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Littérature - Page 14

  • Faire des deux l'Un

    La rage de l'égo n'est rien d'autre que son impuissance à être Dieu...le remède est dans l'humilité et la sincérité.

     

    Scribe de Dieu,Jean-Bruno Falguière,Erick Bonnier Editions,Sidi Seïd Hamza,Mars 2020Avec "Scribe de Dieu" paru chez Erick Bonnier Editions, Jean-Bruno Falguière nous offre la quintessence du soufisme Boutchichiya, un courant ésotérique et initiatique de l'Islam.

    Du mental au Cœur de l'être, de l'ombre à la Lumière, de l'orgueil à l'Amour, l'auteur traverse trois étapes liées à trois éveils de conscience dans son parcours et à la rencontre de trois maîtres spirituels, investiguant à chacune d'elle plus de profondeur, de symbolique et d'intériorité.

    La psychanalyse tout d'abord, en tant que patient (pendant 15 ans il "dépollue" son histoire transpersonnelle de toutes ses peurs, fausses croyances, oublis) puis officiant, après la découverte cruciale et l'étude minutieuse de l’œuvre de C.G Jung. Il développe soon sens de l'observation et sa capacité d'empathie.

    La spiritualité ensuite au contact de Luis Ansa pendant 9 ans et la découverte, comme cadeau de départ, de l'évangile selon Thomas, célèbre apocryphe qui ne le quittera plus.

    La religion enfin, au sens d'être relié à la Source, que personnifia le Maître soufi Sidi Seïd Hamza (désormais Sidi Jamal, son fils et successeur), avec ses rendez-vous sacrés que sont le Dhikr, la prière, l'évocation et la contemplation orientée.

     

    Le titre du livre est un hommage à son maître spirituel récemment disparu, qui "gravait les mots de Dieu dans le cœur de ceux qui l'approchaient". Ces mots constituent la grosse partie de l'ouvrage où l'auteur fait siennes les paroles du Maître en nous faisant part de ce qu'il a compris, expérimenté. Il nous ancre dans son cheminement et évoque les prémices d'une transmission en s'éveillant aux murmures de son cœur éveillé.

    "Être en Islam c'est être en toute vérité dans la soumission et l'adoration de Dieu", êtat d'être somme toute assez universel, hors dogme, et qui confine au Mystère de l'humilité ou à la Joie du Serviteur.

    C'est par ce biais et cette forme, incarnés par Sidi Hamza, que J.B Falguière a remplacé le doute dans sa vie par la Certitude de Dieu, un juste retour en Sa patrie pour celui qui, depuis adolescent déjà, avait la "volonté d'éveiller l'Amour compatissant en son cœur... en priant Dieu".

    Pour ce fidèle ami de Jésus, l'"Islam comme le Christ est la révélation de la Lumière du Père".

     

    Longtemps tiraillé dans une quête duelle entre un travail de purification du corps de souffrance ("le moi infantile et apeuré qui conditionne la vie et la voue à un aveuglement définitif" ; "l'outil qui se prend pour le connaissant") et d'ouverture du Cœur aimant ou corps d'Amour ; il finit par transcender ce dilemme en naissant à sa nouvelle identité : la capacité d'aimer et d'accueillir.

    Dès lors il n'a de cesse de développer cette vision du cœur miséricordieux envers l'humanité entière, un regard somme toute assez féminin sur le monde (Il dira même être épousé de son Maître) qui est "le regard de notre origine".

    Bienheureux qui a retrouvé l'équilibre en aimant Tout car tout vient de Dieu, reconsidérant ombre et lumière et leurs nécessaires cohabitations pour mieux se découvrir jet de lumière.

     

  • La vision sans âge

    pierre turlur,trois maîtres zen,editions du relié,dôgen,ryôkan,santôka,février 2020Pierre Turlur touche juste une nouvelle fois en peignant à travers trois portraits, l'âme du Japon.

    Dans « Trois maîtres zen - le vertueux, le rêveur et le vagabond », paru aux éditions du Relié, il est question d'éveil et de transmission mais aussi et surtout de nature et de littérature : les fameux haïkus qu'ont laissés ces moines errants (qui parsèment ce livre) et l'univers féerique et bucolique qu'ils ont inspirés à l'auteur.

    Il est bon de rappeler qu’« être né de nulle part et ne cheminer vers rien » peut s'accorder avec la plus haute réalisation au sens oriental du terme, comme « toucher la voie lactée », être uni-vers…

    L'imbécile heureux (Ryôkan) ou le vaurien (Santôka) peuvent au même titre que le vertueux (Dôgen) accéder à la vision pleine, vaste et illuminative où «  le relatif et l'absolu ne peuvent être dissociés".

    Pierre Turlur a fait œuvre de création originale en partant de presque rien, quelques haïkus sauvés à travers siècles, pour les amplifier et déployer leur histoire et contexte, réveiller le cœur de la voie commune à ces trois poètes : la simplicité et le dépouillement. L'auteur a su redonner de la chair et des sentiments, de l'humanité et de la grandeur à ceux que l'on ne voit pas ou plus. Il nous fait revivre l'épopée de trois futurs Maîtres de l'assise immobile.

    « Il convient d’ élucider les métaphores de cette poésie », nous dévoile t-il page 126, et il semble avoir été bien inspiré pour retranscrire à son tour avec moult détails cette nature propre à la vérité des bouddhas « qui traduit si justement l'interpénétration des phénomènes" .

    Après la cérémonie du shiho passée (soit la transmission de maitre à disciple) et la robe de moine reçue (le Fu-jung Tao-kai) le fraichement réalisé partait à travers monts et vallées, n'emportant que l'essentiel pour glaner ça et là, pendant quelques années, l'enseignement de maitres éminents, avant de se stabiliser et d'enseigner lui-même. Une période rituelle d'errance propice à l'émerveillement des sens au contact des éléments naturels : " Les Bouddhas vivants, les Bouddhas assis, travaillent à l'effacement des traces, ils perdent leur pas anonyme dans les foules, se mêlent å l'activité du monde, se perdent dans les vallées et les forêts profondes, dédaignent les honneurs, les titres, fuient la renommée et la gloire" (p.179).

    C'est bien évidemment le liant de ces trois historiettes à plusieurs siècles d'intervalle. Les tempéraments et inclinations diffèrent, la forme des haïkus évolue avec le temps mais la vision "exempte de corps et d'esprit", "dépouillée de tout et de soi-même" reste identique à celle de l'enfant dont l'esprit est en éveil et pour qui tout est prolongement de soi.

    En Occident le maître est choyé et vénéré, auréolé de prestige par les aspirants-adultes, en Orient rien ne le distingue des autres quidams et il lui arrive de mendier sa pitance. Seul l'Enfant parce qu'il est cœur, le voit.

    Enfin il est également beaucoup question de rencontres dans ces lignes, de l'importance d'autrui comme guide ou miroir de l’Oeil, de l'omniprésence de l'univers sublimé (la vision réelle n'est-elle pas poésie ?) autour de et en soi. Ces trois histoires finissent d'une façon juste, comme un clin d’œil du grand Ordonnateur à qui sait percevoir la beauté et la richesse de Sa création, en dépit de l'ignorance et du sommeil de la masse et de leurs autorités.

     

  • Le Baal Shem Tov historique

    Je questionnai le Messie : « Quand le Maître viendra t-Il ? », et Il me répondit : « Quand ton enseignement (ta Thora) aura été révélé et diffusé dans le monde entier, et que tes fontaines jailliront à l'extérieur. »p.133

     

    Baal Shem Tov,Jean Baumgarten,Hassidisme,Albin Michel,Février 2020Le Baal Shem Tov, mystique, magicien et guérisseur, paru aux éditions Albin Michel, est un livre hommage, extrêmement bien documenté sur la figure historique à l'origine du mouvement hassidique, par la plume esthète et érudite de Jean Baumgarten (Directeur de recherche au CNRS et spécialiste du Hassidisme).

    Le simple nom propre reste très populaire et ancré dans l'imaginaire collectif, sans parfois savoir ce qu'il recouvre. Pour le peuple juif il est un de leur héros en tant que grand ami de Dieu et également un héraut du messie promis par la prophétie, suite à ses ascensions célestes* (comme Enoch, Élie ou plus proche Mahomet), en présence du Messie ou d'autres figures célèbres des maîtres ou prophètes juifs (*ce qu'on nomme la théurgie).

    Les Shivhei ha besht, sorte de recueil hagiographiques sur le Baal Shem Tov (1700-1760), commencent à être publiées un peu moins d'un siècle après sa mort en font un personnage mythique et fabuleux, mystique et biblique à souhait (c'est la dernière partie du livre) mais les sources historiques juives traditionnelles de l'époque le décrivent comme un personnage singulier et haut en couleurs , spirituellement parlant. Le gros de l'ouvrage retrace donc, avant les légendes, son parcours personnel, social et religieux de manière chronologique.

    Il reçu une solide formation jeune homme auprès du Rabbi Adam Baal Shem qui lui transmit ses savoirs et secrets mystiques et il parfait ses connaissances médicinales héritées de sagesse tsiganes, chrétienne orthodoxe et de kabbale pratique, lui conférant un statut hybride entre piété et magie, saint homme et sorcier.

    Il s'inscrit, dans un premier temps, dans une tradition de folle sagesse comme le furent le Mullah Nasruddin, le prophète Élie, le juif Mordekhay ou encore le druide Merlin, n'hésitant pas, lors de son second mariage, à s'isoler sept années au milieu de la forêt pour mieux consolider son intériorité (par la prière, l’étude et la méditation) et développer sa sphère imaginale (voyages dans les inframondes, dialogues avec une ascendance liée à l'étude ésotérique de la Torah).

    A 36 ans son aura le dévoile au monde avec "grâce, autorité et même divinité" : Il se sent investi d'une mission de « préparation de ses adeptes à la libération individuelle et à la rédemption messianique", par la transmission de connaissances, l’élévation spirituelle et la métanoïa.

    Il s'installera une vingtaine d'années et finira sa vie à Medjybij en Ukraine, où il sera respecté et vénéré comme un véritable guide spirituel (un Tsadik) , "à la fois kabbaliste, chaman, faiseur de miracles et guérisseur, connu pour son charisme, sa piété, ses dons surnaturels et par dessus tout par sa connaissance des pouvoirs des noms de dieu".

    Il tranchera dans l'époque par sa proximité avec les gens de tous bords et la nature, en communion avec tout ce(ux) qui l'entourai(en)t (vision de Dieu en tout), les rabbins de l'époque et leur enseignement passant pour être cloisonnés et hermétiques.

    Nicolas de Flue jouera au 15ème siècle pour la chrétienté, un rôle similaire (cf. les visions de Nicolas de Flue par M.L Von Franz).

    Ses disciples, descendants et adeptes le populariseront de façon orale dans un premier temps. Son rayonnement s'étendra jusqu'à nos jours, comme le fondateur d'une branche du judaïsme orthodoxe, le Hassidisme. Mais la prophétie messianique en exergue ne concerne t'elle pas finalement plutôt son "commerce" avec l'invisible dont il fut coutumier et novateur au sein du judaïsme ? Communication qui, loin du channeling, nécessite un état d'être profondément centré, en harmonie, en plus d'une grande piété, bien évidemment.

    "Dieu est Esprit, et il faut que ceux qui l'adorent l'adorent en esprit et en vérité." (Jn. 4.24)

     

  • Le chemin de l'affirmation

     

    "Un enseignement spirituel efficace permet de purifier l'inconscient en profondeur, de transmuter les énergies émotionnelles négatives et d'éroder la profusion des désirs. Le mental se transforme alors en dictateur déchu, car les fausses lois qu'il a érigées (et cela depuis l'enfance) perdent de leur pouvoir. La fausse monnaie qu'il utilise est impitoyablement contestée, ses discours et arguments sont pourfendus jusqu'à la racine, laissant peu à peu la place à notre être essentiel qui avait été jusque là pris en otage".p.96

     

    eric et sophie edelmann,dites-leur de viser haut,swamji pajnanpad,g.i gurdjieff,editions du relié,février 20202019 fut une année prolixe pour la galaxie Desjardins avec l'excellente autobiographie de sa seconde épouse Véronique Desjardins (dans l'intime d'un chemin), un livre synthétique de clarification de la voie de la connaissance par Gilles farcet, le disciple beat (une boussole dans le brouillard) et une analyse de l'enseignement de Swami Prajnanpad, le "guru", par son fils Emmanuel Desjardins (vivre : la guérison spirituelle selon Swami Prajnanpad).

    L'actualité ne faiblit pas en 2020 avec des nouvelles du Québec et de l'héritier de la lignée Eric Edelmann ainsi que sa femme sophie, élève de la voie de l'Advaïta Vedanta depuis 30 ans. Après le succès public de "Jésus parlait araméen" et critique de "Mangalam" (l'Ashram qu'il a fondé en 1992 sur directive d'A. Desjardins), le couple Edelmann nous livre "Dites-leur de viser hautPromesses et défis de la voie spirituelle", toujours aux éditions (de qualité) du Relié.

    Il s'agit avant tout d'un livre de connaissance ou de science de l'être, reposant sur une pratique de la voie et une certaine maturation spirituelle. Autant d'états d'être que de progression sur cette voie de prises de conscience concernant les désirs inassouvis ou les émotions refoulées pour aller vers le sentiment (qui lui, est stable) ou l'équanimité de cœur. Tous les jalons sur le chemin sont évoqués et la parité de point de vue ne souffre pas de redite mais encourage la complémentarité avec une énergie et un style différents et plaisants.

    Le titre renvoie à un souhait d'Arnaud Desjardins pour tout apprenti ou disciple de la voie, d'afficher un but personnel de grandeur : mourir à la structure égotique avant la mort biologique, sortir de la prison de l'identification au corps ou viser l'éveil ou la libération en cette vie...

    C'est également un livre pratique qui multiplie les références biographiques comme autant d'outils sur le chemin. Sont cités également de nombreux éveillés et l'on comprend qu'il existe aussi une communion de sages, tous tributaires d'une lignée ou tradition dont les grâces et bénédictions se perpétuent d'âge en âge.

    De nombreuses anecdotes concernent Arnaud Desjardins en situation de vigilance (contrairement à l'attention, elle est le signe d'une détente ou libération) ou d'ouverture de coeur, pour mieux nous rappeler qu'il n'usurpa pas son titre et rôle de maître spirituel. Il était au moins parvenu à ce stade de décristallisation de l'ego (dépassement du trait principal de la structure égotique) où l'émotion n'est plus qu'énergie et l'identification au corps une illusion de plus.

    De nombreux parallèles avec l'enseignement de Gurdjieff ou voie de l'homme avisé jalonnent également le livre. Swamji Prajanpad aurait souhaité le rencontrer (ils avaient des disciples en commun) sans doute pour mieux savourer de visu une même profondeur de vision ou de compassion envers l'humanité non libérée de ses mécanismes de fonctionnement.

    Des concepts clés de son enseignement sont ainsi éclairés (l'organe Kundabuffer par exemple) comme d'ailleurs certains passages des évangiles (le mental identifié au malin) et la notion de rappel chère à Gurdjieff trouve dans la voie de l'Advaïta Vedanta tout son sens en prenant l'émotion comme moyen de pratiquer le oui, l'union à ce qui est. A la différence du sentiment en effet, celle-ci amène son cortège de faux et décentre ou désaxe souvent l'être spirituel en amenant des pensées ou comportements erronés.

    Convergence donc des termes ou du vocabulaire employé entre les deux écoles (un chapitre entier y est consacré). Même si A. Desjardins fréquenta les groupes Gurdjieff durant une quinzaine d'années avant sa rencontre avec son futur maître spirituel Swamji Prajanpad, la filiation avec le maître caucasien est somme toute assez récente (y compris chez Gilles Farcet) peut-être dans un souci de fusionner ou créer des ponts entre les deux voies ou de montrer la continuité de perspective entre l'une et l'autre.

    Le travail selon la lignée de l'Advaïta Vedanta ou voie de la connaissance est une pratique quotidienne qui porte ses fruits au fil des ans auprès d'un maître ou instructeur spirituel en parvenant à se lester de ses oripeaux égotiques ou égoïstes et à être moins dupe de ses mécanismes de défense. Le point d'orgue de ce chemin concerne le "trait principal", qui est la structure égotique bancale de base, vue ici comme un verrou accessible de ce quoi il est bon de se libérer de son vivant pour progresser vers un état de conscience étale et équanime.

    Seul regret sur ce chemin spirituel c'est le silence de Dieu sans qui pourtant, pour le croyant, rien ni aucune avancée n'advient. Un mystique de la pure lignée monothéiste y perdrait sans doute son latin et à terme, sa joie ou folie de vivre, au milieu de cette ascèse somme toute très scientifique.

     

  • La miséricorde sensible

     

    Une pensée ou un sentiment n’a pas vocation à être soigné, ami, mais à être embrassé avec douceur, dans l’étreinte aimante de la conscience du présent

     

    Jeff Foster - La joie de la vraie méditation – Editions Almora – Janvier 2020Jeff Foster est un jeune homme très écouté, qui a vécu un éveil sauvage, soudain, sans référence à un quelconque maître spirituel.

    Dans son dernier livre paru aux éditions Almora, “la joie de la vraie méditation” Il part de son expérience personnelle de reconnexion avec l'Enfant intérieur, qui est proche de la Source universelle (le Soi dont parlent les orientaux), pour proposer une méthode d'écoute plénière à l'autre et qu'il nomme la vraie méditation.

    Son enseignement, puisqu'il écrit, est de retrouver le chemin du corps et du cœur et du souffle aussi. Quitter la tête, respirer, revenir à l'instant et à ce qui se joue dans le corps cuirassé, être pleinement écoute, se reposer dans la Présence inconditionnelle de l’ici et maintenant.

    N'étant d'aucune tradition (même s'il rejoint l'enseignement non dualiste), il élude la mouvance new age et son programme de développement personnel, préférant se sentir entier qu'heureux ou être “simple présence attentive” plutôt qu'en “quête épuisante d'un moi meilleur”, toujours dans la fausse attitude de l'aide à autrui.

    Jeff Foster est un être de et en relation qui est un jour tombé amoureux de son ennemi intérieur, “un ennemi qui s’est avéré être un enfant innocent, qui criait et se débattait pour obtenir son amour”. Désormais il se dit au service des cœurs brisés, comme s'ils étaient Dieu lui-même, ce qui change de la récompense au mérite qui sévit dans les lieux d'enseignements traditionnels, là où l'enfant terrible est souvent rabroué.

    Jeff Foster sait désormais qu'en chaque adulte blessé se cache l'Enfant qui veut, par blessure primale, accaparer l'attention avec peur, colère ou tristesse et il lui prodigue toute son attention, tel un frère aimant qu'aurait pu incarner Jésus, qu'il cite de temps en temps. Un enseignement réconfortant, un amour inconditionnel qui flirte entre folie et universalité et qui rappelle par moments dans l'esprit, le chef d’œuvre de spiritualité qu'est le “fou et le Créateur” de Daniel Pons, qu'il transcrivit en écriture inspirée.

     

    La joie est là dans le sentiment d’être en vie, le ventre qui se soulève et retombe, le cœur qui bat, les bruits surprenants de l’après-midi.

     

  • L'essence de la vie spirituelle

    Être un miroir, c'est accueillir tout ce qui apparaît dans l'instant – pensée, émotion, sensation physique – sans s'identifier et sans en être affecté. Être vigilant, c'est être pure lumière qui éclaire ce qui est, pur témoin qui voit tout – Marie Chantale Forest.

     

    Marie Chantale Forest,Anthologie de la vigilance-un chemin vers la lumière,Editions Accarias l'Originel,Eric Edelmann,Arnaud Desjardins,Novembre 2019Les éditions Accarias l'Originel viennent de publier une "anthologie de la vigilance – un chemin vers la lumière", réalisé et écrit par Marie Chantale Forest. Cette dernière, québecoise, est une élève d'Eric Edelmann, lui-même héritier de la tradition de l'Advaïta Vedanta prônée par Arnaud Desjardins (1925-2011).

    Ce livre vient combler un appel du Maître spirituel disparu à disposer d'un outil pratique et synthétique pour tout aspirant à la voie spirituelle, tant la vigilance ou "lucidité accrue" semble être le ciment de toute démarche d'éveil.

    L'autrice a lu attentivement (ce qui est en soi un excellent exercice de vigilance) bon nombre de textes sacrés, écrits de maîtres spirituels, sages, saints ou auteurs de toutes traditions occidentales ou orientales. Elle a constitué un large panel de propos sur et autour de la vigilance (bibliographie complète de 27 pages !) qu'elle a regroupé par thèmes en trois parties : la prison, la clé et la liberté. Elle s'est également impliquée en tant que chercheuse spirituelle, en proposant de courts paragraphes résumés inspirés et inspirants, sortes d'aphorismes mûrement réfléchis (au sens de médités).

    Le résultat est une anthologie de 160 pages (hors préface et bibliographie) qui se lit à petites doses et qui a vocation d'enseignement pour les débutants ou les chercheurs plus avancés sur la voie. La part belle est accordée proportionnellement parlant aux propos d'Arnaud Desjardins, l'inspirateur du projet et celui qui sema de nombreuses graines de sagesse en proposant un enseignement syncrétique ancré et adapté à la modernité.

     

    Le moine doit, comme les chérubins et les séraphins, n'être qu’œil – Abba Bessarion

     

  • L'oeil de l'orfèvre

    Pâcome Thiellement,Tu m'a donné de la crasse et j'en ai fais de l'or,Massot Editions,Janvier 2020L'homme est à moitié fou : il parle aux animaux, aux morts, voit des signes partout et possède une conscience apocalyptique ! Bienvenue dans la tête et le cœur d'une âme sensible et donc, de notre point de vue, profondément humaine, qui se dévoile intimement peut-être pour mieux saisir la genèse et l'orientation de son œuvre.

    Pâcome Thiellement aime passionnément l'art, il est lui-même un être singulier producteur de richesses. On lui doit des essais cinématographiques et littéraires, sur Twin Peaks, la culture pop (Zappa, les Beatles) les gnostiques (la victoire des sans rois) plus récemment sur la série the Leftovers de Damon Lindelof (il avait auparavant disséqué la série Lost du même showrunner). Dans cet essai autobiographique "Tu m'a donné de la crasse et j'en ai fais de l'or" il s'adresse à la fois aux bons entendeurs que nous sommes mais aussi au Démiurge qui est le Dieu pervers et narcissique des gnostiques et le créateur factice de ce monde mauvais (et non pas le vrai bon Dieu) pour mieux lui faire la nique.

    Car ce livre important et passionnant est aussi un livre de combat, une sorte de manifeste d'un guerrier spirituel dans un monde qui ressemble de plus en plus à l'enfer. De nombreuses références aux sentences des guerriers chinois mais aussi à Carlos Castaneda et son mentor Don Juan parsèment l'ouvrage qui se rapproche d'une sorte d’exégèse de sa vie ou plutôt de son âme puisque les moments clés de son histoire personnelle sont revus à l'aune de l'écrivain à succès et de l'homme équilibré qu'il est devenu. On parlerait volontiers ici de récapitulation de certains traumatismes ou malheurs (la crasse) sublimés par la connaissance quintessentielle qu'ils véhiculent à rebours (l'or), une sorte d'alchimie qui est à la fois guérison et grille d'interprétation lucide et froide (comme la lame d'un sabre) des événements marquants de son vécu, car "toute souffrance s'évapore dans la juste conduite de vie"et "la condition du bonheur c'est la transformation de la crasse"

    Ceci étant dit, même si l'on ne partage pas sa vision gnostique du monde (où cathos, riches et "sans-dents" sont dans le même panier), on reconnaît à l'âme adventice ("l'âme infiltrée en nous qui ne cherche qu'à vampiriser notre puissance par le cynisme et vaporiser notre volonté par la dépression") d'être comme notre fameux ennemi intérieur avec sa qualité de sape du moral quand on fait ou dit l'inverse de ce que nous voudrions pour soi ou autrui. Castaneda parlerait du flyer qui se repait de notre culpabilité...(le vieil homme et ses multiples "je" pour les chrétiens, les nafs des soufis...).

    Mais le message est ailleurs. Ce fameux adorateur obscur de Jésus, ce praticien du voyage astral, ce voyant de l'invisible (c'est la définition du prophète jadis) nous parle du fait de se sentir réssuscité en cette vie après avoir il est vrai eu des preuves tangibles d'un au-delà. "Nous ne sommes vivants que lorsque nous avons "ressuscité dans la vie" et que la mort n'a plus sur nous aucun pouvoir". Comment sinon percevoir la beauté de ce monde agonisant, le rôle finalement salvateur du Diviseur (le Démiurge ou le Satan au choix) pour l'élévation de l'âme ?

    Évidemment l'homme se défend d'être saint ou gourou, plutôt guerrier de lumière contre les ténèbres extérieures ou intérieures. Végétarien, non-violent, hypersensible, soucieux d'amener du beau dans un monde contaminé par le faux (ou laid au choix) on pourrait juste lui reprocher son snobisme ou son point de vue hautain à l'importance que l'on peut s'accorder parfois mais son exigence et son souci d'attirer le lecteur vers le haut font de ce livre une œuvre singulière, qualitative et réussie.

    Peut-être fait-il partie de ce reste dont parle le prophète Isaïe qui à la fin des temps (si toutefois nous y sommes) sauvera l'humanité de sa folie destructrice en transcendant la barrière de la mort.

    Il y a du Maurice Dantec sauce zen chez Pacôme Thiellement, dans la vision et l'image de l'écrivain croyant en proie aux ténèbres pour qui l'écriture est une catharsis et l'auteur une sorte de psychopompe entre ciel et terre. L'année et la décennie démarrent en fanfare.