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société - Page 19

  • Un rire cathartique

     

    tiens ta garde,collectif marthe,clara bonnet,larie-ange gagnaux,aurélia lüscher,itto medhaoui,maybe vareilles,guillaume cayet,maurin oliès,Élodie asorin,elsa dorlin,emma depoid,eléonore pease,juliette romens,cécile kretschmar,clémentine pradier,clémentine gaud,florence verney,féminisme,techniques de défense,théâtre du point du jour,février 2022Tiens ta garde, du collectif Marthe, est un manifeste de combat contre toute forme de domination, notamment envers les femmes.
    S'inspirant entre autre du livre de la philosophe Elsa Dorlin "Se Défendre, une philosophie de la vie", les quatre protagonistes,
    Clara Bonnet, Marie-Ange Gagnaux, Aurélia Lüscher et Maybe Vareilles, s'en donnent à cœur joie dans une ivresse burlesque et avec grande énergie communicative, pour exhumer et remettre en lumière des instants clés de l'histoire féministe (les suffragettes par exemple) ou d'oppression politique des minorités (Black Panters, Indiens d'Amérique...). Il s'agit de déterrer jusque dans la psyché même, les racines du déni, du mépris ou de la mise sous silence de la juste et mordante agressivité auto-défensive.
    A l'heure de #me too, la charge est salvatrice et libère les corps d'un carcan trop académique, pour une pièce déjantée, rythmée et musclée à souhait.

    Marie-Ange Gagnaux et Aurélia Lüscher sont au micro de Choeur


    podcast

    La pièce se joue jusqu'au 5 Février

     

  • Les bourrins de la Terre

    Les Bourrinologues,  Bande d’Ados, éditions Milan, Lucie Castel, Nicole Augereau, Grégory Jarry, Géo Ado, pollution, collapsologie, stage de 3ème, janvier 2022« L’époque dans laquelle nous vivons est extraordinaire ! », « On assiste à la destruction de l’ensemble du vivant », « Et c’est à l’humanité qu’on le doit ! C’est pas génial ? »

    Lasse de dénoncer les scandales écologiques, la pollution, l’inaction humaine ? Lucie Castel, Nicole Augereau et Grégory Jarry prennent le contre-pied avec Les Bourrinologues dans la nouvelle collection Bande d’Ados aux éditions Milan et Bayard. Les épisodes ont d’abord été publiés dans le magazine Géo Ado. Dans chaque mission, il est en effet question de se rendre quelque part sur la planète pour montrer le triomphe de l’humain sur la nature ou plutôt des grandes entreprises ou États sur le reste des êtres vivants, homo-sapiens compris. En s’appelant Donald, on pourrait applaudir face aux bulldozers et autres machines infernales inventés par des êtres fascinants d’ingéniosité et de rapacité (quoi qu’un rapace ne tue que ce qu’il mange).

    Les auteurs se mettent en scène dans la bande dessinée sous les noms de Grégory Bour, Nickye Rino et Lucie Logue. Ces trois Bourrinologues reporters se délectent de la suprématie humaine qui va d’ailleurs souvent de paire avec une certaine « supériorité occidentale » ou du « monde moderne » sur le reste des populations de notre planète. C’est à la fois cynique, effrayant et drôle. Les stagiaires de 3ème, qui changent à chaque nouvel épisode apportent réconfort et espoir puisque la plupart sont scandalisés par les découvertes à l’opposé de la fierté de la rédac’ de la Bourrinologie (« l’étude de l’effondrement du vivant »). Malheureusement, ils ne s’en sortent pas toujours mais c’est le prix à payer pour comprendre l’envers du décor !

    Indignez-vous disait Stéphane Hessel, il y a de quoi avec l’étendue des actions humaines plus néfastes les unes que les autres : assèchement des mers pour implanter une agriculture intensive, enfouissement des plastiques et rejets de produits polluants dans l’océan, destruction des forêts tropicales et des peuples qui y vivent sans parler de la place d’internet qui fonctionne avec l’équivalent de 200 réacteurs nucléaires (enfin pour l’instant). Visiblement, l’indignation ne suffit pas, les bourrinologues sont donc passés mettre dans l’art de célébrer : « les déchets, l’avenir de la planète », « place à une belle forêt de palmiers à huile bien rangés », «les bateaux-usines prennent à eux seuls 50 % de la pèche mondiale, un bel exploit ».

    Avec Les Bourrinologues, les rencontres sont toujours instructives comme avec Léonid Brejnev, dirigeant de l’URSS dans les années 60, Larry Page, cofondateur de Google ou Taib Mahmoud, premier ministre de la Malaisie. De plus, les auteurs mélangent traits de crayons et photos qui permettent de voir les conséquences de l’activité humaine de plus près, du septième continent de plastique aux immenses champs produits en plein désert en passant par les régions où l’on extrait des terres rares. Une bande dessinée édifiante et indispensable à tous les futurs stagiaires de 3èmes !

    « Pour faire un stage de 3e vachement plus fun que dans le cabinet comptable de votre mère, contactez-nous ! »

    Image:  éditions Milan

  • Indice ou rumeur ?

    Lucie Vérot,Maïanne Barthés,Prouve-Le,Compagnie Spell Mistakes,Théâtre de la Renaissance,Simon Alopé,Cécile Maidon,Alice Garnier-Jacob,Clément Rousseaux,Sylvain Brunat,Dominique Fournier,théorie du complot,Oullins,Janvier 2022.

    Prouve-le, écrit à partir d'une vraie rencontre, évoque le danger inconscient que peuvent colporter des rumeurs montées en épingle, ici par deux adolescents dans un collège. Plus généralement le texte de Lucie Vérot aborde les ressorts et prémisses de toute théorie du complot, et son emballement caractéristique sur les réseaux sociaux.
    Écriture ciselée, haletante, jouée avec grande jubilation et énergie par Simon Alopé et Cécile Maidon, en convaincants ados, victimes malgré eux. La prolifique et visionnaire Maïanne Barthés signe de sa patte (rythme, humour, inventivité dramaturgique) cette pièce originale qui se joue au Théâtre de la Renaissance à Oullins et recommandée tous publics, avec une nouvelle thématique à son arc : la nécessaire prudence à accorder à une information brute, trop vite analysée et digérée par le mental et l'émotion.
    Une belle entrée en matière pour une saine réflexion future dans la construction d'un esprit critique.

    Entretien (6 et 5 minutes) avec Maïanne Barthés en compagnie de Cécile Maidon et Simon Alopé:


    podcast

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    Image: Théâtre de la Renaissance

  • Le poids des témoignages

    Grand reporterre #5, Théâtre du Point du Jour, Etienne Gaudillère, Giulia Foïs, Faut-il séparer l'homme de l'artiste, Jean-Philippe Salério, Marion Aeschlimann, Romain de lagarde, Claire Rolland, Angélique Clairand, France Inter, Pas son genre, #Metoo, Roman Polanski Étienne Gaudillère, artiste associé au Théâtre du Point du Jour répond en une heure quinze à un sujet récurrent de philosophie "faut-il dissocier l'homme de son œuvre" qui devient ici "séparer l'homme de l'artiste", que lui a soumis Éric Massé, co-directeur du théâtre de Lyon 5ème. Le court laps de temps répond à un format inédit "Grand ReporTERRE" croisant journalisme et art vivant sur un sujet d'actualité. Il relève le défi avec brio en l'orientant vers les violences sexistes qui ont pris beaucoup d'ampleur depuis le mouvement. #Metoo
    Il est accompagné par Giulia Foïs, chroniqueuse sur France Inter et spécialiste du sujet, elle y anime notamment l'émission "Pas son genre". Sur scène,  la journaliste donne son pendant à Étienne, éveillant sa conscience d'homme à la réalité crue (1 femme sur deux victime de violence sexuelle, 98% des violences viennent des hommes, une femme violée toutes les 7 minutes) et aiguisant son discernement tout en étoffant son argumentaire d'émotionnel à rationnellement détaillé.
    La mise en scène fait mouche grâce notamment à un mur d'images saisissant et aux deux acteurs (Marion Aeschlimann et Jean-Philippe Salério) en situations pour appuyer les faits, en grossir les traits.
    On a l'impression d'assister à une répétition bien avancée (c'est le format qui l'impose) mais qui ne gêne en rien l'à propos et l'âpreté du message véhiculé avec à la clé, des avis moins clivants et une réflexion enrichie d'images et de chiffres percutants.
    Etienne Gaudillère réussit à nous passionner en donnant corps à son journal de bord, il sublime le processus réflexif en en faisant un terreau de jeu. 

    Après un moment d'échange avec la salle en bord de scène, petite discussion avec le metteur-en-scène:

    podcast

    La pièce part en tournée à Villefranche du 13 au 15 avril.

    Photo: Théâtre du Point du Jour

  • Mad Max décodé

    "Si Max se laisse aller à la violence, c'est qu'il est devenu fou (mad), comme il le redoutait. Son basculement dans la folie est d'abord celui de la société toute entière : le monde en train de sombrer emporte Max avec lui". (p.51)


    mad.jpgDésert, bolides, guerre au nom de l'essence...le décor futuriste de la saga culte est crédible et décliné en 4 épisodes sur 40 ans. L'univers et la vision post-apocalyptique de
    Georges Miller persiste au sein des films de genre SF, révélant Mel Gibson en 1979 dans le rôle de Mad Max, guerrier de la route ayant perdu sa femme et son enfant, errant au volant de son V8 dans un monde où des hordes de punks SM font régner la loi du plus fort.
    Des films coups de poings, viscéraux, en mouvement, violents et radicaux qui inspireront bon nombre de héros vengeurs solitaires (equalizer, à vif,...) . Qui n'a jamais été gagné de telles émotions irrationnelles dans sa voiture ? La folie parcourt les routes. Ce qui nous sépare de l'anarchie et de l'état nature c'est un accord sociétal, une vie en commun, et parfois un cocon familial où l'amour règne.
    Cet anti-héros, Max Rockatansky a connu les deux antan, ce qui lui permet peut être de garder un semblant d'humanité et des valeurs qui contaminent dans son giron femmes ou enfants rencontrés ici ou là.
    Dans
    Mad Max, au-delà de la radicalité, 6 auteurs collaborateurs de Playlist Society (Lloyd Chéry, Manouk Borzakian, Alexandre Mathis, Élise Lépine, Erwan Desbois, Nico Prat) dissèquent l’œuvre avec brio (à l'origine des podcasts de chaque film), sourçant leurs hypothèses agrémentées de nombreuses anecdotes (metteur en scène, production, acteurs,...). Les points de vues se complètent et enrichissent l'analyse dystopique puisque les épisodes sont quasi chronologiques et similaires.
    Georges Miller, taxé de visionnaire lors de la sortie de Fury Road (2015), a réalisé intégralement les 4 opus ce qui en fait son œuvre la plus personnelle et obsessionnelle. L'évolution se situe surtout dans la toile de fond qui calque les préoccupations environnementales, sociétales et sociales de l'époque, notamment le rôle de plus en plus clé et prégnant  de la femme (Furiosa jouée par Charlize Theron dont le prochain opus s'intéressera a sa jeunesse) pour un éventuel changement de paradigme, car l'homme tue de façon innée.
    Petit livre plaisant donc qui permet de s'immerger à nouveau dans la psyché hallucinée et sauvage de
    Georges Miller. L'homme semble avare de renseignements mais comme tout artiste passionné il porte en lui visuellement ce punk-road-opéra et sut séduire la profession pour lui faire une place de choix...dans notre imaginaire aussi !

     

  • Le découvreur de pépite

    "J'ai appris la vie, l'amitié, la culture, avec des guides généreux. Grâces à elles, grâce à eux, j'ai détaillé. J'ai élargi mon pare-brise. Cela a été comme apprendre mille langues et dialectes, dont le seul but reste de disséquer la beauté du monde."


    J.D Beauvallet, le supplément d'âme des Inrockuptibles ("un magazine élégant, élitiste en bien, refusant l'entre-soi, privilégiant les grands entretiens"), nous livre ses mémoires à la fois linéaires et transversales dans Passeur, parues chez Braquage éditions. On revit avec joie l'époque flamboyante de la Brit pop (Il vécut à Liverpool et Manchester) et plus globalement du rock underground indépendant jusqu'à sa fusion avec les machines, la période "madchester" avec les Happy Mondays par exemple et dont les groupes actuels Radiohead ou LCD soudsystem sont le prolongement.
    Connu et apprécié pour ses longs entretiens dans le magazine originel, très travaillés et introspectifs, il participa avec d'autres collaborateurs de renom (Serge Kagansky, Christian Février, Emmanuel Tellier, Arnaud Vivian...), à stimuler des échanges, rassembler des passionnés, former l'oreille et ouvrir l'esprit à des mondes ou des univers raffinés, précieux, sensibles ou originaux. Cet enfant timide proche de la nature puis passionné de rock (Bowie et Lou Reed comme maîtres d'école) à l'adolescence, dévoua sa vie d'adulte hyperactive et besogneuse (il est aussi DJ à ses heures perdues) à l'aventure d'un magazine presque culte (de 1986 à 2019), ses transformations successives (de mensuel à hebdo puis son rachat par Pigasse) et sa diversification (organisation de concerts, compilation de Cd's, promoteur gastronomique...).
    En filigrane de cet ouvrage très structuré, concis et synthétique, se dessinent les dessous scabreux de l'industrie du disque, la vie d'artiste et ses concessions, la psyché souvent borderline de ces passeurs de sons adulés un temps et parfois victimes de tragiques destins (mort, solitude, échec, oubli...). C'est aussi le témoignage d'un enfant du rock sur le demi-siècle passé, ses enjeux, ses défis, ses excès mais aussi sa formidable mutation ou évolution (du rock au rap) avec une bande son à la fois électrique et éclectique.
    L'auteur, que l'on devine droit dans ses bottes (l'esprit rebelle et incorruptible) esquisse ici une voie pas forcément pure (le rock et son inspiration diabolique ?) mais vraie, dans ses fêlures et ses folies, pour discerner de cœur à cœur des personnalités attachantes, profondes ou inspirantes (Morrissey, Jeff Buckley, Miossec, Daho, Damon Albarn, Björk, Jarvis Cocker, Stone Roses...).
    Touche à tout, artiste et rêveur de sa vie, JD Beauvallet reste un "passeur" discret dont la présence et l'écriture révèle et sublime la beauté des êtres, au-delà de leur apparence sulfureuse.
    On comprend mieux l'esprit Inrockuptibles à la lecture de ces mémoires, en se disant qu'il a essaimé chez beaucoup de "mauvaises graines", ouverture d'esprit, goût de l'autre ou folie contrôlée.


    "Aujourd'hui, quand je veux être surpris, effrayé, dérouté, je ne me tourne que rarement vers le rock. Je trouve qu'il bave, qu'il radote, qu'il n'élargit plus son cadre : il semble impuissant. Pour le dynamitage des formats dont il était un génial artificier, je me tourne vers les productions du hip hop ou du R'n'B. Je suis passé d'une fascination pour les chansons à une passion pour le son...je reçois désormais souvent la musique par les viscères, les tripes...le hip hop m'a sauvé de l'ennui et de la nostalgie pour ce qu'il reste une matière vivante, évolutive." 

     

  • Une BD qui vire au culte

    Coup de Choeur BD

     

    “Je vois clairement les pensées de mes semblables et leurs émotions surgir de leurs crânes sous forme d'abstractions lumineuses”... C'est l'expérience la plus passionnante et intéressante qu'il m'ait jamais été donné de vivre, aussi grisante, irrationnelle et obsédante qu'un rêve”. (p.36 et 39)


    Dieu est un virtuose synesthésique. Il joue une symphonie démiurgique et nous entendons les couleurs du monde, les formes des galaxies, les émotions de l'univers. Il a créé ce monde de dingues dans une impro sous acide avec une guitare électrique branchée sur un ampli réglé à plein volume”. (p.42)


    ledroit.jpegAvec le troisième œil (acte I-La ville lumière) paru chez Glénat, Olivier Ledroit signe seul un roman graphique initiatique et fantastique, hallucinant et total, mêlant ésotérisme et occultisme, magie et alchimie, métaphysique et eschatologie.
    Mickaël Alphange, le héros de cette BD, est un jeune homme, apprenti vitrailliste, aux perceptions synesthésiques, habitant Paris. Un soir, à l'aide de substances psychédéliques, s'ouvre à jamais son œil spirituel, visionnaire et il perçoit dès lors l'invisible éthérique des êtres, des lieux, des objets, pour le meilleur (un monde lumineux) mais aussi le pire (des entités ou forces ténébreuses).
    Guidé et formé patiemment par ses pairs, il participe à un rite initiatique lors d'une nuit astrologiquement propice, en arpentant la capitale occulte pour renaître, par un processus alchimique, à son corps immortel et divin.
    Il est désormais élu à un destin hors du commun et possesseur d'une lame magique...
    Les références fusent et sont assumées dans cette œuvre graphique hallucinée, Lynch, Carpenter (the thing, invasion Los Angeles) ou encore Kubrick (2001) pour le cinéma fantastique, Herbert (le rêveur de Dune qui doit se réveiller) ou Dantec pour le thriller esoterico-futuriste.
    Olivier Ledroit dépeint aussi comme personne l'époque, ses enjeux, ses dilemmes et sa dimension eschatologique. Il est rare de condenser en si peu de pages un univers en soi, attendu et pressenti par beaucoup, ce qui fait de lui, à l'instar d'un Druillet ou d'un Moebius, un chef de fil artistique de sa génération.

    Ce premier tome est une œuvre crédible qui se suffirait presque à elle-même, empreinte de luminosité aux teintes bleutées. Les visions de Mickaël Alphange détonnent de réalisme, entre onirisme et expérience chamanique. Une réussite et un ovni, comme le fut Blueberry de Kounen à l'époque.

    En bonus, un entretien téléphonique avec Olivier Ledroit (22 min) :


    podcast