blogger hit counter

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Choeur - Page 77

  • L'Histoire de Yahvé - enquête sur le mythe divin

    ron.jpegRon Naiweld est un historien du judaïsme ancien au CNRS. Dans l'"Histoire de Yahvé" il désacralise le Nom (que l'on ne prononce pas chez les Juifs) et propose une relecture mythique de la Bible qui devient "le récit d'apprentissage du dieu".

    L'auteur étudie notamment le processus d'universalisation et de monothéisation de Yahvé dans les premiers siècles de notre civilisation avec l'émergence du christianisme et son entrée, grâce à Paul, dans la psyché de chacun.

    A l'origine de la foi monothéiste on retrouve aussi une réflexion philosophique pour insérer le mythe dans une culture dominante. Une étude passionnante qui rend le dieu plus accessible encore.

     

    Ron Naiweld répond à quelques questions de Choeur :

    Choeur : Le point de départ de l'enquête est une "sensation curieuse et désagréable du poids du pouvoir des prêtres". Finalement vous questionnez les religions monothéistes et, à titre personnel, votre foi d'enfant avec des outils d'adulte ?

    Ron Naiweld : Je questionne plus particulièrement le pouvoir que j’appelle « psycho-politique » des religions monothéistes qui n’est pas confiné au domaine de la religion. Je porte vers elles un regard admiratif et critique. J’admire leur pouvoir d’introduire dans l’esprit un maître imaginaire, et je crains leur capacité d’abuser de ce pouvoir. Enfin, je m’interroge en tant que Juif et historien des Juifs sur un phénomène que je trouve fascinant : l’universalisation du mythe biblique dans le monde gréco-romain.

     

    C : Vous faites une lecture mythique de la Bible et décrivez l'accession de Yahvé au panthéon des divinités (le monothéisme) comme une usurpation d'Identité, aidé en cela par quelques "illuminés notoires" (Philon,Paul...). Pour vous c'est un faussaire ?

    R.N : Qui ? En tout cas, je ne vois pas les choses dans les termes d’usurpation mais d’une hybridation de deux divinités, Yhwh et Dieu. Les « faussaires » seraient les êtres humains qui effacent la différence stipulée dans le texte entre Yhwh et Elohim. Je crois que cet effacement se stabilise à l’époque hasmonéenne (c’est le sujet du troisième chapitre). Puis, au premier siècle, on voit le travail d’un autre « faussaire » qui est Saint Paul, qui lit l’histoire de la création du monde en identifiant Yhwh à Elohim (comme les autres lecteurs juifs du mythe avant lui) et puis en disant que l’homme fut créé immortel et la punition de Yhwh était de le rendre mortel. Ce n’est pas l’histoire que raconte le texte de la Genèse.

     

    C : "Jalousie, rage, insuffisance intellectuelle et moralité douteuse" caractérisent Yahvé dites-vous. On a l'impression d'avoir affaire à un tyran notoire, comme peut l'être un petit enfant ou encore le "petit ego" de l'adulte. Néanmoins une intelligence est à l’œuvre chez Yahvé puisque "le motif récurrent de l'histoire de dieu, ce qui était d'abord considéré comme une menace devient, successivement, un mal nécessaire puis un outil qui l'aide à établir son pouvoir" (p.136)...

    R.N : Oui. J’offre une clé de lecture de la Bible qui y voit le récit d’apprentissage du dieu.

     

    C : Dans "Réponse à Job", Le psychanalyste suisse Jung fait également une description peu ragoutante de Yahvé comme un dieu relativement inconscient et dont la part d'ombre serait le Satan (qui persécute Job). Pour Jung il s'agit d'une alliance entre le créateur et Sa création où les deux s'entraident dans un processus de conscientisation, comme si Dieu(x) (Elohim) était encore à naître au sein de l'humanité consciente.

    R.N : Oui, on trouve la même idée de synergie entre le dieu et l’homme chez des penseurs juifs comme Hermann Cohen ou Martin Buber. C’est une idée qui s’inscrit dans la tradition philosophique qui cherche l’union des hommes dans la pensée ; une union conceptuelle qui n’appartient donc pas tout à fait au monde des apparences. Mais dans la perspective anthropologique qui est la mienne, l’union humaine, universelle, conçue par la Bible ne se trouve pas au niveau des idées mais dans la parole et dans l’histoire. Le potentiel universel du mythe vient donc de sa capacité de faire croire aux gens qu’ils vivent la même histoire. Je crois que malgré le fait que la Bible soit étudiée depuis longtemps, ce potentiel n’a pas encore été entièrement exploré. Depuis l’universalisation de ce texte dans le monde gréco-romain, on a souvent nié sa dimension mythique (et les juifs et les chrétiens, mais pas tout à fait de la même manière). On a fait oublier que c'était aussi le récit d’un dieu. Et pourtant c’est de là que vient la puissance du texte biblique (et, du coup, son intérêt pour des lecteurs qui ne sont pas croyants).

     

    C : Vous décrivez dans ce livre les étapes de l'universalisation de Yahvé, sa stratégie géopolitique en quelque sorte : Posséder un peuple (le peuple juif), une unicité politique (convertir l'Empire), une place de choix dans l'esprit de tous (mythe sur l'origine de la mort). Qu'est-ce qui caractérise selon vous le peuple juif à travers les multiples étapes de son histoire religieuse ?

    R.N : Du point de vue de l’histoire du mythe occidental que j’essaie d’élaborer dans ce livre, et les Juifs et les Chrétiens remplissent la même fonction – inscrire le mythe de Yhwh dans l’histoire. Les modes d’inscription sont différents. On peut même dire que celle des Juifs est plus avancée car elle est fixée au deuxième et surtout au troisième siècle, lorsque le pouvoir impérial se déploie de plus en plus par le discours juridique, du droit (la date de 212, l’universalisation du droit de cité romaine, est cruciale. La Mishnah, qui est le texte fondateur du judaïsme rabbinique, est composée quelques années plus tard). Le judaïsme rabbinique, comme système théologico-politique, s’élabore donc dans un autre monde que celui du premier siècle, lorsque les textes fondateurs du christianisme furent rédigés. Mais ce judaïsme-là va se déployer surtout sous l’Islam et le Christianisme, deux religions qui s’enferment dans le mythe monothéiste que le judaïsme rabbinique a déjà réussi à dépasser.

     

    C : La "monothéisation" est d'abord philosophique avant d'être universelle ?

    R.N : Dans la mesure où l’idée philosophique de Dieu est universelle (c’est le Dieu de tout, créateur de tout…), alors les deux vont ensemble. Mais si on pense à l’universalisation du mythe du point de vue anthropologique (c’est-à-dire sa diffusion parmi les êtres humains) alors on peut dire que la monothéisation est d’abord pratiquée par des philosophes avant de devenir une pratique générale. En tout cas la monothéisation n’est pas une affaire classée. Elle s’opère chaque fois qu’un lecteur aborde le texte avec des lunettes monothéistes. 

     

    C : Vous ne croyez pas au renouvellement de l'intelligence, au Verbe, soit la fonction salvatrice de Jésus-Christ aux yeux de Paul (entre autres), qui prend la voix du Maître intérieur ?

    R.N : Si j’ai écrit ce livre, c’est parce que je partage cette croyance mais je ne l’associe pas à Jésus-Christ de la même manière que Paul. C’est-à-dire – je ne crois pas que pour renouveler l’intelligence on soit obligé de croire en Jésus-Christ.

     

    C : En réfutant le pouvoir de Yahvé et donc son universalité, n'affirmez-vous pas votre croyance profonde en Elohim, le Dieu(x) originel omniscient, bon et tout puissant ?

    R.N : Je ne comprends pas la question. Tout le livre est une interrogation sur le pouvoir de Yhwh et son potentiel universel. Dans l’histoire mythique que j’essaie d’élaborer dans la première partie du livre, Elohim est l’assemblée divine qui n’est pas nécessairement omnisciente et toute puissante. C’est une autre instance, un autre personnage de l’intrigue. Mais qu’est-ce que cela veut dire, croire en un personnage ?

     

  • Alpha Wann disciple du Verbe

    J'apporte la lumière dans le noir...

    umla.jpgD'aucuns prétendent qu'il a sorti l’album rap de l’année (2018) mais le premier long format d'Alpha Wann (membre de 1995 et de l'Entourage et auteur de 3 Ep "Alph Lauren") est un futur classique donc intemporel.

    Si un MC est la voix des sans voix, un haut parleur du peuple, il est aussi et surtout le catalyseur d'une certaine époque avec son langage, sa culture, ses humeurs et ses préoccupations. Les 17 chroniques de Philly flinguo auraient pu être écrites il y a 20 ans dans un autre pays, elles auraient résonné identiques sur le fond. La forme quant à elle est fruit de son ère, sublimée par 4 producteurs de talent (Hologram Lo, VM the don, Jay Jay &Lama onthebeat, Diabi) et masterisée par Alex Gopher (déjà là pour les albums de Nekfeu). Le bonhomme, quoi qu'il en pense est généreux (59 minutes de son), partageur (5 feat, 5 producteurs et 2 crews) et capable de remords, ce qui est un bon début dans la vie...

    ...Dis à la France que tout se paye, ce pays est en stagnation

    Ici, c'est racisme et vente d'armes, des clodos à chaque station

    Tu l'appelles Mère Patrie, j'l'appelle Dame Nation...

    Album dense donc, très écrit (quelques respirations dans les textes auraient cependant été les bienvenues), techniquement et tactiquement irréprochables, on reste stupéfait par le flow du Don à la fois rapide et précis. Son épée est acérée à souhait et nécessite un lâcher prise mental pour en saisir l'essence et le tempo. C'est un art de vivre et une façon d’être (hip hop ?) et rares sont les rappeurs qui freestylent en improvisant complétement sur le moment. C'est un peu la marque de fabrique du jeune parisien et son style s'en approche tant on a l’impression dans cet opus qu'il rappe comme il parle en passant parfois du coq à l'âne.

    C'est aussi une belle oeuvre toute en paradoxes : ego à la fois fort et fragile, croyant mais peu exemplaire, talentueux mais sévère envers lui parfois, peu ambitieux mais perfectionniste, imparfait mais excellant dans son art.

    Le titre « Une main lave l’autre » est un rappel de la religion de Phal et évoque le difficile équilibre à trouver dans un monde où les lumières artificielles font du pied et décentrent de l'effort intérieur.

     

    Très bon album de hip hop donc, français de surcroit, enterrant la hache de guerre entre old school et new school ( du boum bap à la trap pour les prods), dans la veine d’un « Si Dieu veut » de la FF ou de feu Lunatic. Inspiré et craché dans un seul expire, il eut été parfait allégé de 2-3 titres. Souhaitons à Alpha de trouver la paix de l’âme comme Ali  ou encore Kery James, qui démontrent que l' on peut cracher du feu sans jouer avec.

    ...1 pour les Clio, 2 pour les Renault, renoi
    J'suis un griot, flamme olympique comme aux JO...

     

  • Quels prénoms pour 2019 selon l’Officiel ?

    L’équipe de Chœur vous souhaite des rencontres inattendues, des spectacles merveilleux, des lectures savoureuses et un retour vers plus de nature.

     

    L'officiel des prénoms 2019, Stéphanie Rapoport, Claire Tabarly Perrin, Palmarès des prénoms 2019, palmares des prénoms composés 2019, palmares des prénoms parisiens 2019Comme chaque année, Stéphanie Rapoport publie son Officiel des prénoms. Elle est désormais entourée de Claire Tabarly Perrin, peut-être pour renouveler un peu le guide. Voici quelques nouveautés pour cette année 2019 :

    - Chez les filles, en comparaison du classement 2017,  Mia, Ambre et Eléna  font leur entrée dans le top 20, respectivement en 11ème, 17ème et 20ème position. Le trio de tête qui se bouscule la première place est toujours composé d’Emma, Louise et Jade dans l’ordre d’attribution.  Quant à Mila, elle arrive désormais en 5ème position (10ème avant) juste derrière Alice.

    Parmi les zooms prénoms, quatre font leur apparition dans le  guide* : Eden, Olivia, Théa et Victoria, signe qu’ils ont un succès croissant. Le palmarès des prénoms composés, qui ont de plus en plus la côte, est le suivant : Lily-Rose, Lou-Anne, Marie-Lou, Fatima-Zahra et Anna-Rose. De nombreux prénoms rejoignent le top 10 avec une avalanche de composition avec Rose : Lilas-Rose/Lila-Rose, Mila-Rose, Lisa-Rose et Anna-Livia. Du côté du palmarès parisien, Nina, Iris, Lou et Héloïse font leur entrée dans le classement.

    Parmi les petites nouveautés* qui apparaissent dans l’Officiel des prénoms**, voici celles qui semblent frémir, par ordre d’attribution : Ayana (Top 500) , Razane (top 600), Rim (top 600), Aélia (top 700), Esmée (top 700), Zola (top 700), Arwa (top 800), Louve (top 900), Willow (top 900) , Hope (top 1000), Alena (top 2000), Faith (top 2000) et Jazz (top 2000).

    - Le top 20 garçon accueille cette année* Noah (18ème) et Aaron (20ème).  Gabriel est toujours n°1, Louis monte à la 2ème place (anciennement 6ème) et Raphaël, 3ème, perd une place. Léo et Adam les suivent de près.

    Camille, Joseph, Marceau, Marius et Victor gagnent en visibilité puisqu’ils ont désormais leur « zoom prénom ».  Mohamed-Amine, Mohamed-Ali, Jean-Baptiste, Léo-Paul et Pierre-Louis arrivent en tête du classement des prénoms composés. Quant à Mohamed-Nour et Pierre-Antoine, ils complètent le top 10 pour la première fois*.  Direction Paris pour découvrir les prénoms qui entrent dans le classement 2019, il s’agit de Noah, Sacha et Liam.

    Enfin, quelques prénoms font leur entrée dans le guide*, voici les plus prometteurs si l’on tient compte de leur classement. Ils sont ici notés du plus donné au moins donné : Swany (top 200), Kahil (top 400), Menzo (top 500), Ayan (top 700), Riley (top 800), Denzel (top 2000) et Willow (top 2000).

    Il est dommage que le guide 2019 propose un peu toujours les mêmes thématiques d’année en année. De même, dans l’encart sur  Les prénoms qui montent et perles rares,  les auteures proposent quelques prénoms avec une orthographe modifiée en guise de prénom « original ». C’est un peu en contradiction avec les propos développés dans le chapitre Variation orthographiques et inventions.  Néanmoins L’Officiel des prénoms reste une mine pour qui veut se plonger dans la recherche du prénom idéal ou pour les passionnés.  Il permet de mettre l’accent sur des prénoms encore peu connus ou sur les modes d’un pays à l’autre. Le chapitre sur les prénoms interdits est aussi édifiant qu’amusant.

    *Les classements 2019 sont comparés aux classements de l’Officiel des prénoms 2017.

    ** First éditions

    Crédit photo: http://meilleursprenoms.com

  • Les perles de 2018

    Nos coups de cœur pour l'année qui fut et celle qui vient...

     

    Musique

    *Lost - Camelia Jordana / Laurent Bardainne

    Camélia semble s’être re-trouvée sur cet album Lost en collaboration avec Laurent Bardainne sur des mélopées trip hop, soul, pop ou de chanson traditionnelle. Profondeur du chant et expérimentation sonore, racines arabes pour un disque de musique universelle, cris et lassitude d'une jeunesse stigmatisée mais déterminée, consciente et politisée. Le fruit maîtrisé d'une époque, un futur classique.

     

    Cinéma / Série

    *Ready Player One – Steven Spielberg / Ernest Cline

    Les anciens font de la résistance et le spectacle est toujours aussi merveilleux. Il y a des codes et des références qu'on qualifie de geek mais qui ont tout simplement à voir avec l'éthique et l'unité de cœur. C'est l’esprit de l’Enfant éternel qui plane sur ce film mythique.

     

    *Le grand bain – Gilles Lellouche / Ahmed Hamidi / Julien Lambroschini

    Acteur "bankable", avec des rôles d'éternel mec dragueur et sûr de lui, Gilles Lellouche paraissait correspondre à cette image aussi dans la vie. En voyant son film, on comprend que penser cela était une erreur. Le grand bain est un film drôle, d'une extrême sensibilité, parsemé d'une touche de poésie et le scénario sort des sentiers battus. La bande de comédiens fait rêver, pas seulement parce qu'ils sont déjà connus et reconnus mais par leur jeu tendre, juste et sincère. Et puis on aurait presque envie, nous aussi, de nous inscrire à la natation synchronisée...

     

    *Twin Peaks return – David Lynch / Mark Frost

    On est face à une œuvre originale sans comparatif tant la série est indissociable de son créateur. Le mystère s'épaissit et reste entier mais des clés comme autant de thématiques nous sont données avec parcimonie. Fascination de et pour cette troisième et dernière saison : un film testament d'une époque, d'un pays et de ses croyances.

     

    Spiritualité

    *A l'heure d’Israël – André Chouraqui / Léon Ashkenazi

    Document exceptionnel exhumé d'archives de la famille d’André Chouraqui, un dialogue des années 70 avec Léon Ashkenazi sur les fondements politiques et religieux du sionisme. Un livre à valeur éducative, informative et passionnelle. La teneur des échanges est d'un très haut niveau spirituel. Un livre phare sur le sujet

     

    Théâtre

    Harlem quartet – Elise Vigier / James Baldwin

    Cette pièce nous plonge dans l'atmosphère du Harlem des années 50: comment une bande d'adolescents noirs grandit dans un pays miné par les tensions raciales, familiales, avec la guerre au Vietnam en toile de fond. Le public frissonne, enrage, découvre l'amour, la solitude et la soif de réussir en même temps que Hall et ses amis. Le spectacle terminé, relire les écrits de James Baldwin semble indispensable et encore nécessaire à l'heure actuelle.

     

  • "Vilain !" sublime le processus de création

    Vilain !,Alexis Armengol,Compagnie Théatre à Cru,Nelly Pulicani,Romain Tiriakian,Shi Han Shaw,Cindy Dalle,Camille Trophème,Felix Blondel,Quentin Dumay,Rémi Billardon,Michèle Milivojevic,Marion Montel,Heidi Folliet,Caroline Guiela Nguyen,Julien Fisera,Rémi Cassabé,Aurélien Trillot,Stéphane Fouchet,Jéssica Régnier,Olivia Bussy,Marie Lucet,Héléna Alet-Quesneau,Théatre de la Comédie,Saint-Etienne,Décembre 2018Il n'y a de mauvais départ dans la vie ou de vilaine histoire de naissance que dans la psychologie de chacun. Quand on recoud ses fragments de peaux successives, quand on recompose un film fait de bouts d'images positives, aidé en cela par des mains tendues au hasard du chemin, alors naît l'individu, le Je singulier, la personne originale, la conscience aiguisée.

    Alexis Armengol, compagnie Théâtre à Cru, s'est entouré d'une joyeuse équipe pour éclore de Vilain !, une fable sur le rebond et la résilience inspirée par des créateurs de sens. Boris Cyrulnik et Andersen y côtoient des artistes contemporains plasticiens (Shi Han Shaw) ou musiciens (Romain Tiriakian, Camille Trophème) qui subliment la scénographie de Heidi Folliet et le jeu époustouflant de Nelly Pulicani.

    Une pièce en trois parties où la re-création se fait en direct jusqu'à la renaissance symbolique, à la fois baroque et punk, de l’héroïne.

    Écoutez l'entretien avec le metteur en scène Alexis Armengol:
    podcast

    Crédit photo : Compagnie Théâtre à Cru

  • La vie de Jésus (est) comme un roman

    jesus.pngAvec le roman de Jésus, livre posthume de Jean Mercier (1964-2018) qui fut rédacteur en chef à la Vie et paru aux éditions Quasar, on replonge dans les évangiles comme si on y était encore. L'histoire est maintenant bien connue de tous mais la focale mise sur certains témoins des actes ou paroles du Christ différents des canoniques, donne un petit coup de fraîcheur et d'originalité. Le récit est humanisé, là où dans l’évangile on n'a que son ossature. Ce petit livre (publié initialement dans le magazine la Vie) est à visée éducative sans infantiliser le lecteur. Il est surtout moderne par le vocable utilisé et actualise la vision chrétienne en intégrant les dernières mises à jour ( une opinion de Benoit XVI, la légère modification du credo…).

    L'auteur n’évoque jamais Jésus frontalement mais respecte son mystère infini a travers des prismes qui questionnent l’indéfinissable ( les miracles, les persécutions, la résurrection…), ce qui nous ramène inévitablement à notre propre foi, là ou la raison n'a plus cours.

    Enfin c’est un livre qui parle de chrétienté au sens originel du terme puisqu'il met en scène les actes de certains apôtres, y compris ceux de Paul qui évangélisa les premiers païens.

    A mettre donc entre les mains de tous les enfants, petits et grands qui s’intéressent de près ou de loin au Vivant.

    crédit photo : Editions Quasar

  • En quête du Cœur vulnéré du Christ

     

    "la piété envers le Cœur de Jésus n'est pas une innovation du 17e siècle…et le culte du Cœur eucharistique est, dans l'iconographie sacrée, au moins six fois séculaire".

    (Louis Charbonneau-Lassay – p.296)

     

    vulnéraire.jpgLa dévotion au sacré cœur de Jésus n'est pas une nouveauté car des représentations artistiques de l'icône remontent pour certaines aux premiers siècles chrétiens. Seuls les 17e et 18e siècles ("périodes de corruption morale et de perversion intellectuelle, tout du moins dans les grandes villes..."), pourtant dits des lumières, ont perdu la trace de son office ou l'ont détourné, jusqu’à l'analyse scientifique du suaire de Turin au siècle dernier (par le docteur Pierre Barbet notamment - Les cinq plaies du Christ.) qui vint par ailleurs confirmer les visions de la mystique Marguerite-Marie Alacoque (1647-1690) à Paray-le-monial Sur le cœur vulnéré ou transpercé de Jésus.

     

    Les Éditions Dervy-Médicis rééditent plusieurs manuscrits inédits, le projet du livre initial ayant été volé en 1960, de Louis Charbonneau-Lassay (du cultissime « Bestiaire du Christ ») dans un beau livre reconstitué presque à l'identique de 458 pages (dont un index soigné et travaillé) et 360 gravures sur bois, de qualité, de l'auteur, intitulé Le Vulnéraire du Christ ou "la mystérieuse emblématique des plaies du corps et du Cœur de Jésus-Christ". Son contenu provient en partie des deux revues Regnabit (de 1921 à 1929) et du Rayonnement intellectuel (de 1929 à 1939) mais aussi d'archives personnelles inédites de l'érudit loudunois (1871-1946), gérées par Gauthier Pierozak.  Le symbolisme du sacré cœur et des quatre autres plaies de la Passion y sont traités "sous leurs aspects historiques,archéologiques et mystico-dévotionnels".

     

    Le sujet, épineux s’il en est, s'adresse avant tout aux fidèles en Christ mais aussi aux amateurs et passionnés d'art religieux à travers les siècles. L’étude de l’emblématique des plaies du corps et du cœur de J.C est assez complète et s'intéresse à tous les supports de piété : les autels, la monnaie, les armes, la céramique, l'art sculptural, les anciens bijoux chrétiens, l'héraldique médiévale, la nature, les cadrans solaires, les portails, les stèles funéraires, les blasons...

    A travers ces objets d'art se dessine une véritable connaissance du christianisme ésotérique des premiers temps, transmis entre initiés ( "pour cacher initialement la nature divine de son fondateur"). Comment expliquer autrement que par une vision oculaire initiale ce Cœur divino-humain percé, par un coup de lance donné au côté droit du corps et d'où sortit, selon les écritures, du sang et de l'eau ?

     

    Louis Charbonneau-Lassay, spécialiste en iconographie et archéologie chrétienne était aussi un pieux catholique qui se réjouissait que «  chaque jour des preuves matérielles, conservées dans des musées publics, dans des collections privées, ou demeurées jusqu'ici sans attirer l'attention dans de pauvres ou de splendides églises, sortent de l'oubli et viennent nous proclamer combien, résolument ardente, est montée vers le Cœur du Sauveur la pensée probante de nos Pères » (p.242), et l'on suit son enquête de terrain à rebours du temps. On passe un bon moment en compagnie de ce livre-fleuve, voyageant à travers les siècles de la piété populaire et partageant les découvertes et émotions de l'auteur.vulneraire 1.jpg

     

    Son vulnéraire, ultime œuvre sur laquelle il plancha, peut être considéré, si l'on estime que la crucifixion est un puissant Imago Dei, comme la Représentation symbolique de Celui qui ne saurait être représenté et qui est Cœur souffrant pour toute l’humanité. "Le Cœur vulnéré est certes l’évocation stricte du coup de lance mais surtout le Cœur de Celui qui a été crucifié pour notre salut, la source naturelle de son sang qui a coulé par amour pour nous, le foyer de son amour…et l’idée aussi de l'absolu dans le sacrifice parce qu'il est le réservoir et la source même du sang et de la vie" (L.C-L p.390).

     

    Crédit photo : Dervy Editions.