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Musique - Page 12

  • L'épopée fidèle d'Abd Al Malik

    "...La rue on a surmonté, maintenant on magnifie l'humanité, mon rap est un roman national..."(to be or not to be)

     

    abd al malik,le jeune noir à l'épée vol 1,présence africaine,editions flammarion,musée d'orsay,le modèle noir,de géricault à matisse,charles baudelaire,wallen,bilal,mattéo falkone,mars 2019Nouveau projet artistique généreux pour Abd Al Malik qui depuis quelques années est en fait sur disque un quatuor d'artistes avec sa femme Wallen, son frère Bilal et son ami Mattéo Falkone.

    Il s'associe ici avec l'exposition "Le modèle noir de Géricault à Matisse" au musée d'Orsay (Exposition jusqu'au 20 Juillet 2019) et Présence Africaine.

    Le jeune noir à l'épée vol 1 est un beau récit poétique et moderne paru chez Flammarion dont la source est la contemplation de quatre tableaux de l'exposition. Une fiction, des photos et des textes de rap/chansons poétiques font de ce livre cartonné un bel objet. Quatre parties qui retracent le parcours parfois compliqué mais riche et complexe de l'auteur-chanteur-créateur.

    Un nouveau CD de 9 titres originaux s'y ajoute (on peut se le procurer seul) et le tout (livre et CD) est entrecoupé de poèmes de Charles Baudelaire, dont la muse Jeanne Duval fut noire ou métissée.

     

    De poésie il est en effet question comme art de vivre sa vie d'adulte, comme manifeste d'aimer malgré tout, comme sens à la contemplation de ce monde aux aspects parfois chaotiques.

    L'auteur évoque la laborieuse reconstruction de l'estime de soi, préalable nécessaire pour s'octroyer les moyens de créer du beau et trouver sa place dans un monde qui peut parfois nous en laisser peu. Le parallèle et l'analogie avec les migrants ("la vida negra") ou les gens du voyage (titre éponyme) est condensé et synthétisé dans le magnifique a capella "eux" qui clôt l'album.

    Après un dernier opus métissé moyennement convaincant (scarifications) produit par Laurent Garnier, deux albums collectifs (Beni-Snassen), un film et sa B.O (L'adaptation de l'autobiographie "qu'Allah bénisse la France"), l'artiste prolifique multi-casquettes pose une pierre de taille à son œuvre, une pierre précieuse multi facettes et cohérente qui, on lui souhaite, renouera avec le(s) succès.

     

    Abd Al Malik a beaucoup expérimenté ces dernières années, quitte parfois à s'éloigner d'un public hip-hop originel pour aller vers une reconnaissance médiatique et institutionnelle. MC Solaar ou Soprano ont suivi des parcours similaires et il faut reconnaitre que, loin de s'être vendus, ils ont amené la musique urbaine à une autre échelle, à un autre niveau. D'aucuns considéreront qu'en chemin ils ont perdu leur âme, d'autres estimeront qu'ils la confinent à l'universel (La vida negra, tirailleurs ou encore le jeune noir à l'épée)

    Malik avec cet album résolument hip-hop dans son concept et exigeant, dont le prélude est le titre musical "justice pour Adama" se replace dans une optique universelle (la quête d'identité, l'acte créateur, l'émancipation de ses chaines mentales, la stigmatisation de la différence) en amenant sa communauté (religieuse, ethnique et géographique) dans un ailleurs pacifié, libre et en rayonnement, l'état d'être.

    C'est aussi une des dernières apparitions de Gérard Jouannest (Jacques Brel, Juliette Gréco) qui a co-écrit plusieurs titres (dont les magnifiques Strasbourg et les gens du voyage) et qui était devenu un ami précieux dans l'école de la chanson française (au-delà de tout étiquetage), tout simplement.

    Vivement le volume 2 !

     

  • Le Tarot du Grand Tout connecte à la Source

    lamine diagne,le tarot du grand tout,françois cervantès,wim welker,sylvio charlemagne,eric massua,compagnie de l'enelle,hôpital de la timone,marseille,théâtre de la croix rousse,mars 2019

    Lamine Diagne est un artiste complet qui a mis pour cette pièce, Le Tarot du Grand Tout, son talent au service d'une jeunesse malade et un peu désemparée.

    Fort d'une immersion de trois semaines à l'hopitâl de la Timone de Marseille, il a rebondi après l’ascenseur émotionnel, en co-écrivant une sorte de conte musical fantastique léger. Il sera donc Slim, ce conteur-musicien-dessinateur dont la foi folle lui donne la capacité de soigner.

    Le court spectacle musical (50 minutes) nous fait entrer dans un univers merveilleux dans lequel des princes et princesses luttent cœur, corps et âme pour ne pas désenchanter leur royaume...

    Il est accompagné par Wim Welker à la guitare.

    Entretien de 8 minutes avec Lamine Diagne


    podcast

    crédit photo : Théâtre de la Croix Rousse

  • Alpha Wann disciple du Verbe

    J'apporte la lumière dans le noir...

    umla.jpgD'aucuns prétendent qu'il a sorti l’album rap de l’année (2018) mais le premier long format d'Alpha Wann (membre de 1995 et de l'Entourage et auteur de 3 Ep "Alph Lauren") est un futur classique donc intemporel.

    Si un MC est la voix des sans voix, un haut parleur du peuple, il est aussi et surtout le catalyseur d'une certaine époque avec son langage, sa culture, ses humeurs et ses préoccupations. Les 17 chroniques de Philly flinguo auraient pu être écrites il y a 20 ans dans un autre pays, elles auraient résonné identiques sur le fond. La forme quant à elle est fruit de son ère, sublimée par 4 producteurs de talent (Hologram Lo, VM the don, Jay Jay &Lama onthebeat, Diabi) et masterisée par Alex Gopher (déjà là pour les albums de Nekfeu). Le bonhomme, quoi qu'il en pense est généreux (59 minutes de son), partageur (5 feat, 5 producteurs et 2 crews) et capable de remords, ce qui est un bon début dans la vie...

    ...Dis à la France que tout se paye, ce pays est en stagnation

    Ici, c'est racisme et vente d'armes, des clodos à chaque station

    Tu l'appelles Mère Patrie, j'l'appelle Dame Nation...

    Album dense donc, très écrit (quelques respirations dans les textes auraient cependant été les bienvenues), techniquement et tactiquement irréprochables, on reste stupéfait par le flow du Don à la fois rapide et précis. Son épée est acérée à souhait et nécessite un lâcher prise mental pour en saisir l'essence et le tempo. C'est un art de vivre et une façon d’être (hip hop ?) et rares sont les rappeurs qui freestylent en improvisant complétement sur le moment. C'est un peu la marque de fabrique du jeune parisien et son style s'en approche tant on a l’impression dans cet opus qu'il rappe comme il parle en passant parfois du coq à l'âne.

    C'est aussi une belle oeuvre toute en paradoxes : ego à la fois fort et fragile, croyant mais peu exemplaire, talentueux mais sévère envers lui parfois, peu ambitieux mais perfectionniste, imparfait mais excellant dans son art.

    Le titre « Une main lave l’autre » est un rappel de la religion de Phal et évoque le difficile équilibre à trouver dans un monde où les lumières artificielles font du pied et décentrent de l'effort intérieur.

     

    Très bon album de hip hop donc, français de surcroit, enterrant la hache de guerre entre old school et new school ( du boum bap à la trap pour les prods), dans la veine d’un « Si Dieu veut » de la FF ou de feu Lunatic. Inspiré et craché dans un seul expire, il eut été parfait allégé de 2-3 titres. Souhaitons à Alpha de trouver la paix de l’âme comme Ali  ou encore Kery James, qui démontrent que l' on peut cracher du feu sans jouer avec.

    ...1 pour les Clio, 2 pour les Renault, renoi
    J'suis un griot, flamme olympique comme aux JO...

     

  • Ciel Blanc ou L'appel des profondeurs

     

    ...Dans les profondeurs de la terre et de la nuit,

    Dans l'épaisseur du sommeil et de l'oubli,

    Nos racines puisent encore sous la mémoire et sous la mort

    Je les croyais absentes et soudain je perçois

    Nous sommes perchés sur des épaules des géants... (chanson "les géants")

     

    Les œuvres réussies sont toujours le fruit d'un collectif uni autour d'une vision commune et les œuvres magiques sont nimbées d'amour.

    Le canadien Lubomir Arsov avait déjà frappé fort l'an dernier en présentant "In Shadow" sur le net, inspiré de quelques archétypes jungiens à forte teneur symbolique. Le collectif Ciel Blanc nous propose à son tour ce projet artistique au titre éponyme. C'est made in France, artisanal, original, intelligent, complet et spirituel à souhait ! Ciel Blanc,Héphaïstos, le cœur du monde,Le gué-éditions,Étienne Appert,Guillaume Darcq, Antoine Chartier,Laurent Mathis,Pascal Pourré,Benjamin Sabalot,Leila Artigala,Raphael Xaubet,Myriam Gherbi,Christian Lepère,,Rémy Foucherot,Jérome Alinot,David Michriki,Arnaud Desjardins,Gilles Farcet,Archétypes,symboles,Jung,interprétation des rêves,Catherine Marchand,récit initiatique,Moebius,Dali,Boucq,David Lynch,Miyazaki,Stanley Kubrick,Alexandro Jodorowsky,Jim Jarmush,Allen Ginsberg,Arthur H,Pink Floyd,Who,Novembre 2018

    Le bel objet c'est un dvd (qui comprend le moyen métrage HEPHAISTOS le cœur du monde, deux documentaires explicatifs avec Catherine Marchand, thérapeute jungienne et 8 clips tirés du film) et un cd des 7 chansons rock qui collent parfaitement au film.

    Tout cela est en ligne ici pour "inscrire notre travail dans l’économie du don" (avec paiement libre) ou sur commande, pour soi ou pour offrir à un esprit libre ou en passe de le devenir un jour.

    Tout Enfant véritable vibrera à l'évocation de symboles universels (que l'on retrouve dans les contes ou les mythes) tout en apprenant l'histoire d'Hephaïstos, le dieu forgeron.

    Plus qu'une quête initiatique, il s'agit ici de retrouver son visage originel, dissimulé sous le vernis sociétal ou culturel et respirer enfin, si l'on veut bien entendre cette voix(e) qui provient des profondeurs.

    En prime un entretien avec le porteur du projet Étienne Appert.

     

    ...Franchis le gouffre vers l'inconnu

    Oublie tout, deviens fou,

    Goûte à la lumière de l'entrevue,

    Passe le pont, cogne ton front sur l'infini,

    ici ici ici... (chanson "le pont")

     

    crédit photo : Le Gué Editions.

  • La Cie Inouïe invite au voyage intérieur

    Voyage supersonique,Thierry Balasse,compagnie inouïe,Cécile Maisonhaute,Benoit Meurant,Thomas Leblanc,theatre de la Renaissance,Yi-King,Oullins,Novembre 2018Thierry Balasse est un passionné de musique et un bidouilleur de sons électro-acoustiques. C'est à de véritables expérimentations sensorielles qu'il convie ses spectateurs petits et grands, comme avec ce Voyage superSONique qui nous emmène avec son équipage, et à bord de son vaisseau ultra-technologique, à la découverte de la profondeur des océans et de ses monstres marins jusqu'à celle du cosmos et de son trou noir. Les yeux fermés ou grands ouverts, la magie opère réellement et l’imaginaire perçoit l'univers créé par la Compagnie Inouïe dont «Le vœu n’est pas de divertir mais de faire bouger quelque chose dans l'esprit, dans la façon de voir le monde, de l'entendre et de l'écouter».

    Entre Pink Floyd, Cosmos 1969, l'an dernier et John Cage avec Yi-King le 4 Décembre prochain au Théâtre de la Renaissance, Thierry Balasse et sa compagnie se montrent prolifiques et larges d'esprit.


    podcast

    Photo: Théâtre de la Renaissance

  • La Profondeur du chant de Léonard Cohen

     

    J'ai toujours en tête une chanson

    J'ai toujours en tête une chanson

    Qu'Anjani pourrait chanter

    Elle évoquera nos vies ensemble

    Elle sera très légère ou très profonde

    Mais rien entre les deux

    J'écrirai les paroles

    Et elle écrira la mélodie

    Je ne serais pas capable de la chanter

    Car ça montera trop haut

    Elle la chantera magnifiquement

    Et je corrigerai son chant

    Et elle corrigera mon écriture

    Jusqu'à ce que ce soit mieux que magnifique

    Puis nous l'écouterons

    Pas souvent

    Pas toujours ensemble

    Mais de temps à autre

    Pour le restant de nos jours. (p57)

     

     

    léonard cohen,the flame,nicolas richard,adam cohen,editions du seuil 2018The Flame (éditions du Seuil Sept 2018) est un recueil de notes, poèmes et chansons, confectionné en partie par Léonard Cohen et son fils Adam Cohen pour une parution posthume.

    On y retrouve les chansons de ses trois derniers albums, des notes inédites glanées dans ses nombreux carnets ainsi que des autoportraits.

    Le livre document est à l'image du personnage : secret, solitaire et aimant.

    Même s'il était célèbre, on sent qu'il n'était pas dupe du personnage extérieur acclamé par les foules (autodérision de ses dessins).

    Ses autoportraits parfois cyniques dénotent un manque de confiance en soi et il se demande souvent s'il est parvenu, au terme de sa vie, à la hauteur de la tâche ou de la mission esquissée par d-ieu (c'est ainsi qu'il l'écrit). A t'il bien entendu d'ailleurs cette Voix entres toutes, se demandera t-il tardivement ?

    Son vécu et son incarnation semblent profondément christique, lui qui nourrissait des foules mais qui souffrait dans sa chair pour la misère du monde. Parolier de l'Amour qu'il avait dû rencontrer intérieurement, sa vision de la divinité était à la veille de sa mort plus proche d'un Job ou d'un Jésus crucifié.

    Ses textes sont emprunts d'une profonde humanité avec quelques élans mystiques. Il se considérait comme "mission-né" pour l'écriture. Il griffonnait partout en toute occasion sur tous les supports à sa disposition. Son fils Adam nous rappelle en préface que "L'écriture était sa raison d'être. C'était le feu qu'il entretenait, la flamme la plus significative qu'il entretenait. Elle ne s'est jamais éteinte...Chaque page qu'il a noircie fut la preuve de l'incandescence de son âme."

    Sa vision des événements était très poétique mais penchait pour une dominante de couleurs plutôt sombres. On imagine que ses chansons furent souvent retravaillées avant d'êtres portées à la vue de tous.

    Lui qui se voyait sans véritable talent, il possédait une voix, reconnaissable entre toutes, mélancolique, profonde et habitée ; toujours grave et sensuelle, reliée à un cœur aimant blessé par la vie, l'amour, la mort.

    Ses textes témoigneront de l'éternel chantre de l'amour, humain et divin qu'il fût jusqu'au bout même dans les périodes de doute ou d’épreuves.

    Ce qu'il tenait à léguer à l'humanité, dans sa profonde humilité, c'est cette flamme qui éclaira son âme de la noirceur qu'il traversa, dans son monde intérieur comme extérieur.

    léonard cohen,the flame,nicolas richard,adam cohen,editions du seuil 2018

    crédit photo : leonardcohen.com

  • Un Stabat Mater incarné

     

     Stabat Mater,Giovanni Battista PergolesiCaroline Mutel,David Bobée,Sébastien d'Hérin,Bobie M’foumou,Salvatore Cappello, Aurore Ugolin,Thibault Noally,Anaëlle Blanc-verdin,Gabriel Ferry,François Costa,Laurent Gaspar,Rémy Petit,David Van Bouwel,les nouveaux caractères,Projet ADOMA,Théatre de la Renaissance,Oullins 2018Entretien avec Caroline Mutel et David Bobée, les co-metteurs en scène d’un Stabat Mater imagé par les corps en souffrance d’un migrant (le danseur congolais Bobie M’foumou) ou d'un acrobate (le circassien italien Salvatore Cappello).

    Le spectacle est un présent actualisé qui amène chacun à apporter de l'attention à ce qui se joue sur et en dehors de la scène.

    Les matrices sont touchées par tant de violence perpétrée envers des corps saints ou innocents et la profondeur du chant (Caroline Mutel : soprano et Aurore Ugolin : mezzo-soprano) couplée à l’exécution parfaite et minimaliste des musiciens (dirigés d'un même souffle par Sébastien d'Hérin des "nouveaux caractères") amène une communion immédiate du public .stabat mater,giovanni battista pergolesicaroline mutel,david bobée,sébastien d'hérin,bobie m’foumou,salvatore cappello,aurore ugolin,thibault noally,anaëlle blanc-verdin,gabriel ferry,françois costa,laurent gaspar,rémy petit,david van bouwel,les nouveaux caractères,projet adoma,théatre de la renaissance,oullins 2018

    Ce Stabat Mater est également une « histoire de famille » issue de rencontres évidentes et passionnelles entre acteurs du drame à la fois baroque et contemporain, expurgé certes de son aspect religieux mais relié et par conséquent fidèle à une certaine unité.


    podcast

    Crédit Photo : Arnaud Bertereaux