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hara

  • Immobile est le Donne

    Devenir indéracinable est paradoxalement le meilleur moyen d'aller vite par la suite (p.17)

     

    s'ancrer.jpgLa collection "petite bibliothèque" de Mama éditions permet à un.e auteur.e de déployer son univers sur un format court : entretien, vision ou essai ici avec S'ancrer pour se déployer de Marie-Pierre Dillenseger.
    Influencée tôt par la culture chinoise (médecine, philosophie, art de vivre) et vivant aux États-Unis, elle compose un texte philosophico-littéraire original (style et fond) autour de l'ancrage et de son salutaire rappel au quotidien. Savoir dire non, prendre son temps, poser, méditer, se cristalliser intérieurement...autant d'attitudes ou de comportements peu valorisés dans un Occident où le rythme effréné impose performance et rapidité d'exécution.
    Mahomet aurait déclaré (dans un hadith) devoir rechercher la science jusqu'en Chine s'il le fallait, sans doute pour rester dans l'ouverture et l'écoute d'autres traditions afin de trouver le trésor permanent en soi ?
    Tel l'arbre fort de ses racines et élancé vers le haut, l'homme relié et capable de se recentrer (après avoir trouvé cette source immuable) traverse chaque épreuve en s'adaptant au mieux aux exigences de l'époque.
    Envisagé dans un esprit pratique et nourri d'exemples concrets ou de maximes façon Yi-King, S'ancrer pour se déployer est un ouvrage résolument permissif qui rend libre d'explorer des zones parfois trop policées.

     

  • Faire des deux l'un

    "Le mental sait mais ne voit pas" (A.Desjardins - p.97)

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    Un chemin spirituel réaliste est toujours un processus de désencombrement, de découvrement" (Eric Edelmann - p.180)

    edelmann.jpgC'est une véritable nourriture êtrique, légère et digeste, que nous propose le prolixe
    Éric Edelmann dans son nouvel opus "La splendeur du vrai", paru aux éditions du Relié.
    Partant du principe et fait qu'une des caractéristiques de l'humain c'est son cortège incessant de pensées-émotions mécaniques et souvent négatives, "
    la splendeur du vrai" relate au contraire de la soumission à l'instant, d'une perspective d'accès au réel qui ne soit pas niée ou voilée par cette "pollution suffocante", et c'est le privilège de cette voie spirituelle initiée par Swami Prajnanpad (1891-1974).

    En domptant le mental, la souffrance s'atténue, remplacée par l'amour et la joie puisque tout est unique et changeant. Autrement dit, à hauteur de sage, l'harmonie divine règne et seule la communion (le “oui à ce qui est”) s'installe.
    L'ouvrage sublime et souligne des paroles clés ou jalons d'
    Arnaud Desjardins (1925-2011), en les enchaînant sur un parcours circulaire (tout l'enseignement de l'Adhyatma yoga est lié) et progressif, dans un style limpide avec grande clarté d'esprit, sans confusion ni ratiocination.
    L'auteur met en pratique l'adage de l'être sur le chemin de la réalisation , qui ne vit plus séparé mais au service d'autrui, soucieux de reconnaître la tradition sous-jacente à son mûrissement (la communion des sages, leurs anecdotes et paroles), avec une ouverture à l'ésotérisme Gurdjievien et à la mystique religieuse (Etty Hillesum).
    Les adeptes du Hara (les ventripotents) qu'une pratique assidue renforce, connaissent l'être en soi, un centre autre que l'ego (un vrai centre pourrait on dire puisque cristallisé et non fictif) et sont plus portés à l'empathie qu'au repli sur soi. “Ressentir”, “se désidentifier” deviennent alors des habitudes de fonctionnement qui aboutissent au lâcher prise égotique. Plutôt que “regarder” il s'agit de “voir”, la perception du cœur vigile, qui constitue un chemin de plus grande liberté.

    "
    Ainsi tout peut se résumer à une question de raffinement de l'énergie et à sa réorientation. Il ne s'agit plus là simplement d'un processus de changement mais plutôt de transformation … au sens dépassement de la forme, de méta-morphose" (p 223)

    La méditation est un des outils à la disposition du chercheur de vérité dans ce travail de purification des nœuds du cœur derrière lesquels se tapit le "rien", qui est plénitude ou silence, non-séparation et essence même de l’éveillé à sa vraie nature.
    Par ce processus alchimique se découvre la fine pointe de l'âme et ses énergies subtiles, la naissance et la consolidation d'un corps lumineux à l'image de Dieu, qui saura vraiment communier et rejoindra in fine la Source.
    La voie spirituelle de l'Adhyatma yoga propose "
    d'élargir l'ego pour le rendre plus ouvert et spacieux" , là où la pratique religieuse souhaite le réduire à néant (“Il faut qu'il croisse et que je diminue”, le “fana” des musulmans...). La foi permet ce saut quantique puisqu'elle se situe au-delà du mental (Jésus calmait les tempêtes mentales comme la récitation du dikhr en Islam par exemple). Malgré tout ce qui les oppose, “se pardonner” et “s'aimer” restent des socles communs à ces deux chemins, grâce au gourou ou guide intérieur pour l'un et à la miséricorde divine pour l'autre.
    Peut-être le futur fusionnera ces deux approches à priori antagonistes, en faisant cohabiter un moi qui s'oublie et se donne pour que Christ soit (Lui qui est conscience et discernement).
    Outre ce petit complément, pour ceux qui ne suivraient pas cet enseignement traditionnel, “La splendeur du Vrai – voir avec le cœur dans un monde d'illusions” reste un livre passionnant , prenant, généreux et de bonne compagnie.

     

  • Le numineux langage de l'âme

    "Comprendre que la Bible et tout le corpus dogmatique sont écrits dans un langage symbolique, témoignant d'expériences intérieures compréhensibles en termes psychologiques, peut conduire à un renouveau de la vie religieuse".(p.24)

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    Pour Jung, le christianisme est un aboutissement, un mûrissement d'intuitions religieuses très anciennes, datant d'époques très reculées, inscrites au plus profond de notre inconscient collectif et toujours vivantes en nous".(p.63)



    Jung-et-le-christianisme.jpgJean-François Alizon signe avec "Jung et le christianisme - un regard nouveau", paru chez Empreinte éditions, un ouvrage sérieux, profond et synthétique sur l'apport de C.G Jung à la religion chrétienne, notamment par sa lecture symbolique, reflet de l'âme, dont il était un clinicien hors pair (Il restaure ainsi la trilogie corps-âme-esprit).
    Lus, médités et mis en pratique depuis plus de trente ans, les écrits du célèbre psychanalyste ont trouvé un écho favorable chez ce protestant formé à la théologie (Il fut néanmoins professeur de flûte traversière) avec pour élément déclencheur de sa "
    religion intérieure", un Christ pouvant été assimilé au "Soi" jungien, à la foi centre physique et psychique de l'homme équilibré (d'aucuns évoqueront le fameux Hara oriental ou centre de l'être selon la terminologie de Graf Durkheim) et socle commun à toute l'humanité dans sa fonction de complétude ou de réunion des opposés (on pense aussi au Tao ou à la nature androgyne de la psyché).

    "Le Soi connaît notre destinée profonde et le sens de notre existence sur la terre. il nous appelle à réaliser notre essence véritable dans une démarche laborieuse, patiente et obstinée, qui avec le temps finit par aboutir...et restaurer un sens" (p.179).

    Pour l'auteur, la capacité d'aimer est notre vraie nature, le lien avec notre âme consolidé.
    Le livre est assez complet, érudit et peut sûrement servir de référent sur le sujet par la maîtrise et la clarté rationalisante qui s'en dégage. On retrouve les concepts phares de Jung (archétypes ou énergies latentes, anima, Soi...) appliqués à l'épopée christique et cette lecture moderne de la psychologie analytique, toute intériorisée, proche du courant soufi ou de la kabbale, semble coller à la réalité des images (rêves, œuvres culturelles, symboles) remontant des profondeurs de l'âme humaine.
    Cet "ésotérisme" quasi scientifique (car expérimental) sied plus aux natures introvertis de prime-abord qu'aux adeptes des rites, dogmes et communautés de croyances mais la foi fait force dans les deux cas grâce notamment à l'eucharistie qui cristallise aussi le Christ en chacun de ses adeptes.
    Autre éclairage intéressant, le retour du féminin refoulé en plusieurs étapes, d'abord projeté sur autrui (l'anima ou archétype féminin de perfection) puis réintégré lors d'une re-naissance spirituelle matricielle, que Jung associe à la naissance en souffle et esprit, celle de l'homme nouveau.
    Enfin, parmi les nombreuses richesses dont regorge ce livre (un dossier complet et complémentaire y est aussi consacré sur le site de l'éditeur), la redéfinition du péché comme rupture avec la totalité de notre être ou Soi. Tiraillé dans ses profondeurs depuis la sortie de l'Eden intra-utérin, l'homme n'a d'autre choix que l'équilibre de ses paradoxes en saisissant la voix, parfois imagée, de l'harmonie (des contraires) par l'attitude juste ou appropriée à chaque étape de sa vie.