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Musique - Page 9

  • Le Maroc a du jus

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    "Fiq", littéralement "Réveille-toi" est le dernier spectacle proposé par le Groupe Acrobatique de Tanger dont le but est de promouvoir l'acrobatie marocaine, issue d'une tradition guerrière et véritable mode de vie national combinant roues, sauts et pyramides humaines.
    Les 15 jeunes artistes castés proviennent d'univers acrobatiques divers mais complémentaires (art martiaux, hip hop, cirque, jongle...) qui font corps dans un groupe soudé par un souffle et une vision commune que la circographe Maroussia Diaz Verbèke a mise en scène. Chacun.e est magnifié.e dans ce qu'il est de plus singulier tout en s'insérant comme rouage essentiel d'une construction humaine symbolique.
    L'excellent DJ Dino (champion DMC Algérie 2020) aux platines, chorégraphie les mouvements, les postures et cimente musicalement cette génération avenante, énergique et soucieuse d'une révolution des consciences. Le photographe Hassan Hajjaj, enfin, apporte une touche visuelle à cette œuvre collective en la teintant de couleurs et d'écrits comme autant de manifestes.
    Beaucoup d'informations sensorielles nous ont été données au Festival des Nuits de Fourvière hier, mais l'essentiel du message est traduit sur écran géant. Ici "rien de spectaculaire" (quoi que...) autre que du talent et de l'huile de coude, de la poésie et de la cohésion, de la simplicité et des valeurs qui prévalent.
    Le matériau est le corps, bien vivant et au service d'une cause commune. De nouveaux mots sont inventés pour définir ses mutations et fonctions nouvelles. Quelque chose d'indicible se réveille en son sein : une pulsation, un rythme, une ivresse sourdent.
    A travers cette représentation culturelle, c'est un renouveau qui se montre, celui d'une jeunesse qui repousse les limites dans un jeu enivrant, un corps à corps en accord avec le cœur. Captivant de vérité !

     

  • Totale Symbiose

    Lipstick Queens feat St Béryl,Star feminine Band,Festival des nuits de Fourvière,Ghana,Juillet 2022

    Le site historique des arènes de Fourvière, configuration Odéon était résolument à la fête pour la venue des ghanéennes de Lipstick Queens et ce malgré l'annulation de la première partie, le Star féminine Band, retenu à Copenhague pour grèves à Roissy.
    Les 5 musiciennes aux styles vestimentaires variés et singuliers : Winifred à la basse, Abena à la guitare, Vida aux percussions, Abigiel à la batterie, Sita aux claviers sont rejointes au fur et à mesure (belle idée) par deux choristes : Abigail et Ruby puis par St Béryl au chant. Elles ont tout le loisir de dérouler leur gamme musicale, de l'afro-beat au disco en passant par le jazz, la funk ou la soul. Ce combo 100% féminin et féministe dénoue les corps, les cœurs et les sourires pour une communion directe et chaleureuse dans la fosse transformée en piste de danse. L'ambianceuse au fort caractère St Béryl entraîne par ailleurs toute l'arène à se lever, danser voire scander des refrains, son nom ou des expressions ghanéennes.
    Public ravi, conquis par tant de proximité, comme ces collégiens de Villeurbanne invités pour la semaine par l'organisation du festival. Ils s'en donnent à cœur joie, participent immédiatement à l'ambiance survoltée et se lancent sans retenue dans des battles de danses avec les trois chanteuses. La femme, les “beautiful” femmes et la "sunshine music" sont célébré(e)s comme ils se doit par ces baroudeuses à l'énergie communicative qui assurent avec force tranquille, un rythme venu d'un grand et valeureux continent.
    Un mash-up est proposé avec "Fallin" d'Alicia Keys pour l'arrivée de St Béryl et "I will survive" de Gloria Gaynor clôture ce spectacle festif. Juste ce qu'il faut pour garder de beaux et joyeux souvenirs avant les vacances estivales.

     

  • Le grand Mogodo

    M,Révalité,nuits de Fourvière,Gail Ann Dorsey,Corentin Pujol,Maxime Garoute,Fabrice Colombani,AUrus,Bastien Picot,Matthieu Chédid,Life on Mars,fête de la musique,21 Juin 2022

    Fête de la musique aux nuits de Fourvière : spectacle total ! M était de retour dans ce lieu (la dernière fois aux coté de Fatoumata Diawara et Sidiki Diabaté pour jouer Lamomali) avec un nouvel album, le septième et une nouvelle formation avec des musiciens amis (Maxime Garoute à la batterie, Fabrice Colombani aux percussions) ou chevronnés (Corentin Pujol aux claviers et la mythique Gail Ann Dorsey à la basse). La soirée était placée sous le symbole de l’œil omniscient et intuitif, totem et nom du groupe du réunionnais Bastien Picot (son groupe Aurus en référence au Dieu faucon) qui livre un set énergique, éthérique et tribal en première partie. Le public bienveillant lui fait un accueil toute voile dehors avant de célébrer le retour de l'enfant prodige.
    Une scénographie toute pourpre et à l'effigie de son nouveau logo laissait deviner un déroulement de
    Révalité mais seuls quatre titres sont joués, les hits Révalité, dans ta radio, le régressif Mogodo et la magnifique et mystérieuse ballade ce jour là. Pour le reste et l'essentiel du show, Matthieu Chedid revisite les titres phares de son répertoire, scandés en chœur par un public debout et résolu à passer une soirée inoubliable. Il faut dire que l'homme est un showman, habillé pour l'occasion et entouré d'un combo détonnant, le propulsant au sommet de son art, voix haute perchée et guitare héro.
    La part belle est partagée avec les musiciens qui reprennent à cœur joie des classiques (de la musique), des
    Daft punk à Michael Jackson, mettant aussi en lumière le jeu de basse de Gail Ann Dorsey, acolyte de feu David Bowie, qui lui rend un hommage émouvant en chantant Life on Mars.
    La somme des tubes enchainés (
    la Seine, Amsetou, Qui de nous deux, Machistador, Je dis aime...) et les nouveaux titres entraînants nous rappellent la carrière fulgurante de cette "étoile dansante" se moquant de son "petit nombril" et as du jeu sous toutes ses formes (humour, chorégraphie, jeu de pistes...). M  réussit à imposer un univers où se côtoient l'Afrique, l'enfance, la spiritualité, l'introspection et les rêves, qui deviennent ici et toujours réalité.
    Il conclut sa performance, guitare en bandoulière, dans les arènes, au milieu de la foule, sans heurts ni peur, dans un esprit festif et en totale communion pour les yeux, les oreilles et les cœurs d'une multitude de témoins. Une ferveur toute en simplicité et gentillesse, belle à voir.

     

  • The Smile, un groupe hype

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    Thom Yorke et Jonny Greenwood n'ont jamais cessé de créer ensemble (ou séparément), restant toujours frais avec récemment cette tangente jazzy contemporaine incorporant le jeune batteur Tom Skinner du groupe Sons on Kemet, mais aussi pour deux titres, le nord américain Robert Stillman au saxophone, qui tenta mais brillamment, d'exister en première partie dans un set jazz tout introspectif... Le ton était donné.
    Le trio dégage une belle écoute sur scène, déroulant les 13 titres de leur album commun - A light for Attracting Attention - mais aussi 3-4 nouveautés passionnantes, laissant espérer une suite à cette formation.
    Mieux qu'un best of du gigantesque Radiohead, le premier album conceptuel de The Smile revisite de façon moderne presque trente années de sa musique, alternant ballades et mélopées aériennes, puissantes et explosives chansons rocks (notamment We dont Know what tomorrow brings), beats synthétiques ou compositions à l'esprit jazz (rappelant The king of Limbs).
    Les chansons comme les placements sont millimétrés, laissant malheureusement peu de place à l'improvisation. Le public conquis est donc en terrain connu et seuls les "nouveaux-nouveaux" titres dévoilés permettent d'apprécier réellement la proposition innovante de Thom Yorke (and Co), toujours là où l'on ne l'attend pas et ne se reposant pas un catalogue idolâtré parfois. Dommage cependant que la folie unitive n'ait gagné que la dernière demi-heure du show, chacun restant précédemment comme figé dans son rôle et dans une mécanique bien huilée mais néanmoins preque (trop ?) parfaite.
    The Smile semble présenter une porte de sortie, une respiration et un havre de création originale à l'institution indie-rock Radiohead. L'avenir scellera le sort réservé à ce trio lourd/léger qui, à la vindicte de la foule, semble placé sur de bons rails.
    Après Nick Cave (and the Bad Seeds)  deux soirs de suite, une autre star internationale est venue étoffer le festival des nuits de Fourvière, qui ne fait que commencer. Les anciens font de la résistance et, n'en déplaise aux jeunes qui poussent effrontément les portes du show business, ils ont de beaux restes dans leur hotte magique !
     
  • La symphonie de Maldoror

    Maldoror, Tome 1:  les enfants de la légende, Philippe Lechermeier, Flammarion Jeunesse, Charlotte Gastaut, Trilogie fantastique, juin 2022« Coup de sifflet du chef de gare ! Dans un fracas d’acier et un nuage de fumée, le train commença à s’ébranler ».

    Des toiles d’araignées, un train qui fonce dans la nuit, de belles notes de musique. Voici éléments qui s’échappent de la couverture dorée de Maldoror, Les Enfants de La Légende écrit par Philippe Lechermeier aux éditions Flammarion Jeunesse. Une jeune femme aux cheveux d’or, des tatouages sur sa peau, des cartes pour lire l’avenir, voilà que le mystère s’épaissit encore. Nous sommes au cœur de l’histoire sans le savoir. À peine le temps d’apercevoir sur l’illustration de Charlotte Gastaut, la neige qui tourbillonne, des feuilles de papiers épars sous le le ciel étoilé et la pleine lune jaune et brillante que le récit nous happe, nous entraîne, nous absorbe. Anja, la jeune violoncelliste surdouée, Piotr, petit futé, à la recherche de remèdes et tous ceux qu’ils vont rencontrer sur la route, nous deviennent irrémédiablement familiers.

    « Piotr traversa le village d’un pas léger. Toute à sa joie de partir, il savourait ce nouveau sentiment de liberté ».

    Étrange résonance avec le monde d’aujourd’hui puisque les héros traversent les villes de Vienne à Odessa, de Kiev en Sibérie, sans vraiment de frontières définies mais avec une menace diffuse et une ombre insaisissable et cruelle à la recherche d’un pouvoir ultime. Ces enfants sont à la fois rêveurs et sans illusion sur le monde qui les entourent, fragiles et plein de ressources pour se sortir des situations les plus périlleuses. Il faut dire qu’entre un gentleman voleur de violon, une bande d’orphelins toujours à leur trousse et l’absence de leurs parents, Anja et Piotr ne peuvent compter que sur eux-même pour fuir le danger. Heureusement, les adolescents, aussi différents que complices rencontreront de bonnes âmes prêtes à les secourir et les accompagner. Au fur et à mesure de leurs pérégrinations, l’univers cartésien (surtout pour Anja) dans lequel ils vivent va voler en éclat et bousculer leurs repères.

    « Ecoutez-moi … Je suis celle qui marche là ou le monde ne va jamais. Je suis celle qui sait le chemin de l’ombre quand la lumière disparaît ».

    Comme la jeune violoniste et son acolyte, le lecteur est baigné dans l’atmosphère historique de Kiev, du temps des trains à vapeurs et des rues grouillantes de monde. Petit à petit surgissent ça et là des étranges phénomènes (animaux sauvages obéissants au doigts et à l’œil, symboles surprenants ou personnages déconcertants: La mort d’….., l’homme sanguinaire, la cartomancienne). La magie s’insinue lentement mais sûrement dans les pages et la légende de Maldoror se dessine et attise la curiosité comme l’inquiétude. Nul doute qu’une grande aventure, un plongeon dans le passé et le futur attendent les lecteurs puisque nous sommes au premier tome de la Trilogie de Maldoror qui s’achève sur un beau suspens. Philippe Lechermeier sait intriguer adolescents (à partir de 13 ans) et adultes avec ce fantastique volume I ou volume I fantastique, les deux fonctionnent, et ces personnages plus fantasques les uns que les autres.

    Le tome 2 : Le Prince fauve paraîtra cet automne (2022)

    Image: Flammarion Jeunesse

  • Le temps suspendu

     

    tambour.jpgLa maison de la danse de Lyon accueille pour deux représentations, et dans le cadre de son festival "sens dessus dessous", quatre monstres sacrés dans Le Tambour de Soie. A l'initiative de Kaori Ito s'est constitué un quatuor hors pair, une histoire de Yukio Mishima inspirée du théâtre Nô japonais mais qui confère à une universelle émotion.
    Yoshi Oïda presque nonagénaire avait ajusté avec son ami Jean-Claude Carrière le texte en français, relatant une histoire d'amour quasi impossible entre une jeune danseuse et un simple balayeur transi. C'est la culpabilité par rapport à un acte malin (demander de frapper un tambour de soie donc inaudible) qu'exorcisera la danseuse, hantée par le fantôme du vieillard suicidé.
    Sur scène, le multi instrumentiste et créateur de ses instruments Makoto Yabuki insuffle l'esprit traditionnel japonais. Il scande et fait naître le remords de conscience après la violence de la culpabilité.  Kaori Ito mélange le classique et la modernité des mouvements, accompagnée et soutenue par deux maîtres de la vibration.
    C'est l'osmose et l'unité du trio scénique que l'on retient et qui, par le corps, transmettent le vivant, au-delà des mots et à travers les corps.
    Yoshi Oïda s'amuse comme jamais, détaché et heureux d'être, en toute simplicité. Il chorégraphie plus qu'il ne danse des mouvements martiaux (de taï chi), au service d'une Kaori Ito libérée d'un carcan trop académique.
    Le jeu prend tout son sens dans cette pièce où l'envie de transmettre prend le pas sur la performance. Yoshi Oïda, par son esprit enfantin (on peut en dire autant de Makoto Yabuki) amène sans doute une salutaire légèreté a cette histoire et ce sujet grave (on pense à l'idiot de Dostoïevski ou adapté par Kurosawa au cinéma).
    Peut-être la quintessence de l'artiste, lorsqu'il met son génie au service d'une œuvre ou d'un art et s'oublie dans le jeu.

     

  • Le découvreur de pépite

    "J'ai appris la vie, l'amitié, la culture, avec des guides généreux. Grâces à elles, grâce à eux, j'ai détaillé. J'ai élargi mon pare-brise. Cela a été comme apprendre mille langues et dialectes, dont le seul but reste de disséquer la beauté du monde."


    J.D Beauvallet, le supplément d'âme des Inrockuptibles ("un magazine élégant, élitiste en bien, refusant l'entre-soi, privilégiant les grands entretiens"), nous livre ses mémoires à la fois linéaires et transversales dans Passeur, parues chez Braquage éditions. On revit avec joie l'époque flamboyante de la Brit pop (Il vécut à Liverpool et Manchester) et plus globalement du rock underground indépendant jusqu'à sa fusion avec les machines, la période "madchester" avec les Happy Mondays par exemple et dont les groupes actuels Radiohead ou LCD soudsystem sont le prolongement.
    Connu et apprécié pour ses longs entretiens dans le magazine originel, très travaillés et introspectifs, il participa avec d'autres collaborateurs de renom (Serge Kagansky, Christian Février, Emmanuel Tellier, Arnaud Vivian...), à stimuler des échanges, rassembler des passionnés, former l'oreille et ouvrir l'esprit à des mondes ou des univers raffinés, précieux, sensibles ou originaux. Cet enfant timide proche de la nature puis passionné de rock (Bowie et Lou Reed comme maîtres d'école) à l'adolescence, dévoua sa vie d'adulte hyperactive et besogneuse (il est aussi DJ à ses heures perdues) à l'aventure d'un magazine presque culte (de 1986 à 2019), ses transformations successives (de mensuel à hebdo puis son rachat par Pigasse) et sa diversification (organisation de concerts, compilation de Cd's, promoteur gastronomique...).
    En filigrane de cet ouvrage très structuré, concis et synthétique, se dessinent les dessous scabreux de l'industrie du disque, la vie d'artiste et ses concessions, la psyché souvent borderline de ces passeurs de sons adulés un temps et parfois victimes de tragiques destins (mort, solitude, échec, oubli...). C'est aussi le témoignage d'un enfant du rock sur le demi-siècle passé, ses enjeux, ses défis, ses excès mais aussi sa formidable mutation ou évolution (du rock au rap) avec une bande son à la fois électrique et éclectique.
    L'auteur, que l'on devine droit dans ses bottes (l'esprit rebelle et incorruptible) esquisse ici une voie pas forcément pure (le rock et son inspiration diabolique ?) mais vraie, dans ses fêlures et ses folies, pour discerner de cœur à cœur des personnalités attachantes, profondes ou inspirantes (Morrissey, Jeff Buckley, Miossec, Daho, Damon Albarn, Björk, Jarvis Cocker, Stone Roses...).
    Touche à tout, artiste et rêveur de sa vie, JD Beauvallet reste un "passeur" discret dont la présence et l'écriture révèle et sublime la beauté des êtres, au-delà de leur apparence sulfureuse.
    On comprend mieux l'esprit Inrockuptibles à la lecture de ces mémoires, en se disant qu'il a essaimé chez beaucoup de "mauvaises graines", ouverture d'esprit, goût de l'autre ou folie contrôlée.


    "Aujourd'hui, quand je veux être surpris, effrayé, dérouté, je ne me tourne que rarement vers le rock. Je trouve qu'il bave, qu'il radote, qu'il n'élargit plus son cadre : il semble impuissant. Pour le dynamitage des formats dont il était un génial artificier, je me tourne vers les productions du hip hop ou du R'n'B. Je suis passé d'une fascination pour les chansons à une passion pour le son...je reçois désormais souvent la musique par les viscères, les tripes...le hip hop m'a sauvé de l'ennui et de la nostalgie pour ce qu'il reste une matière vivante, évolutive."