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La re-création a sonné
On avait beaucoup aimé l'amour flou, le film et on adore la série en ce moment diffusée sur canal + séries, de Romane Bohringer avec son ex-cellent et drolissime ex-mari, Philippe Rebbot, leurs deux adorables enfants Rose et Raoul et leur "sépartement", néologisme d'appartement pour gens séparés mais soucieux de l'équilibre de leur progéniture (en fait deux appartements qui communiquent par un sas abritant les chambres des bambins)La série développe les atouts mais aussi les inconvénient d'un tel mode de vie (une seule salle de bain ou machine a laver par exemple...) où tout ramène aux souvenirs d'antan. Pas facile de refaire sa vie donc, chacun de son côté alors que le désir n'y est plus non plus entre ex-époux... Oui mais dès lors que faire ?C'est tout l'enjeu de cette série drôle et charmante à souhait, légère et poétique dans l'écriture (avec Gabor Rassov), intimiste sans être voyeuriste, grinçante mais non dénuée d'amour (il en reste sûrement !), de tendresse et de respect mutuel.Reda Kateb, Monica Bellucci, Éric Caravaca, Clémentine Autain, Céline Sallette, Lou Bohringer (sœur de Romane) et l'incontournable Richard Bohringer (le vieux grincheux mais pas que) viennent enrichir les rangs d'une vie de bohème comme on en vit plus, et cela fait un bien flou, bande-son et format carré (9 épisodes de 30 minutes) compris. A voir d'urgence donc !P.S spoiler: On veut vraiment voir Philippe Rebbot en "Jacques Brel" ! -
Une vision tronquée de l'Apocalypse
"Cette appréhension d'un autre susceptible de nous corrompre (par contamination), au point d'entraîner la mort, caractérise les régimes de guerre, les régimes totalitaires, les régimes d'extermination. Cette perception let régulièrement les démocraties à rude épreuve. pour se protéger, il faut diminuer le nombre de contacts. tout rapport à autrui est modifié. On construit des murs, des forteresses, des barbelés en tous genres". (p.95)
Il est difficile d'envisager sa fin autrement qu'avec une forme de survie.
Dans "Apocalypse show, quand l'Amérique s'effondre" (chez Playlist society), qui est un condensé d'une thèse sur le sujet de la fin du temps dans les séries américaines, Anne-Lise Melquiond analyse la psyché du Nouveau monde comme celle d'un éternel recommencement, entre reproduction du système capitaliste déjà existant ou glissement de ce dernier vers un ordre plus extrémiste et rigoureux.
Cinq séries principales reviennent plus fréquemment dans l'essai, the walking dead, the leftovers, Falling skies, Jéricho et Watchmen, afin de balayer et souligner l'éventail des fins possibles (zombies, disparitions, attaque extra-terrestre, guerre nucléaire...) mais avec à chaque fois des leitmotivs ou marottes : la survie dans un monde devenu hostile où des règles qui ont fait leurs preuves à travers l'histoire s'appliquent pour faire société.
L' Amérique préfère en conclusion envisager la fin d'un monde plutôt que la fin d'un système défaillant (face à l'urgence climatique par exemple), comme une lecture en surface du texte de l'apocalypse de Jean où ne seraient retenus que les cataclysmes, fléaux, amputations ; sans voir plus loin le sens étymologique du dévoilement d'un Plan divin lumineux pour l'humanité consciente des enjeux liés à la planète.
Oeuvre salutaire que ce livre qui nous montre à quel point notre inconscient est imprégné de la culture cinématographique catastrophiste et morbido-angoissante de nos frères en humanité qui, si nous n'y prenons pas conscience, risque de jouer sur nous européens, comme des peurs archaïques. La France, très observée, semble évoluer vers d'autres alternatives finales, plus humaines et solidaires entre personnes éclairées de bonne volonté. C'est le parti de l'autrice dont certains passages, avec l'épisode covid, son état d'urgence et ses lois liberticides, résonnent avec une acuité presque prophétique...un autre monde est possible !
"Dans la tragédie de l'apocalypse, des décisions brutales, parfois iniques, un chantage à l'injustice ou des menaces de mort sont toujours justifiés par l'enjeu de la survie. Finalement, ces récits d'effondrement manque t d'imagination, dans leur capacité à présenter de nouveaux mondes possibles : on nous propose soit la restauration des institutions, soit la dérive autoritaire". (p.146) -
The Leftovers décryptée
Série singulière et originale, The Leftovers nous prend parfois plus par l'émotion que par la raison. Cette dernière semble comme court-circuitée devant l'absurde ou l'etrangeté de situations et les personnages eux-mêmes ne comprennent pas toujours le monde désenchanté et mystérieux dans lequel ils évoluent...
Le livre de Sarah Hatchuel et Pacôme Thiellement sur The Leftovers (le troisième côté du miroir paru chez Playlist Society) présente quelques pistes de réflexion et clés d'interprétation de la série HBO qui comprend trois saisons (2014-2017) , tout en nous explicitant quelques symboles ou références.
On y parle en effet aussi beaucoup d'une autre série, Lost, dont Damon Lindelof fût aussi le "showrunner" (sorte d'auteur-producteur, de responsable du suivi quotidien de la série, de sa cohérence), qui dura elle 6 ans et frustra nombreux téléspectateurs, restant sans véritables réponses aux énigmes à la fin.
Dans la continuité et la disruption, The Leftovers met clairement en scène "la fin de l'humanité mais surtout le déni des êtres humains devant l'extinction du vivant, dont ils sont eux-mêmes responsables", soit une ère anthropocène.
On se trouve face à une œuvre de créateur, inspirée d'un roman de Tom Perrotta, qui questionne également, selon les auteurs, l'offre télévisuelle et sa capacité à guider ou donner des clés pour s'orienter dans des périodes délicates de la vie (le biocide, le deuil, une période anxiogène...).
Concrètement le 14 Octobre 2011, 2% de la population humaine disparaît. Seule une ville est épargnée, Jarden (dans laquelle se situera la seconde saison) et l'on suit la réadaptation de quelques personnages dont le destin est scellé, dans une Amérique groggy cherchant un sens à cette vie de rescapés.
Le leitmotiv au piano comme le scénario original ne sont pas franchement gais mais les auteurs de la série ont choisi le réalisme et s'adressent aux adultes que nous sommes et à qui on demande de cesser de s'illusionner sur le monde, une sorte de responsabilisation et de conscience en éveil à acquérir. La série pose aussi un questionnement sur le mode d'emploi apparent de la vie qui vole en éclat lors d'un accident imprévisible. Dès lors à quoi se raccrocher si ce n'est à l'essentiel, qui constitue le fondement même de l'humanité : la relation et les gestes du quotidien.
Les conclusions des deux auteurs se rejoignent sur ce fond après nous avoir emmené dans un formidable voyage et jeu de pistes philosophiques, religieuses et culturelles. Pour Pacôme Thiellement, d'appétence gnostique, les œuvres de la pop culture (des Beatles à Twin peaks) sèment autant de signes de l'existence d'une divinité intérieure à retrouver, ici et maintenant, pour illuminer sa vie.
Pour Sarah Hatchuel, malgré les signes apocalyptiques, nous ne devons pas nous appesantir ou nous morfondre mais prendre sa vie en main et sauver le monde à notre niveau, accompagné en cela de jalons culturels.
The leftovers, le troisième côté du miroir, est une réflexion à deux voix, prolifique et à bride abattue, sur cette série auréolée de grâce où plutôt sur l'esprit truculent et énigmatique de son showrunner Damon Lindelof.
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Jauja ou la vie sauvage de l'inconscient
Viggo MORTENSEN excellent dans le récent oscarisé « Green book » ou encore la fable écologique « Captain fantastic » campe plus en amont dans « Jauja » de Lisandro Alonso un cadre danois de l’armée argentine recruté pour faire la guerre aux indigènes ( les têtes de coco) insulaires dans un temps historique (1882). Accompagné de sa séduisante fille il part seul à sa recherche en territoire ennemi quand elle fuit un soir à cheval avec un jeune soldat.
Il s'agit d'un film contemplatif, d'une narration lente et introspective, dans lequel le réalisateur fait la part belle à la nature sauvage et sommaire de la Patagonie. Carré (filmé en argentique), tri angle (l’homme, la femme et la nature) et cercle (les boucles narratives, la sortie de l’espace-temps) sont au rendez-vous dans ce western initiatique sur le sentiment d’être perdu (lost), l’être perdu ou le manque, les fantômes de la psyché et de l'inconscient.
Il y a cet effet miroir comme apex et l'on ne sait plus bien si tout cela n’était qu'un rêve et qui cherche qui. Quelques clés comme autant de symboles nous sont laissés mais on se sent démunis nous aussi face à ce mystère d'OFNI (objet filmique non identifié) qui nous sort des narrations modernes et linéaires.
Prix de la critique à Cannes en 2015.
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Ciel Blanc ou L'appel des profondeurs
...Dans les profondeurs de la terre et de la nuit,
Dans l'épaisseur du sommeil et de l'oubli,
Nos racines puisent encore sous la mémoire et sous la mort
Je les croyais absentes et soudain je perçois
Nous sommes perchés sur des épaules des géants... (chanson "les géants")
Les œuvres réussies sont toujours le fruit d'un collectif uni autour d'une vision commune et les œuvres magiques sont nimbées d'amour.
Le canadien Lubomir Arsov avait déjà frappé fort l'an dernier en présentant "In Shadow" sur le net, inspiré de quelques archétypes jungiens à forte teneur symbolique. Le collectif Ciel Blanc nous propose à son tour ce projet artistique au titre éponyme. C'est made in France, artisanal, original, intelligent, complet et spirituel à souhait !
Le bel objet c'est un dvd (qui comprend le moyen métrage HEPHAISTOS le cœur du monde, deux documentaires explicatifs avec Catherine Marchand, thérapeute jungienne et 8 clips tirés du film) et un cd des 7 chansons rock qui collent parfaitement au film.
Tout cela est en ligne ici pour "inscrire notre travail dans l’économie du don" (avec paiement libre) ou sur commande, pour soi ou pour offrir à un esprit libre ou en passe de le devenir un jour.
Tout Enfant véritable vibrera à l'évocation de symboles universels (que l'on retrouve dans les contes ou les mythes) tout en apprenant l'histoire d'Hephaïstos, le dieu forgeron.
Plus qu'une quête initiatique, il s'agit ici de retrouver son visage originel, dissimulé sous le vernis sociétal ou culturel et respirer enfin, si l'on veut bien entendre cette voix(e) qui provient des profondeurs.
En prime un entretien avec le porteur du projet Étienne Appert.
...Franchis le gouffre vers l'inconnu
Oublie tout, deviens fou,
Goûte à la lumière de l'entrevue,
Passe le pont, cogne ton front sur l'infini,
ici ici ici... (chanson "le pont")
crédit photo : Le Gué Editions.
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