guerre les costumes de mari, philosophe, magicien et enseignant spirituel (il fréquenta Gurdjieff en personne) puis auteur en étant libre intérieurement.
    Le livre vaut pour le style enjoué et la gouaille a la fois drôle et légère, malgré les épreuves. C'est aussi un témoignage des camps de premier choix et donc un rappel de l'horreur de toute guerre.
    Jean Delaude transmet dans ces mémoires, une force de vie même si parfois la pensée morbide le taraude et, s'il ne semble pas croyant, il reconnaît être béni dans son cheminement : le numineux et la grâce l'étreignent un temps et chaque jour de sa vie deviendra dès lors bonus.
    Après enquête (des entretiens et analyses complètent l'ouvrage), des témoignages font état de sa positivité dans les camps (il faisait des tours de magie) et il sut pardonner aux allemands ou collabos (l'un d'eux usurpa un temps son identité) enrôlés à leur insu dans un conflit barbare de masse.
    La porte aux crocodiles est enfin en soi un exercice d'effort de remémoration (cher à Gurdjieff) avec force détails, jouant sur les temps (le passé qui est présent par exemple) et les centres de rappel (intellectuel, émotionnel, moteur), avec une enfance sublimée par la joie ou l'effroi finalement transfiguré par une plume aguerrie.

     

    "Mais raconter, c'est se souvenir, et se souvenir est une manière de revivre. Nous n'y tenons pas particulièrement.(p.279)