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Jeunesse - Page 8

  • Une enfance Nature

    l’école des bois,une pédagogie pour les jeunes enfants,caroline guy,into the woods,célestin freinet,maria montessori,rudolf steiner,céline alvarez,la bergerie urbaine,serge tisseron,février 2022Grandir et apprendre au grand air, nombre d’enfants, en classe et le regard tourné vers les fenêtres en ont rêvé à travers les générations. Est-ce l’élément déclencheur dans la démarche de Caroline Guy, l’auteure de L’école dans les bois. Une pédagogie pour les jeunes enfants publié aux éditions Massot ? Avant de créer Into the Woods, l’enseignante se destinait au tourisme et a tout quitté pour vivre dans la nature, devenir exploitante agricole puis faire de l’animation avec des enfants jusqu’à se lancer dans l’enseignement. Après plusieurs expériences dans l’Éducation Nationale ou auprès d’écoles alternatives, elle souhaite développer le lien entre les enfants et la Nature qui n’existe pas ou très peu en France et fonde son école dans les bois. « Pourquoi forcer des petits à être assis toute la journée alors que leur nature profonde et leur élan de vie sont constitués d’une soif intense de découvertes et d’expérimentation directe de leur environnement ? ».

    De nombreuses expériences existent en Europe (notamment au Nord), où jardins d’enfants et école dans les bois sont très répandus. Caroline Guy s’en inspire pour créer Into The woods, tout en approfondissant sa connaissance des besoins des jeunes enfants grâce aux pédagogues (Freinet, Montessori, Steiner). L’enseignante s’en détache toutefois en prenant en compte les évolutions de la société et l’unicité des groupes qu’elle accompagne. Elle attache beaucoup d’importance à l’expérimentation, ainsi si « l’on propose à un enfant une alimentation saine et du jeu libre en pleine nature ou une nourriture empoisonnée et des heures de tablette*, le petit va absorber et expérimenter ce qui lui est offert sans aucune possibilité de choisir ni de prendre du recul ». Un grand espace, l’absence de nuisances sonores, la simplicité (moins de paroles, moins d’activités), l’apprentissage du langage (éléments concrets, histoires) et un bel environnement : tous ces éléments sont essentiels pour Caroline Guy et la nature les comble.

    Privés de celle-ci, les enfants souffrent de problèmes physiques, psychiques ou spirituels. De plus, les jeunes se méfient de la Nature (froid, saleté, insectes) et protéger l’environnement devient très abstrait si on ne connaît que le béton. À l’inverse, les enfants apprenant dans les bois développent de grandes capacités : « calme, habileté, maîtrise du corps, créativité, imagination, espoir, motivation, concentration, sens artistique, empathie ». La nature peut être un immense terrain de jeu, d’exploration et d’invention où les enfants coopèrent naturellement avec un adulte bienveillant à proximité. Dans Into the woods, la différence entre école/travail et jeu/loisir est moins rigide. En effet, l’enfant apprend en jouant. Ainsi, dans une journée type auprès de Caroline Guy, le temps est découpé entre jeu libre (creuser la terre, faire une cabane), rassemblement (exercices de relaxation, comptines), activité dirigée (découvrir un nid d’oiseau, cueillette en forêt). Les activités changent en fonction des saisons et de l’environnement.

    L’ouvrage est dans la lignée de celui de Céline Alvarez, Les lois naturelles de l’enfant, qu’elle cite d’ailleurs. Évidemment, L’école dans les bois, aussi inspirante et nécessaire soit-elle n’est pas encore à la portée de tous les enfants. De même, seuls les parents les mieux « informés » et souvent « fortunés » se tournent vers ce type d’écoles alternatives. En attendant que l’Éducation Nationale s’y intéresse et que le nombre d’enfants confiés par enseignant diminue fortement, parions sur la volonté des professeurs de répondre aux besoin des petits et grands élèves. Ainsi, dans une école classique en ville, la création de potager, des plantations de fleurs, des rencontres avec des apiculteurs ou une sortie dans des jardins partagés, sur le marché, dans une bergerie urbaine (comme à Lyon : La Bergerie Urbaine) sont autant de possibilités à développer.

    * À propos des tablettes, on peut lire 3-6-9-12, Apprivoiser les écrans et grandir de Serge Tisseron qui donne des clés pour en encadrer l’usage.

    Image: Massot éditions

  • Dissiper les ombres

    Clara et les ombres, Andrea Fontana, Claudia Petrazzi, Bandes d’ados, Milan, Bayard, Stangers things, Harcèlement, épilepsie, février 2022Sacrées coupes de cheveux ! C’est la première vision qui nous frappe en découvrant la couverture de Clara et les ombres, bande dessinée écrite par Andrea Fontana et dessinée par Claudia Petrazzi dans la collection Bande d’Ados, à l’initiative des éditions Milan et Bayard. À ces « gouffes » s’ajoutent les bouilles carrées, rondes ou triangulaires des personnages principaux sans oublier leur dégaine singulière. Comme une envie de sympathiser tout de suite avec ces ados à la marge des années 80-90.

    Et puis, dès les premières planches, on fait connaissance avec le papa de Clara, dans le genre bûcheron canadien option gentil nounours. En vrai ils sont américains et le duo vient de déménager de New York au fin fond d’un bled paumé des États-Unis. La mère a quitté le navire et Clara souffre depuis l’enfance d’épilepsie. Ses crises sont représentées par des ombres qui s’emparent d’elle comme dans un cauchemar éveillé. Le récit, sombre, teinté de colère, va tendre au fil de l’album vers la lumière et une certaine rédemption.

    Clara, nouvelle au collège, y est victime de harcèlement, tandis que la ville de Brattleboro fait face à des disparitions inquiétantes. On explore le quotidien des habitants avec l’adolescente qui cherche ses repères et en vient à côtoyer une bande d’élèves touchants, aussi désarmants et désarmés qu’elle : les personnages de la couverture. Le dessin de Claudia Petrazzi dépeint l’univers inquiétant dans lequel évoluent ces jeunes gens, les angoisses de Clara mais aussi les moments colorés et joyeux où les ados sont réunis. Andrea Fontana retranscrit merveilleusement les affres de l’adolescence entre profond désespoir et énergie euphorisante soudaine. L’intrigue et l’atmosphère semblent un écho à la série Strangers things très suivie par les collégiens et lycéens. Certains personnages ont d’ailleurs quelques similitudes amusantes.

    Gageons que Clara et les ombres plaira aux jeunes. La thématique du harcèlement est traitée sous un angle plus proche de la réalité, moins manichéen, où chacun peut être harcelé puis harceleur ou l’inverse. Quant à une héroïne qui souffre d’épilepsie, c’est assez rare dans la galaxie « Bande dessinée » et mérite d’être salué. Une manière subtile de parler de handicap ou de différence sans en faire le sujet principal et en s’adressant à tous les (éternels) adolescents dès 11 ans.

    Image: Bayard édition

  • Héros bilingues

    Dix minutes pour devenir a hero, Jean-Christophe Tixier, Tip Tongue , éditions Syros, Dix minutes, Souris Noire, Malte, apprendre l’anglais, séjour linguistique, migrants, février 2022« - Here is all you need for your stay in Malta. Aussitôt, je repense à une chanson des Beatles que mon père écoute en boucle à la maison. All you need is love »

    Découvrir Malte, petite île au Sud de la Sicile en suivant Tim, héros de la série « Dix minutes » (Collection Souris Noire) de Jean-Christophe Tixier, c’est sympa ! Vivre ses aventures en immersion c’est encore mieux ! Comme le personnage francophone, le lecteur est plongé petit à petit dans le bain anglophone. Dix minutes pour devenir a hero, aux éditions Syros permet de se familiariser avec des mots anglais simples puis des phrases et enfin des dialogues sans se sentir perdu. L’avantage de la collection Tip Tongue, c’est d’être vite absorbé par l’histoire sans avoir l’impression de lire une langue étrangère. Les ados se surprennent à lire à haute voix les passages plus délicats et ainsi s’entraînent à parler. D’ailleurs, la version audio est également disponible sur Internet.

    « Très vite, ils se détournent de moi et reprennent leurs échanges dont je ne capte que quelques mots : beach, boat, volley-ball. »

    Jean-Christophe Tixier profite de ce séjour à Malte pour décrire la ville et son histoire mais aussi une plus triste réalité contemporaine. En effet, de jeunes migrants qui tentent de rejoindre l’Europe en quête d’une vie meilleure passent par l’île. Tim et Lukas, son correspondant local, vont être confrontés malgré eux, au drame vécu par Okor, un adolescent de leur âge qui tente d’échapper aux passeurs. Tandis que Tim voyage pour apprendre l’anglais, le jeune ghanéen fuit son pays pour survivre et aider sa famille. Que vont décider les jeunes européens en découvrant l’histoire d’Okor ? Comment réagiront les adultes qui accueillent Tim ? Qui sont les héros de ce roman ?

    «Je me demande si nous avons bien fait de venir ici.  - I just want to help him. Do you know him ? Do you know where I can find him ? »

    Dix minutes pour devenir a hero, s’adresse aux lecteurs à partir de 10 ans, niveau « Je découvre l’anglais », A1 découverte (CM2 et 6e). Les autres titres de la collection Tip Tongue proposent également les niveaux A1 Introductif (primaire) A2 (collège) et B1 (lycée) en version espagnole et allemande. Parmi les auteurs, citons Stéphanie Benson, la plus prolifique, Hervé Jubert ou encore Isabelle Collombat. Comme ici à Malte, chaque roman nous embarque dans une ville d’Europe, pour un beau voyage littéraire et linguistique. Il ne manque plus que l’italien. À bon entendeur !

    Image: édition Syros

  • Les bourrins de la Terre

    Les Bourrinologues,  Bande d’Ados, éditions Milan, Lucie Castel, Nicole Augereau, Grégory Jarry, Géo Ado, pollution, collapsologie, stage de 3ème, janvier 2022« L’époque dans laquelle nous vivons est extraordinaire ! », « On assiste à la destruction de l’ensemble du vivant », « Et c’est à l’humanité qu’on le doit ! C’est pas génial ? »

    Lasse de dénoncer les scandales écologiques, la pollution, l’inaction humaine ? Lucie Castel, Nicole Augereau et Grégory Jarry prennent le contre-pied avec Les Bourrinologues dans la nouvelle collection Bande d’Ados aux éditions Milan et Bayard. Les épisodes ont d’abord été publiés dans le magazine Géo Ado. Dans chaque mission, il est en effet question de se rendre quelque part sur la planète pour montrer le triomphe de l’humain sur la nature ou plutôt des grandes entreprises ou États sur le reste des êtres vivants, homo-sapiens compris. En s’appelant Donald, on pourrait applaudir face aux bulldozers et autres machines infernales inventés par des êtres fascinants d’ingéniosité et de rapacité (quoi qu’un rapace ne tue que ce qu’il mange).

    Les auteurs se mettent en scène dans la bande dessinée sous les noms de Grégory Bour, Nickye Rino et Lucie Logue. Ces trois Bourrinologues reporters se délectent de la suprématie humaine qui va d’ailleurs souvent de paire avec une certaine « supériorité occidentale » ou du « monde moderne » sur le reste des populations de notre planète. C’est à la fois cynique, effrayant et drôle. Les stagiaires de 3ème, qui changent à chaque nouvel épisode apportent réconfort et espoir puisque la plupart sont scandalisés par les découvertes à l’opposé de la fierté de la rédac’ de la Bourrinologie (« l’étude de l’effondrement du vivant »). Malheureusement, ils ne s’en sortent pas toujours mais c’est le prix à payer pour comprendre l’envers du décor !

    Indignez-vous disait Stéphane Hessel, il y a de quoi avec l’étendue des actions humaines plus néfastes les unes que les autres : assèchement des mers pour implanter une agriculture intensive, enfouissement des plastiques et rejets de produits polluants dans l’océan, destruction des forêts tropicales et des peuples qui y vivent sans parler de la place d’internet qui fonctionne avec l’équivalent de 200 réacteurs nucléaires (enfin pour l’instant). Visiblement, l’indignation ne suffit pas, les bourrinologues sont donc passés mettre dans l’art de célébrer : « les déchets, l’avenir de la planète », « place à une belle forêt de palmiers à huile bien rangés », «les bateaux-usines prennent à eux seuls 50 % de la pèche mondiale, un bel exploit ».

    Avec Les Bourrinologues, les rencontres sont toujours instructives comme avec Léonid Brejnev, dirigeant de l’URSS dans les années 60, Larry Page, cofondateur de Google ou Taib Mahmoud, premier ministre de la Malaisie. De plus, les auteurs mélangent traits de crayons et photos qui permettent de voir les conséquences de l’activité humaine de plus près, du septième continent de plastique aux immenses champs produits en plein désert en passant par les régions où l’on extrait des terres rares. Une bande dessinée édifiante et indispensable à tous les futurs stagiaires de 3èmes !

    « Pour faire un stage de 3e vachement plus fun que dans le cabinet comptable de votre mère, contactez-nous ! »

    Image:  éditions Milan

  • Ultime Guerre(ière)

    Bergères guerrières, L’abîme, Jonathan Garnier, Amélie Fléchais, éditions Glénat, épopée féministe,  janvier 2022«- Mais bien sûr qu’il fallait ! On ne rigole pas avec l’hospitalité, ici. Si vous avez encore faim, venez me voir ! - Ils sont chic dans ce village. - Peuh ! »

    Molly et Liam arrivent enfin au bout de leur voyage dans l’ultime épisode (n°4) des Bergères Guerrières : L’abîme de Jonathan Garnier et Amélie Fléchais aux éditions Glénat. Il est temps pour eux et les habitants du village qui les accompagnent de trouver des réponses à leurs questions, de découvrir les détails de cette guerre qui a ravagé la nature, les villes et les hommes. Cette quête s’achève sur les Terres Mortes à la rencontre de personnages plus complexes qui enrichissent et éclairent le récit. Le mal qui les rongent n’est en effet jamais loin.

    « Tu veux que Sarah se retrouve enfermée dans une cage pendant qu’on va en Terres Mortes ? On n’en parle à personne, c’est plus sûr. »

    Ce dernier tome est d’ailleurs globalement plus sombre que les précédents et l’insouciance des enfants au début de la série a laissé place à la rudesse de leur tâche et l’amertume devant les erreurs et dégâts causés par les humains, les bêtes, la maladie. Les couleurs semblent également plus sombres, pourtant rougeoyantes et toujours aussi sublimes. De même, les personnages de Bergères Guerrières sont à croquer. Pourtant, la bande dessinée fait écho aux ravages causés par la folie humaine sur la planète. Une manière d’éveiller les consciences des enfants lecteurs et lectrices devenus, au fil des épisodes, des adolescents.

    « Pourquoi il a fallu qu’ils jouent avec la nature ? Et pourquoi c’est à moi de devoir arrêter le fléau qu’ils ont créé ? »

    Un album qui réconcilie aussi les générations puisqu’on y retrouve l’importance de la transmission mais aussi les doutes ou les incompréhensions qui se lèvent à l’aune des révélations et du temps qui passe. Les valeurs de l’accueil, de l’engagement, de sa place dans la société mais aussi le lieu où on est né, où l’on a grandit et où l’on veut vivre, sont abordés en filigrane du récit d’aventure. Nous sommes tristes de quitter Molly, Liam, Sarah et tous les autres mais rassérénés et fiers du parcours des fameuses Bergères Guerrières !

    Image: Glénat éditions

  • Les galères de Molière

    Il faut sauver Molière, Nathalie Somers, Didier Jeunesse, Jean-Baptiste Poquelin, Armande Béjart, Lully, La Fontaine, Louis XIV, Le malade imaginaire, troupe de théâtre, janvier 2022« De toute façon, la famille passait la plus grande partie de son temps au théâtre, car les répétitions du Malade imaginaire se tenaient au quotidien ».

    Molière aurait eu 400 ans cette année ; l’occasion de redécouvrir ses pièces, les jouer, les monter ou les admirer. C’est le moment aussi d’en savoir un peu plus sur sa personnalité, au-delà de son statut de comédien, chef de troupe, auteur de pièce ou metteur en scène et de le faire découvrir aux plus jeunes. Il faut sauver Molière de Nathalie Somers aux éditions Didier Jeunesse, nous entraîne dans les coulisses de la vie d’artiste de Jean-Baptiste Poquelin, son nom de naissance. On suit Pierrot, le héros de l’histoire et Mado, la propre fille de Molière qui tentent de le sortir des griffes de ses ennemis.

    « Pierre ne connaissait pas cette pièce de Molière, mais il savait très bien que l’auteur faisait preuve d’une ironie sans pitié envers les gens qu’il jugeait suffisants, pédants ou malhonnêtes».

    Embauché comme homme à tout faire : assistant costume, accessoiriste, balayeur, confident ; Pierre plonge dans l’univers d’une vie de troupe. Sauf que celle-ci est une des plus célèbres puisque Molière écrit des pièces pour le roi Louis XIV, tout en ayant la charge de tapissier (transmise par son père). La célébrité et la reconnaissance du monarque n’a pas que des avantages, les jaloux sont nombreux. Grâce aux connaissances et la débrouillardise de Mado et la persévérance de Pierre, les jeunes gens vont peut-être tirer d’affaire l’auteur du Bourgeois gentilhomme du mauvais pas dans lequel il s’est fourré.

    « Lully lâcha : - Nous ne seront jamais prêts à temps ! C’est maintenant une certitude ! Les ballets sont en retard, les décors sont en retard, même mes musiciens sont en retard ! ».

    Quel plaisir de revivre l’époque de Molière, de suivre l’avancée de sa dernière création : Le malade imaginaire, de croiser ses contemporains Armande Béjart (sa femme et grande comédienne), Jean-Baptiste Lully, Jean de La Fontaine, de visiter Versailles et rencontrer le Roi-Soleil lui-même. Le roman s’inspire d’épisodes véridiques de la vie du comédien et Nathalie Somers montre à quel point les intrigues étaient nombreuses à la cours. L’histoire permet également de comprendre comment sont nés les personnages de ses pièces et où Jean-Baptiste Poquelin puisait son inspiration. Déjà à l’époque les répliques de ses pièces étaient cultes. Elles le sont toujours 400 ans après et les jeunes générations peuvent s’en emparer avec ce roman (à partir de 8 ans).

    Image: Didier Jeunesse

  • Les racines d’Anna-Meï

    Comme un oiseau dans les nuages, Syros, Sandrine Kao, roman ado, Chine, Taïwan, dépression, généalogie, piano, janvier 2022« Grâce à toi, j’avais filé mon enfance sur fond bleu tendre, la coloration des beaux jours, et racé un chemin cotonneux et agréable comme un nuage. »

    Anxi, Jingjian, Quanzhou en Chine ou Sandimen, Tainan, Kaohsiung sur l’île de Taïwan, autant de lieux qui ne disent pas grand-chose au lecteur ni à Anna-Mei, l’héroïne de Comme un oiseau dans les nuages, écrit par Sandrine Kao aux éditions Syros. Ces endroits lointains font pourtant partie prenante des origines de l’adolescente. Peut-être même peuvent-ils expliquer les raisons de son profond mal-être. Pourquoi sa fidèle grand-mère Yifei, qu’elle appelle Ama, ne lui a jamais vraiment parlé de sa jeunesse, de sa famille et de ses ancêtres asiatiques ? Anna-Mei, qui se rêve pianiste mais échoue lamentablement à un grand concours va devoir creuser cette piste pour se découvrir elle-même.

    « Éliminer le Feu et le Tan, réguler le Qi, débloquer le Foie, apaiser l’Esprit, rééquilibrer le Yin et le Yang … Bon tout ça d’accord. Le Feu, le Qi, je savais à peu près à quoi ça correspondait »

    Le roman ado est un dialogue entre petite-fille et grand-mère, narratrices du récit chacune leur tour. On suit leurs parcours, celui des générations précédentes et la petite histoire croise la grande histoire de la Chine et de Taïwan. Les destinées des différents membres de cette famille sont à la fois tragiques et romantiques. La vie semble se jouer d’eux et pourtant une aura lumineuse transparaît à travers leurs épreuves. Chaque génération semble transmettre un lien d’espoir à la génération suivante. Anna-Mei semble contenir à elle seule les tragédies, les doutes et la lumière de ses ancêtres, et notamment la lignée des femmes. Tout cela est dur à porter pour une jeune fille de seize ans, perdue dans les tracas, tous aussi difficiles de l’adolescence. L’aspirante pianiste va petit à petit percevoir ses origines d’un œil neuf, et non plus seulement à travers le regard de ses camarades français. En effet le récit se déroule au début de la pandémie et les personnes ayant des traits asiatiques sont vus comme des porteurs potentiels du Covid 19 et sont dénigrés.

    « Ça me fait penser à une Cendrillon inversée : l’héroïne, Zhou, serait la mal-chaussée qui n’arrive pas à rentrer son pied dans de si petits souliers, […] »

    Comme un oiseau dans les nuages nous emmène sur les routes chinoises puis taïwanaises à travers différents régimes et croyances. Ama, née dans l’Empire du milieu, ayant grandi sur l’île de Taipei, est un pont entre les cultures, les années et les façons de voir les maladies. Le récit est plutôt âpre et n’épargne pas le lecteur mais il garde la douceur que laisse présager son titre. C’est aussi un hymne à la liberté de mener sa vie comme on l’entend, surtout en tant que femme. Par ailleurs, Sandrine Kao sait ménager le suspens à chaque chapitre. À la fin de l’histoire, l’envie d’en savoir plus sur ces deux pays asiatiques mais aussi sur notre propre arbre généalogique nous taraude. À partir de 14 ans.

    Image: Édition Syros