En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.
Pour fêter ses quarante printemps, le Théâtre de la Renaissance d'Oullins a souhaité inclure des amateurs locaux (90 personnes) pour chanter, danser et jouer sur scène des extraits de comédies musicales. Nos mélodies du bonheur, mis en scène et arrangé par deux acolytes et amis de longue date, Jean Lacornerie (ancien directeur de la Renaissance) et Gérard Lecointe (l'actuel), rend hommage au genre avec couleurs, jovialité et émotions, dans un joyeux mélange de disciplines entre plusieurs générations. Gérard Lecointe retrace avec nous les ramifications du projet et les perspectives prochaines du théâtre. Avec Boum, sa dernière programmation pour la prochaine saison, il tire sa révérence en tant que Directeur actuel du Théâtre de la Renaissance.
Chasser les fantômes, programmé au Théâtre du point du Jour, est une tragi-comédie écrite par Hakim Bah, sur une idée originale de Sophie Cattani (Roxane). Avec Nelson-Rafaell Madel (Marco), ils incarnent un jeune couple métissé dont l'amour naissant voyage d'Afrique en France, avec tous les conditionnements et héritages historico-culturels entre les deux pays (colonisation, droit de séjour, étranger en France...). Un certain déséquilibre est perceptible lors de l'arrivée de Marco en France, fruit de peurs et de malentendus, que les acteurs restituent et accentuent à la perfection, jusqu'au ressentiment. Sur scène le batteur compositeur Damien Ravnich accompagne l'énergie de l'histoire d'amour dans ses phases radieuses ou orageuses. Le style syncopé, percussif et réflexif d'Hakim Bah redonne tout son sens au jeu, dans une large palette d'émotions. L'issue n'appartient pas à l'élan du public mais la poésie de l'ensemble se révèle à la toute fin et l'on comprend que l'enjeu transcende les corps et personnalités, qu'il est affaire d'âme.
Entretien à l'issue de la représentation avec Sophie Cattani (7 min) :
Après Désobéir (2017), La tendresse clôt le diptyque sur "la jeunesse et la résilience" imaginé par Julie Berès et co-écrit avec Alice Zeniter et Kevin Keiss.
En plateau, au Théâtre de la Croix-Rousse (Lyon), une bande de huit jeunes hommes soudés qui se livrent collectivement et individuellement à des confidences sur leur identité profonde. L'armure socio-culturelle se fend dans les saynètes plus intimistes où le corps buriné s'avère capable de lyrisme humaniste. Julie Berès exploite l'énergie masculine brute du spectaculaire à la tendresse, de la violence contenue ou déployée à la douceur du geste.
Dans un mélange subtil de chorégraphie (du classique au hip-hop) et de déclamations, elle démultiplie par un prisme à huit facettes, l'éventail de ce qui constitue l'essence de l'homme moderne à l'orée de sa vie d'adulte. Il y est aussi beaucoup question de féminin intérieur, à l'heure de la libération de la parole des femmes, et l'on s'aperçoit que les deux sexes ont destin lié, racines communes et leur représentation est multiple (comme le genre).
L'écriture cousue main (mélange d'investigations, d'improvisations ou de projections) dégonfle les clichés de groupe ou masse informe pour n'en garder que l'écume : amitié, respect et solidarité sans oublier la sensibilité.
Mohamed Seddiki et Djamil Mohamed, deux des huit comédiens (tous captivants) répondent à nos questions en sortant de scène:
Little Big Horn est un album académique des éditions Glénat/Fayard, concrétisé à quatre mains dans la collection La véritable histoire du Far West. Beaucoup de soin est apportée à cette œuvre écrite par Luca Blengino et David Goy sur les conseils historiques du spécialiste des Etats-Unis Farid Ameur. Le dessin bluffant de réalisme, en jeu ou statique est confié à Antoine Giner-Belmonte, disciple minutieux et inspiré de Christian Rossi. Le souci du détail confère à l'excellence et la couleur de Chris Regnault sublime les cases (qui parfois s'ouvrent dans un vent de liberté), faisant de ce projet une réussite indéniable. Lecture haletante et immersion totale dans cette bataille dont l'intrigue monte crescendo, avec rythme et plans cinématographiques, même si l'on connaît l'issue et la date charnière. Le dimanche 25 Juin 1876, dans les Blacks Hills entre le Wyoming et le Dakota, le 7eme régiment de cavalerie de l'armée fédérale commandé par le lieutenant-colonel Custer, est mis en déroute (267 officers et soldats tués) à Little Big Horn, par une coalition/union sacrée sioux-cheyennes avec Sitting Bull comme chef chamane. Le scénario semble actuel puisqu'il évoque le combat éternel entre la quête de l'or et la défense d'un territoire sacré, avec ici une victoire temporairement remportée par l'esprit sur la force. Une prophétie visionnaire indienne sépare les belligérants croyants et finit par se concrétiser. Elle marquera l'Histoire et l'imaginaire de tout peuple opprimé, créant également le doute ou la faille dans la toute puissance d'une machinerie techniquement (ou technologiquement avec le transhumanisme actuel) complexe. Avec Little Big Horn, tous les ingrédients sont réunis pour en faire un classique du genre, notamment par son exemplarité sur le sujet (addendum historique). La couverture est à l'image du projet : ambitieux, vivifiant et intemporel. Nous remettons en lien l'entretien réalisé il y à quelques semaines avec Antoine Giner Belmonte qui évoquait entre autre dans la troisième partie, la création de cette BD.
Dans La langue de mon père, joué au Théâtre des Clochards Célestes, Sultan Ulutas Alopé nous fait part d'un lourd passif familial (racisme turc envers les Kurdes, violence socio-culturelle, rôles imposés...) théâtralisé et digéré, avec une distance interprétative qui permet le passage de la gravité à l'humour. Le jeu sobre, le regard tendre et intelligent posé sur l'histoire familiale, l'écriture d'une épopée qui confine a l'universalité (être un.e immigré.e en France), donne à cette pièce co-mise en scène par Jeanne Garraud, un charme délicat pour un premier seule en scène, qui impose écoute et respect. La complexité d'une identité culturelle multiple et stigmatisée permet de relativiser notre situation ethno-centrée et d'ouvrir notre regard sur l'autre et sa différence.
Entretien avec Sultan Ulutas Alopé à l'issue de la représentation du 8 Avril :
Avec 1983, présenté à la Comédie de Saint-Étienne, Alice Carré, l'autrice, s'intéresse à une époque charnière de l'histoire de France et de l'Histoire tout court : l'année de l'inflexion néolibérale et des récupérations politiques des luttes identitaires et sociales (intervention télévisée de J.M. Le Pen, Marche pour l'égalité et contre le racisme, groupe Carte de séjour avec Rachid Taha, déceptions après l'espoir Mitterrandien...).
Beaucoup de choses à dire pour penser la complexité à partir de nombreux entretiens avec les acteurs de l'époque. La pièce est très référencée, solide dans ses ancrages politico-culturels et socio-économiques et les 8 acteurs virevoltent en enchaînent les rôles, faisant fi des genres et des codes de la représentation. L’œil est sollicité de partout avec aussi quelques scènes en plan large et filmées. Le sérieux du sujet est équilibré par des effets burlesques et des saynètes musicales ; le rythme et l'intérêt du point de vue chassent l'ennui (2h35 de spectacle trépidant).
La compagnie Nova créée en 2016 avec Margot Eskenazi à la mise en scène propose des histoires différentes de celles communément établies avec une vision moderne, fraîche et non stigmatisante de l'actualité. Les luttes de 2023 (sociales et anti-racistes) sonnent comme des échos lointains à 1983, date de leur origine ?
Alice Carré au micro de Chœur nous livre le fruit de sa réflexion.
Il y a quelqu'une et quelque chose dans ce Cabaret des Indociles vu au Théâtre des Clochards Célestes, qui fait la part belle aux jeunes créateurs. Margot Thery, une plume, une vision, un message qui est devenu un combat actuel pour l'émancipation des femmes. Saluons les prestations formidables, enjouées et parfois endiablées des trois jeunes comédiennes Maud Gentien, Mathilde Saillant et Marine Simon ; la scénographie efficace et sobre de Benjamin Lebreton ou encore les lumières de Manuella Mangalo. Tout s'aligne dans cette première création du Théâtre Marguerite pour rendre joyeux et percutant un sujet sensible et douloureux : la vie bridée de jeunes femmes dans un centre de rééducation des années 50. Margot Thery a su insuffler dans la thèse historique de Véronique Blanchard (Vagabondes, voleuses, vicieuses aux éditions Les Péregrines - 2019) de la fantaisie à propos, doublée d'une mise en scène ludique et astucieuse. La pièce sonne juste et restitue l'énergie du désespoir, avec beaucoup d'espérance et de force communicative. Petit entretien avec l'Autrice et metteuse en scène (9 minutes)