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Choeur - Page 45

  • Luna au pays des champignons

    La sorcière aux champignons, Tachibana Higuchi, édition Glénat, manga, shojo, mars 2022La première couverture de La sorcière aux champignons, manga écrit par Tachibana Higuchi aux éditions Glénat, éveille les sens. On se précipite pour toucher les champignons rouges et brillants à la texture particulière, un peu rêche. Ensuite les yeux mauves et la robe aux délicates fleurs bleues de l’héroïne nous attire. Enfin, les framboises, couleur framboise, nous donne faim ! Tiens, quel goût ça a, une fricassée de champignons-fruits des bois ? Ceux-là semblent plutôt vénéneux donc rangeons les casseroles et installons-nous confortablement pour déguster le tome 1 des aventures de Luna, la sorcière noire.

    Comme toute bonne sorcière qui se respecte, Luna est rejetée par les humains et vit au fond de la forêt. Ses compagnons, une vache, un mouton et deux chats étranges, sont beaucoup plus bavards qu’elle (sauf le gros matou) et peuvent changer de taille quand Luna le décide. Malgré sa hantise du village, la sorcière s’y rend régulièrement pour donner des remèdes à l’apothicaire. Si les humains apprenaient que c’est Luna qui fabrique les breuvages, aucun d’entre-eux ne voudraient y goûter. Il faut dire que partout où elle passe, des champignons poussent sur son passage. Si quelqu’un la touche il peut même en mourir car son souffle contient des spores toxiques ! Évidemment vous non plus vous n’oseriez pas l’approcher, pourtant le mycélium qui pousse absorbe au contraire le poison et les mauvaises pensées des villageois.

    Ce qui retient l’attention chez Tachibana Higuchi, ce sont tous les petits détails qu’elle glisse sur les différentes sortes de champignons, le chapeau de Luna en perpétuel évolution, ses tenues précises et le plus « kawaï » et subtil c’est la maison de la sorcière en … champignon bien sûr ! Quant à l’histoire, on n’échappe pas au côté romantique, « shojo » oblige mais le jeu entre le dessin de l’autrice (réel) et le dessin de Luna (irréel) est intéressant, comme la découverte des personnages humains. Par ailleurs, le tome 2 promet un peu plus de suspens et d’intrigue avec l’histoire des sorcières blanches (aimées du peuple) et un drôle de personnage-oiseau qui titille notre curiosité. En attendant, c’est l’heure de tester une recette de duxelles de champignons et son jus de « framboise-pignoncchios » bien corsé. Bon appétit !

    Image: Glénat

  • Hana, oiseau de bonne augure

    hana thierry,les hirondelle et autres noms d’oiseaux,touria arab-leblondel,milan,adolescence,collège,rep,mixité,sortie pédagogique,riad sattouf,mars 2022« - Waouh, ils ont déjà vécu des trucs de ouf ! Qu’est-ce que j’aurais pu raconter sur « PARTIR », moi ? Ma mère m’a répondu : -Tu aurais plein de choses à dire. »

    Comme un écho à l’éducation dans les bois, le premier roman de Touria Arab-Leblondel : Hana Thierry, les hirondelles et autres noms d’oiseaux, édition Milan, raconte le projet d’une prof de SVT d’un collège classé REP : emmener sa classe en forêt pour un évènement hors du commun. Hana Thierry et la plupart de ses camarades ont une image plutôt lointaine de la nature et des animaux sauvages. Collégiens dans un établissement mal-vu et pour la plupart « originaires d’ailleurs », ce sont plutôt eux que l’on compare à des sauvages, sans toujours s’en rendre compte. En effet, Hana est une des rares élèves de son école à se rendre dans ce collège alors que tous les autres parents (ou presque) décident d’inscrire leurs enfants à St Thérèse où il n’ y a pas de « caillera ». La jeune fille dont on découvre la rentrée en sixième et dont on suit l’année de quatrième, est métissée : mère arabe, père français de souche (tiens un terme forestier). Elle voit cela comme une richesse mais difficile de le faire comprendre dans une société manichéenne ou à ses petits camarades qui la somme de choisir son camp.

    «  Ce qui est peut être plus embêtant, poursuit Florence, ce sont les tiques. Il faudra prévoir des vêtements couvrants et chauds, car nous allons être dehors assez tard et, […] il peut faire frais ».

    L’ouvrage aborde assez naturellement des sujets d’actualité brûlants ou clivants comme le voile, les régimes alimentaires à la cantine, ou l’embrigadement des ados sans se focaliser dessus ni les taire. L’écologie, la chasse, la stigmatisation, les trajectoires individuelles, l’acceptation des différences et surtout le passage de l’enfance à l’adolescence, des doutes à l’affirmation de soi, traversent le livre. Il nous rappelle ainsi que le collège est une micro-société où se reflètent toutes les difficultés rencontrées à l’échelle d’un pays, telle une loupe grossissante, avec la naïveté, la spontanéité et parfois la brutalité des adolescents. Les adultes, professeurs et parents, cherchent le moyen de les canaliser, les intéresser et leur apprendre à se méfier des idées toutes faîtes, glanées au détour des réseaux sociaux ou par l’intermédiaire d’un camarade mal intentionné.

    « Il y a beaucoup de second degré chez Riad Sattouf, même si ses livres sont très autobiographiques. D’ailleurs, vous-même vous n’en manquez pas, de second degré, hein, Malik ? »

    Un premier roman pour collégiens qui semble s'inspirer de la vie de son autrice Touria Arab-Leblondel, elle-même empreinte de plusieurs cultures, et de celle de ses enfants pour les dialogues vivants et le langage actuel des personnages. Allons donc voir passer les hirondelles et autres oiseaux aux milles nuances.

    Image: édition Milan

  • Une inspiration universelle

    L'absence ou le manque de vie, de conscience et d'amour, c'est ce que Paul appellera le vieil homme, l'homme extérieur ou le péché. La présence retrouvée de la plénitude de la vie, de la conscience et de l'amour, c'est ce qu'il appellera l'homme nouveau ou l'homme ressuscité, celui qui vit selon l'Esprit, l'être pour Dieu/Amour/ Agapé et non selon la chair, l'"être pour la mort". (p 48)



    Jean-Yves Leloup,Paul maître spirituel,éditions Medispaul,Nietzsche,Durckheim C.G,Maitre Eckhart,Jésus-Christ,Verbe,enseignement,évangileFévrier 2022Le prolixe Jean-Yves Leloup (presque 10 livres ces 5 dernières années) s'empare du cas Paul avec  "Paul maître spirituel - la transmission d'un éblouissement" qui paraît dans la collection Paul Apôtre chez Mediaspaul.
    Le personnage est intéressant car il est le seul Apôtre à ne pas avoir connu Jésus physiquement mais en sa qualité de Lumière quintessentielle lors d'une révélation sur le chemin de Damas.
    De persécuteur des chrétiens il deviendra le précurseur de l'initiation à l'Esprit, propre aux rapprochés du Christ.
    J.Y Leloup convoque philosophes, pères de l'église et maîtres spirituels chrétiens (Eckhart, K.G Durckheim) pour appuyer la spécificité et la modernité de l'enseignement de Paul. Comme Nietzsche il rejette l'Ancien Dieu de ses pères (violent, jaloux et moraliste) mais trouve, à la différence du philosophe devenu fou, un sens nouveau à vivre sous le joug de l'Amour, une Trinité relationnelle révélée par Jésus-Christ.
    Qui plus que Paul aura fait rayonner le message évangélique originel (Il faut qu'Il croisse et que je diminue..., Ce n'est plus moi mais Christ qui vit en moi...), une co-naissance en soi du tout Autre, divino-humain, incorruptible, saint ou éternel.
    C'est en ce sens qu'il le qualifie dans cet essai, de maître spirituel et plus, pédagogue et christophore.
    Son élection portera fruit jusque dans le verbe transcrit (un enseignement en soi) et transmis (une transmission en souffle et vérité), comme véritable semence pour qu'éclos le Christ intérieur.
    Ce nouveau Dieu (ou peut-etre son évolution ?) appelle un nouvel Homme transfiguré et rendu plénier par l'Amour incarné. Cette double origine permet de s'émanciper de "la chair", soit ce qui est fini, généré, conditionné, non relié à l'Esprit ; pour cheminer vers une identité plus libre, infinie, connectée à la Source unitive.
    On passe un bon moment à se remémorer un Verbe fédérateur et bâtisseur donc nourricier, qui influença vingt siècles de savoir-être et de réflexion ontologique (les citations sont nombreuses). Pour aller plus loin dans l'enseignement révolutionnaire du Christ porté par l'Apôtre des nations, J.Y Leloup aurait pu citer comme possible ouverture quelques passages des Dialogues avec l'Ange, à notre sens révélation ésotérique et pratique (le Nouveau, le Donne, la co-naissance qui est Amour, la matiere-lumière...) de la lettre que constituent les textes sacrés, monothéistes en particulier.
    Un péché académique qui réduit à la sphère dogmatique la portée de cet essai.

     

  • Dieu reconnait les siens

    "Dès l'enfance, ma nature profonde réveillait et stimulait les tendances héroïques et spirituelles de mon caractère. J'entendais une voix surnaturelle. Je désirais aussi combattre pour ma patrie...céleste". (p.91)

     

    delorme.jpgLes éditions Erick Bonnier rééditent Le Chemin de Dieu, classique de l'ésotérisme paru en 1979 chez Albin Michel, qui est un récit autobiographique de Catherine Delorme (1901-1991) dite "Mamita", une référence de l'Amour incarné chez les soufis.
    Les événements de sa vie, de ses dons exceptionnels (guérison, faiseuse de pluie, rêves prophétiques, vision spirituelle...), à sa guidance  malgré les épreuves (son nom musulman est Hydayat Allah, "la guidance divine"), évoquent une destinée hors du commun dont l'Islam fut la forme de sa réalisation.
    Sicilienne et chrétienne de naissance, Catherina Maltese dépeint dans ce livre des souvenirs où affleure la fine pointe de l'âme, dès l'enfance, et où son besoin d'être aimée sera comblé à l'issue de son cheminement spirituel - de la mystique à la kabbale, de la guématrie au symbolisme, de la prière du cœur au dhikr, des lectures spirituelles (guénon, Ibn Arabi...) à l'initiation soufie - par l'ultime épreuve de l'extinction dans l'essence divine (Fana Fi Llah), apex de la voie de la purification de l'âme qu'est le soufisme, pour les musulmans épris d’intériorité.
    Cette facilité et cette grâce accompagnant les rapprochés de Dieu (notamment la rencontre fortuite de ses maîtres spirituels Gabsi ou encore le Cheikh Tadili) lui fera co-naître la Source irradiante d'Amour,  pour mieux l'infuser et la dévoiler, dans la deuxième partie de sa vie, aux chercheurs de Vérité de tous bords. Henry Bonnier fera allusion à sa rencontre dans son recueil posthume, L'île d'or.
    A l'image d'une Amma ou d'un Maharshi pour l'Inde, elle fut la première femme européenne Arifa bi-Llâh, "connaissant par Dieu" pour les initiés soufis.
    L'écriture de Catherine, mariée Delorme, se rapproche de la pauvreté du connaissant (des réalités spirituelles) : plaisante mais sans fioritures ni emphase, à la fois littéraire et vivace. On passe un bon moment à l'évocation de la tariqa soufie nord africaine, des cheikhs vénérés mais simples les vivifiant, de la baraka qu'ils confèrent et de leurs rites initiatiques et festifs. Le livre retrace également l'itinéraire spirituel et religieux d'une femme européenne de la première moitié du 20ème siècle (comme Alexandra David Néel au Tibet ou plus tard Irina Tweedie chez les soufis Hindous) au sein d'un Islam encore suspect (le temps des colonies) et suspicieux envers la réalisation de la gente féminine, un état d'être qui fut à l'époque un double exploit.

     

  • Une humanité en peine

    "L'évolution de nos gènes et les performances exceptionnelles de notre cerveau nous ont doté de ce pouvoir de créer, en même temps qu'ils nous ont rendus vulnérables aux désordres de l'esprit". (p.46)

     

    raphaël gaillard,un coup de hache dans la tête,éditions grasset,schizophrénie,bipolarité,dépression,art,créativité,troubles mentaux,Février 2022Un coup de hache dans dans la tête, paru chez Grasset, est un essai atypique sur le lien entre créativité et troubles mentaux. Après son titre accrocheur, la rigueur scientifique (études en neurosciences) est de mise pour progresser dans la confirmation d'intuitions pratiques puisque Raphaël Gaillard est psychiatre à Saint-Anne. Également normalien de formation et sensible à la culture, l'ouvrage s'enrichit naturellement de réflexions philosophiques, artistiques ou littéraires puisque le code ADN du créatif partage in fine celui du schizophrène (1% de la population), du bipolaire (2à 3 %) ou du dépressif (1 personne sur cinq potentiellement) et que la mince frontière entre les deux est affaire de représentation du réel. Elle pourra confiner à l'oeuvre d'art chez l'un alors que le dénommé malade saurait se perdre dans les méandres de la pensée. 
    A l'ère de la conscience (collective et transpersonnelle) le cerveau atteint peut-être, selon l'auteur, son paroxysme de fonctionnement mais les réactions différent quant au traitement de l'information augmentée.
    Cette loterie aléatoire ne permet pas, à l'aune de cette sérieuse étude, de stigmatiser les uns ou de les catégoriser, ce qui reviendrait, à rebours, à déprécier l'oeuvre d'un auteur borderline, si l'on étudiait l'histoire de l'art par exemple. D'autant plus qu'une fêlure toute mentale, ce "petit coup de hache dans la tête qu'ont  les grands artistes" (qui est une citation de Diderot), pourrait aussi permettre à l'infortuné patient de court-circuiter la pensée et d'accéder à un autre langage : l'inspiration céleste ou Verbe, voire l'imagination active (les surréalistes ou le courant des mélancoliques en témoigne).
    Profondément empathique, Raphaël Gaillard nous offre une belle leçon d'humanité pour mieux revenir sur nos jugements hâtifs envers le handicap psychique et notre définition de la folie, desquels le chamane a récemment été réhabilité.

     

  • Une enfance Nature

    l’école des bois,une pédagogie pour les jeunes enfants,caroline guy,into the woods,célestin freinet,maria montessori,rudolf steiner,céline alvarez,la bergerie urbaine,serge tisseron,février 2022Grandir et apprendre au grand air, nombre d’enfants, en classe et le regard tourné vers les fenêtres en ont rêvé à travers les générations. Est-ce l’élément déclencheur dans la démarche de Caroline Guy, l’auteure de L’école dans les bois. Une pédagogie pour les jeunes enfants publié aux éditions Massot ? Avant de créer Into the Woods, l’enseignante se destinait au tourisme et a tout quitté pour vivre dans la nature, devenir exploitante agricole puis faire de l’animation avec des enfants jusqu’à se lancer dans l’enseignement. Après plusieurs expériences dans l’Éducation Nationale ou auprès d’écoles alternatives, elle souhaite développer le lien entre les enfants et la Nature qui n’existe pas ou très peu en France et fonde son école dans les bois. « Pourquoi forcer des petits à être assis toute la journée alors que leur nature profonde et leur élan de vie sont constitués d’une soif intense de découvertes et d’expérimentation directe de leur environnement ? ».

    De nombreuses expériences existent en Europe (notamment au Nord), où jardins d’enfants et école dans les bois sont très répandus. Caroline Guy s’en inspire pour créer Into The woods, tout en approfondissant sa connaissance des besoins des jeunes enfants grâce aux pédagogues (Freinet, Montessori, Steiner). L’enseignante s’en détache toutefois en prenant en compte les évolutions de la société et l’unicité des groupes qu’elle accompagne. Elle attache beaucoup d’importance à l’expérimentation, ainsi si « l’on propose à un enfant une alimentation saine et du jeu libre en pleine nature ou une nourriture empoisonnée et des heures de tablette*, le petit va absorber et expérimenter ce qui lui est offert sans aucune possibilité de choisir ni de prendre du recul ». Un grand espace, l’absence de nuisances sonores, la simplicité (moins de paroles, moins d’activités), l’apprentissage du langage (éléments concrets, histoires) et un bel environnement : tous ces éléments sont essentiels pour Caroline Guy et la nature les comble.

    Privés de celle-ci, les enfants souffrent de problèmes physiques, psychiques ou spirituels. De plus, les jeunes se méfient de la Nature (froid, saleté, insectes) et protéger l’environnement devient très abstrait si on ne connaît que le béton. À l’inverse, les enfants apprenant dans les bois développent de grandes capacités : « calme, habileté, maîtrise du corps, créativité, imagination, espoir, motivation, concentration, sens artistique, empathie ». La nature peut être un immense terrain de jeu, d’exploration et d’invention où les enfants coopèrent naturellement avec un adulte bienveillant à proximité. Dans Into the woods, la différence entre école/travail et jeu/loisir est moins rigide. En effet, l’enfant apprend en jouant. Ainsi, dans une journée type auprès de Caroline Guy, le temps est découpé entre jeu libre (creuser la terre, faire une cabane), rassemblement (exercices de relaxation, comptines), activité dirigée (découvrir un nid d’oiseau, cueillette en forêt). Les activités changent en fonction des saisons et de l’environnement.

    L’ouvrage est dans la lignée de celui de Céline Alvarez, Les lois naturelles de l’enfant, qu’elle cite d’ailleurs. Évidemment, L’école dans les bois, aussi inspirante et nécessaire soit-elle n’est pas encore à la portée de tous les enfants. De même, seuls les parents les mieux « informés » et souvent « fortunés » se tournent vers ce type d’écoles alternatives. En attendant que l’Éducation Nationale s’y intéresse et que le nombre d’enfants confiés par enseignant diminue fortement, parions sur la volonté des professeurs de répondre aux besoin des petits et grands élèves. Ainsi, dans une école classique en ville, la création de potager, des plantations de fleurs, des rencontres avec des apiculteurs ou une sortie dans des jardins partagés, sur le marché, dans une bergerie urbaine (comme à Lyon : La Bergerie Urbaine) sont autant de possibilités à développer.

    * À propos des tablettes, on peut lire 3-6-9-12, Apprivoiser les écrans et grandir de Serge Tisseron qui donne des clés pour en encadrer l’usage.

    Image: Massot éditions

  • Dissiper les ombres

    Clara et les ombres, Andrea Fontana, Claudia Petrazzi, Bandes d’ados, Milan, Bayard, Stangers things, Harcèlement, épilepsie, février 2022Sacrées coupes de cheveux ! C’est la première vision qui nous frappe en découvrant la couverture de Clara et les ombres, bande dessinée écrite par Andrea Fontana et dessinée par Claudia Petrazzi dans la collection Bande d’Ados, à l’initiative des éditions Milan et Bayard. À ces « gouffes » s’ajoutent les bouilles carrées, rondes ou triangulaires des personnages principaux sans oublier leur dégaine singulière. Comme une envie de sympathiser tout de suite avec ces ados à la marge des années 80-90.

    Et puis, dès les premières planches, on fait connaissance avec le papa de Clara, dans le genre bûcheron canadien option gentil nounours. En vrai ils sont américains et le duo vient de déménager de New York au fin fond d’un bled paumé des États-Unis. La mère a quitté le navire et Clara souffre depuis l’enfance d’épilepsie. Ses crises sont représentées par des ombres qui s’emparent d’elle comme dans un cauchemar éveillé. Le récit, sombre, teinté de colère, va tendre au fil de l’album vers la lumière et une certaine rédemption.

    Clara, nouvelle au collège, y est victime de harcèlement, tandis que la ville de Brattleboro fait face à des disparitions inquiétantes. On explore le quotidien des habitants avec l’adolescente qui cherche ses repères et en vient à côtoyer une bande d’élèves touchants, aussi désarmants et désarmés qu’elle : les personnages de la couverture. Le dessin de Claudia Petrazzi dépeint l’univers inquiétant dans lequel évoluent ces jeunes gens, les angoisses de Clara mais aussi les moments colorés et joyeux où les ados sont réunis. Andrea Fontana retranscrit merveilleusement les affres de l’adolescence entre profond désespoir et énergie euphorisante soudaine. L’intrigue et l’atmosphère semblent un écho à la série Strangers things très suivie par les collégiens et lycéens. Certains personnages ont d’ailleurs quelques similitudes amusantes.

    Gageons que Clara et les ombres plaira aux jeunes. La thématique du harcèlement est traitée sous un angle plus proche de la réalité, moins manichéen, où chacun peut être harcelé puis harceleur ou l’inverse. Quant à une héroïne qui souffre d’épilepsie, c’est assez rare dans la galaxie « Bande dessinée » et mérite d’être salué. Une manière subtile de parler de handicap ou de différence sans en faire le sujet principal et en s’adressant à tous les (éternels) adolescents dès 11 ans.

    Image: Bayard édition