blogger hit counter

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Choeur - Page 43

  • Au service de la Vie

    Contrairement à l'ego, "soi-même" préfère jouer que se répéter.


    shaman 2.jpgLe second tome de
    Shaman, imaginé par Tigran aux éditions Mama s'intitule La Vision et s'avère plus théorique que le premier.
    Les liens spirituels entre le narrateur, sa femme Hilga, leur fille Seta et la chamane Otharjanat sont dénoués et dévoilent la complexité du dessein céleste.
    Tout s'imbrique et prend un sens magique au service de l'Amour. Car il est toujours question d’œuvrer à soigner des maux (ou d'accepter l'échec aussi), remettre l'énergie en mouvement, réharmoniser des déséquilibres...et préserver la lignée des guérisseurs pour que la flamme sans âge vacille à jamais.
    On retrouve les éléments qui faisaient le charme du premier opus, les embardées dans l'invisible, les rêves initiatiques, les liens forts et vivaces avec la nature, les flashbacks dans l'enfance saturée de signes du narrateur, et les instants de vie, les échanges simples et profonds entre ces êtres qui expérimentent la réalité augmentée. 
    Est également explicitée la nature lumineuse de l'âme sur l'esprit selon la conception chamanique, sa malice à ne vouloir se laisser enfermer dans aucune routine égotique pour demeurer sans forme, libre dans l'instant, ouverte à tous un champ de possible, l'invisible et l'incroyable y compris.
    Si le temps du rêve n'est que présent, on se prend, lecteur, à aimer cette vie rêvée ou chaque instant est riche de présences, de conscience et d'interconnexions surnaturelles.

     

  • Une mécanique bien huilée

    ©Christophe-Raynaud-de-Lage8-scaled.jpg

    La mécanique du hasard, proposée par la compagnie Théâtre du Phare, est une libre adaptation hommage de Catherine Verlaguet (réécriture) et Olivier Letellier (mise en scène), du roman de l'américain Louis Sachar,  Holes - Le passage (ou la morsure du lézard), un grand classique de la littérature jeunesse paru en 98.
    Sur scène deux jeunes acteurs, Fiona Chauvin et Guillaume Fafiotte, vont chacun incarner tous les personnages, peu importe leur genre, dans un voyage spatio-temporel à l'aide d'un frigidaire, principal élément scénographique. Le reste n'est qu'imaginaire et talent d'artistes.
    L'histoire est celle de la malédiction des Stanley Yelnats (palindrome), appelés ainsi depuis quatre générations et dont le bisaïeul n'honora pas un pacte de sorcellerie pour une histoire d'amour. Le récit principal se joue de nos jours quand le jeune Stanley, 4ème du nom est envoyé dans un camp de redressement au désert suite à un prétendu vol de chaussures. C'est là qu'il va rencontrer, en creusant un trou, de singuliers personnages dont l'étrange Zéro, avec lequel des blessures du passé vont se cicatriser. Des flashbacks mettront habilement en scène les histoires traumatiques des ancêtres.
    La pièce qui s'apparente à une quête initiatique, dure une heure et envoie du lourd, texte et engagement physique à l'appui. Elle est aussi une invite à l'investigation intérieure pour soigner son arbre généalogique. Tout (personnes et contextes) concoure à dénouer des situations conflictuelles, pourvu qu'on y croie.
    Presque 200 représentations pour cette petite pépite créée en 2018, qui est une leçon de justesse et la preuve qu'on peut intéresser une audience tout public avec un long texte savamment mis en scène.
    Fiona Chauvin et Guillaume Fafiotte sont dans l'écoute et l'entente parfaite (tout semble calibré au millimètre dans la parole et le geste) et parviennent à captiver le public en instaurant un silence attentif. Ils sont en plus au micro de Choeur (9 minutes) !


    podcast

    ...Et à la filature de Mulhouse du 8 au 10 Juin prochain.

    Photo : ©Christophe-Raynaud-de-Lage8-scaled

  • De lumineuses origines

    Lumière, le voyage de Svetlana, Lylian, Sanoe, Vents d’Ouest, Carole Trebor, Rageot, siècle des Lumières, Russie, Diderot, fantastique, mai 2022Est-ce le moment de s’enticher d’une bande dessinée qui nous emmène en Russie ? C’est la question qu’on se pose et puis … Et puis ce pays n’est pas Poutine, les russes encore moins.

    Cette histoire se passe en 1774, à l’époque où Catherine II dirige la Russie, pas non plus très tendre me direz-vous ! Justement, ici, la fiction percute la grande Histoire et permet d’en apprendre davantage sur ce pays, mais aussi sur le règne des Lumières en France, on y croise d’ailleurs Diderot et sa fameuse encyclopédie*. Mais revenons à l’héroïne du récit : Svetlana alias Lumière, le voyage de Svetlana de Lylian (scénariste) et Sanoe (dessinatrice et coloriste) publié aux éditions Vent d’Ouest. La bande dessinée est adaptée du captivant et intense roman du même nom de Carole Trebor, paru chez Rageot en 2016 (à découvrir assurément).

    Le quotidien de la jeune fille est plutôt morose. Sa mère est morte, son père brillant astronome parisien n’a plus d’argent et se morfond. Souhaitant exposer les tableaux de sa maman, Svetlana découvre une lettre sur ses parents biologiques russes qui l’ont confiée à des français à l’âge de 3 ans. Une idée va alors germer dans la tête de l’adolescente : partir en Russie sur les traces de sa famille qui semble entourée de mystères. On retrouve l’atmosphère des lumières : le décor, les habits, les jeux d’ombres et de couleurs induits par les bougies (point d’électricité au 18ème siècle). Nous sommes vite plongés dans le passé et happés par l’intrigue. Les rêves de Svetlana, à l’atmosphère bleutée et peuplés d’animaux, nous emmènent par petites touches dans un univers fantastique.

    La vie de l’adolescente se transforme, les couleurs deviennent brunes ou bleues, comme une oscillation entre le monde réel et historique puis le monde imaginaire et magique. Mention spéciale pour le personnage d’Aliocha, sauvage et sensible, sorte de Davy Crockett qui croise le chemin de la belle et ingénieuse princesse des glaces ! Plus encore que dans le roman, Svetlana semble en effet tout droit sortie d’un vieux conte d’Andersen, même si l’histoire n’est pas du tout semblable. Nul doute que les lecteurs et lectrices attendront le tome 2 (suite et fin) avec impatiente qui promet de nous transporter aux confins du mystère et de la Russie d’antan.

    * L’encyclopédie ou Dictionnaire raisonnée des sciences des Arts et des métiers rédigé entre 1747 et 1765 par Diderot (écrivain, philosophe) et D’alembert (mathématicien, physicien).

    Image: Vents d'Ouest

  • Un chamanisme transparent


    "Le corps doit se défaire d'une certaine part d'animalité pour accéder à sa transcendance et accepter de faire le lien avec l'invisible".

     

    Brigitte Pietrzak,Voyages chamaniques et rencontres remarquables,Mama éditions,esprits tutélaires,canal,visions,Mai 2022Brigitte Pietrzak est une éclaireuse du nouveau monde à naître. Elle poursuit avec Voyages chamaniques et rencontres remarquables, son troisième livre paru chez Mama éditions (préface de Lilou Macé), le dévoilement du monde invisible, sa sagesse, ses connaissances, ses intuitions. Elle converse aussi bien avec les esprits tutélaires d'animaux (de l'ours à la reine des abeilles en passant par le hibou, l'aigle, le serpent ou le loup...), les entités célestes (ange, étoile...), les âmes défuntes ou des entités archétypiques du monde chamanique. Cet ouvrage nous en apprend autant cette fois-ci sur l'auteure, sa sensibilité, son essence, sa fonction, que sur ses rencontres dans le monde du rêve éveillé, si bien qu'on confond parfois sa parole donnée de celle reçue. Sans doute l'appropriation, le fait qu'un chamane soit un canal qui absorbe l'énergie des alliés pour "apporter réparation", dans un "consentement à servir" et une forme de "dénuement", "engageant sa clarté dans un acte de foi", puisqu'un lâcher prise mental est la porte du soin spirituellement guidé.
    Rares sont les livres qui évoquent l'après, ce monde à naître plus libre, lumineux, connecté à la Source de toute intelligence et qui concourt à l'unité dans un sens plus collectif (moins égocentré). Les textes sacrés s'arrêtent globalement au Jugement dernier qui n'est que le commencement de l'éternité, une conscience d'être inter-reliés ("rayonner c'est être avec" dit un esprit invoqué) et l'irruption de l'invisible dans le présent.
    C'est avec l'esprit dont chaque "entité" est pourvue, que le chamane dialogue pour percer les secrets de la matière. Brigitte Pietrzak rappelle qu'il n'en existe pas de mauvais mais que l'usage non éthique de cette somme de connaissances transforme la sagesse en pouvoir, le chamanisme en sorcellerie, la ré-harmonisation en magie noire...et le danger guette celui dont l'intention n'est pas pure ou désintéressée.
    Les goûts et fondations spirituels de l'auteure laissent entrevoir une âme forgée dans le terreau de l'humilité et vouée au service du Tout.

     

  • Une démarche inspirante

    Levons les voiles ! Ceux du vaisseau-souvenir, mais d'abord ceux de nos contemporains qui maquillent le passé pour nous voiler le présent”. (p.24)

     

    harem.jpgLe Harem politique de la sociologie Fatema Mernissi (1940 - 2015) c'est celui du pouvoir féminin dont la révélation coranique, divine pour les musulmans, sera l'agent révélateur.
    La culture arabe pré-islamique, celle des tribus et guerres claniques, considérait les femmes comme objets, sans héritage, droits ou sujettes à violence physique, dans une société patriarcale.
    Le prophète Mohammad dont les paroles et gestes constitueront un coran bis (la Sunna) eut neuf femmes après son premier mariage avec Khadija qui cohabitaient avec lui dans un logement attenant à la mosquée de Médine, ville de l'Hégire. Autant dire une frontière ténue entre vie privée et publique, ces dernières intervenant parfois sur les lieux de batailles ou étant à l'origine de versets révélés (sexe, voile, héritage, butin, divorce, égalité...) : un certain et sacré pouvoir donc.
    Le livre réédité chez Albin Michel (Première édition en 87), relate de ce temps béni où un homme doux, timide et idéaliste (l'auteure le vénère) voulut purifier et apaiser les mœurs en vigueur, entre tribus et sexes, aidé en cela par un Dieu progressiste et égalitaire en esprit, matriciel et Miséricordieux comme cela fut le cas au temps de Jésus.
    L'esprit cependant primait à l'époque rarement sur la lettre et le prophète était constamment sollicité pour tout type de problème du quotidien.
    Le Harem politique - le Prophète et les femmes, est aussi un ouvrage sur l'inertie d'un peuple mâle toujours enclin à garder intactes ses privilèges (politiques ou sexuels) en déformant le sacré à son compte. Le voile, son instauration dans le Coran et son actualité toujours brûlante au sein des démocraties en est l'exemple parfait.
    Pointilleuse, fine investigatrice (une somme d'archives exhumées) et militante, Fatema Mernissi inspira de nombreuses écrivaines (historiennes, littéraires, spirituelles) sur le chemin de la réappropriation de la Mémoire ou hiéro-histoire en Islam et partout où le féminin, symbolique ou de genre, fut occulté dans son pouvoir de transformation et d'unité.

     

  • Amour impérial

    l’empereur et son fils,catherine pallaro,judith gueyfier,didier  jeunesse,conte chinois,transmission,héritier,avril 2022« Il était empereur. Son palais était somptueux. Son empire immense. Son peuple l’aimait »

    Bleu profond, vert d’eau, lilas, ces couleurs nous sautent aux yeux et illuminent Lempereur et son fils , édité chez Didier Jeunesse de Catherine Pallaro (texte) et Judith Gueyfier (dessin). Le crayon de l’illustratrice fait apparaître en douceur des personnages aux traits expressifs et au regard intense. Derrière l’apparente simplicité du geste apparaît la consistance du dessin, tout comme la petite histoire s’amplifie, prend de la hauteur et nous touche durablement.

    « Mais chaque jour, à l’heure où ses conseillers venaient lui rendre visite, une ombre passait sur son visage »

    Un empereur bon règne avec sa femme sur son royaume. Il est aimé du peuple mais il n’a pas d’héritier. Malgré les réticences de ses conseillers il décide d’adopter un enfant plutôt que de répudier sa femme. Il organise un concours pour trouver la perle rare, celui qui sera digne de lui succéder. C’est ainsi que les lecteurs découvriront ce qui est le plus important aux yeux des époux. La nature et les fleurs ont une place prépondérante dans cette histoire, loin d’être mièvre.

    « Et voici ce que vous allez faire : convoquez nos messagers, remettez-leur les graines que me femme et moi avons préparées »

    On ne se lasse pas de ce conte venu de Chine, raconté par Catherine Pallaro, et l’on ne peut s’empêcher de le relire, de méditer sur le thème de la transmission, puis de s’attarder à chaque page pour admirer toutes les subtilités du dessin de Judith Gueyfier et les petits détails que notre œil aurait loupé.

    Image: Didier Jeunesse

  • Rendre le mal Un

    La tragédie humaine, le mal persistant, viennent de la méconnaissance de notre ombre. Lorsque le mal est compris comme une ignorance de soi, nous savons que l'éducation intérieure peut s'y opposer et le diminuer”. (p.39)


    Embrasser-le-mal-couverture-349x543.jpgLe docteur Guy Ferré signe avec Embrasser le mal, paru chez l'Originel-Antoni, un court essai "contemplatif" concis, exigeant et probant, dans la lignée d'Annick de Souzenelle (Le Seigneur et le Satan) ou de C.G Jung (Le livre de Job) puisqu'il est ici question de l'ombre (les besoins infantiles de reconnaissance, d'orgueil, de jalousie, de domination, de peur...), du processus de maturation (devenir responsable ou adulte) qui résulte de sa nécessaire confrontation et de la conscientisation d'un centre autonome détrônant l'ego ou faux personnage.
    L'ouvrage est émaillé de citations de Lee Lozowick (le maître spirituel de l'auteur) ainsi que d'autres sages et philosophes de renom, lui donnant son caractère œcuménique.
    Une seconde partie plus personnelle mêle expérience et convictions sur les racines du mal en chacun (le scénario de survie souvent tyrannique, violent ou cruel du petit ego) et la nécessaire adaptation à la perte (physique, émotionnelle, psychique) d'(un) être séparé, qui ouvre un champ inconnu mais riche de potentialités (en terme d'énergies, de niveaux de conscience...).
    La question du mal (guerres, souffrances, viols...) concerne bien sûr notre part d'humanité maudite qui n'attend qu'une baiser du Vivant en nous pour se sentir aimée inconditionnellement. Croyant ou pas, c'est Dieu ou l'être en soi (ou le maître de la voie) qui a ce pouvoir de guérison spirituelle même si en délaissant la toute puissance (une blessure narcissique souvent) on se retrouve impuissant ou vulnérable à la tyrannie d'autrui. Reste à accueillir à hauteur d'homme cette faille inhérente à notre commune nature et traiter autrui comme nous voudrions qu'il nous traite puisque l'élévation est notre tâche et alliance. Cette démarche peut s'apparenter à la praxis chrétienne que peu appliquent en profondeur. Le péché représenterait alors les scories de la personne qu'il convient de brûler dans une pulsation embrassante.
    Un petit livre édifiant dont le jugement est absent et qui fortifie en soi notre capacité unitive.

     

    “Le délire de toute puissance et d'immortalité de l'homme augmenté est en réalité une conséquence mortifère de notre refus collectif d'apprendre à nous pencher sur le sentiment de perte et ainsi à embrasser le mal”.(p.92).