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Spiritualité - Page 34

  • Du silence éclot le Verbe

    "Pendant ce temps les justes abandonnés dans le désert tiennent ferme, malgré leur propre désarroi et leurs heures d'agonie dans la nuit du néant...leur souci premier reste en permanence d'aider ce Dieu démuni, de consoler ce Dieu répudié, de lui trouver de nouveaux abris : l'innombrable cœur humain. Car celles et ceux qui se tiennent à genoux au profond de leur être dépouillé à l'unisson de Dieu, sentent bien que ce Dieu souffre d'être rejeté par tant de ses enfants fugueurs, rebelles, voleurs et fratricides"...(p.101)


    9782226454324-j(1).jpgAlbin Michel réédite dans sa collection poche "espaces libres" un court essai de Sylvie Germain initialement paru en 2006 : les échos du silence.
    L'autrice sonde le silence de Dieu, plus particulièrement dans ces décennies passées, sur le théâtre du monde et en soi.
    Elle convoque aussi la Bible, Job bien évidemment, Élie et Jésus mais aussi plus proche de nous la poésie littéraire avec les personnages de Shakespeare, le moins connu Paul Célan, ou encore les mystiques Thérèse de Lisieux et Etty Hillesum.
    Sa réflexion-méditation suit une logique de renoncement-effacement du Créateur. D'abord le "tsimtsoum" ou retrait de Dieu de Sa création pour en couronner ses créatures et en faire des êtres libres et autonomes. Puis l'impuissance de ce dieu "désarmé" presque mendiant une place dans les cœurs où sa présence n'est plus, qu'il est louable d'aider avant qu'Il ne s'oublie soi-même.
    Sylvie Germain scrute les signes laissés ça ou là par écrits, tente une synthèse  pour mieux déjouer un silence que l'on sent en elle pesant, lourd de questionnements sur la qualité d'amour que l'on est susceptible de LUI donner, sans souvent ne rien attendre en retour.
    "Les échos du silence" c'est un verbe qui se cherche, qui se fait poétique parfois, léché et érudit, en quête de beauté esthétique. Une écriture qui ne manque pas de souffle et de vérité mais qui ne trouve pas de réponse en soi, qui n'étanche pas notre soif de co-naissance. La relation (à dieu) ne semble pas s'être véritablement nouée sans quoi des trésors de paroles seraient entendues et retranscrites de facto pour clamer qu'à jamais le verbe se fait chair ici-bas et que le silence n'est d'or que pour les nantis de preuve, afin de garder le mystère éclairant intact.
    Un livre personnel, intime, qui laisse transparaître une souffrance ou incompréhension sourde à travers ses lignes, celle-là même qui peut confiner à l'universel pour tous ceux qui doutent de l'existence en soi du Vivant, Source inépuisable de réconfort.

     

  • Oeil d'ange, coeur léger

    "C'est qu'à la différence du devin, le pro-phète "parle devant", il devance, il précède. C'est un lecteur et un déchiffreur d'aujourd'hui. Il n'est pas hors du temps mais très enraciné au contraire, imprégné par la culture et la sensibilité de ses contemporains. Et c'est là son originalité. Pleinement présent à son époque, il la pénètre avec une telle intensité qu'il en fait surgir une vérité qui la dépasse et souvent la dérange". (p.15)


    9782226462329-j.jpgVa où ton cœur te mène est une livre de et sur la transmission. C'est aussi un manifeste de la prophétie d'hier à aujourd'hui, au sens d'"éveilleur de souffle".
    Gabriel Ringlet évoque en des pages d'amour sublimé, la relation particulière qu'il a noué avec son filleul Élie, notamment pendant l'épisode covid. Émerveillement, contact avec l'Enfant intérieur (le puer aeternitus des alchimistes), caractère précieux de l'instant ou encore conscience accrue des paysages et de la beauté des éléments
    Ce livre, paru chez Albin Michel est une sorte de cadeau-testament qu'il lui lègue, profitant de l'occasion pour ressusciter la figure du prophète Élie dans son contexte hiéro-historique. Il nous parle de ses miracles, de ses rencontres avec un Dieu changeant, de transmission aussi d'avec le jeune Élisée par le truchement d'un manteau magique.
    Il relate également de sa recension dans les évangiles ou le Coran et de la symbolique hébraïque de son nom.

    Au-delà du prophète c'est aussi sa fonction qu'il interroge en convoquant ses nombreux amis poètes ou écrivains contemporains (André Chouraqui, Jean Grosjean, Sylvie Germain, Christian Bobin...), le fameux souffle inspiré accessible à tous, qui définit aussi Le Dieu polymorphe de la Bible : “la voix subtile du silence, le bruit d'une brise légère...”
    Gabriel Ringlet opère également une digression sur Qohélet et Syméon, deux autres figures testamentaires en lien avec la jeunesse et le sacré (Il tint le petit Jésus blotti dans ses mains) pour mieux célébrer le miracle de la vie et de cette génération lumineuse qui ensemence le monde pour un possible renouveau. L'apex de l'histoire biblique, la naissance du Messie et l'évocation de l'ange accompagnateur sont un prétexte allégorique pour définir l'espoir qu'il porte dans ce petit être encore chétif et qu'il espère farouchement libre d'aimer pleinement en déraison en grandissant.
    Cet essai touche et fait mouche. Tout est montré sous un jour neuf, mis à niveau dans un souffle poétique et énamouré. Le Verbe porte fruits et le germe éclot renouvelé.

    Élie, un si petit nom pour un si grand destin...quand tu grandiras, ne te crois pas obligé d'habiter cette désignation prophétique et d'embarquer partout son étymologie...J'espère que tu te sentiras libre, vraiment, y compris libre de Dieu.(p.132)

     

  • Un coeur ouvert à l'amour

    Je ne suis pas fort en méditation, mais j'ai réalisé à quel point la pratique était importante, Cela n'empêche pas que j'aime aussi regarder le sport, faire du basket et regarder des dessins animés. J'adore la malbouffe et parfois j'aime les blagues salaces. Je suis en amour avec la vie”. (p.147)


    jay 1.jpgJarvis Jay Masters est dans le couloir de la mort à San Quentin aux U.S.A depuis plus de trente ans pour le meurtre prémédité d'un maton qu'il nie. 4% des détenus du couloir sont innocents. En fait-il partie ? Notre rôle n'est pas de juger et son karma ou ses fautes passées (première condamnation en 81 pour braquage, alors âgé de 19 ans) ne regardent que lui.
    L'intérêt de son livre traduit en français pour le courrier du livre, "
    Méditations d'un condamné" vaut pour son écriture pleine d'humanité et de compassion pour ses codétenus, souvent victimes d'une enfance violente, et qui ne peuvent ou n'ont pas les outils pour apaiser leur cœur ou leur mental emplis de colère, de rancune ou de rage.
    Jarvis Jay Masters a entrepris une petite révolution intérieure à partir de sa cellule : pratiquer la méditation bouddhiste tibétaine enseignée par ses maîtres et amis Chagdud Tulku Rinpoché (1930-2002) et Pema Chödrön, qui postfacent et préfacent ce livre.
    Cette ascèse quasi quotidienne lui a permis d'épurer ses émotions et mémoires douloureuses et de mieux accueillir la souffrance, en soi et chez autrui, quand elle survient.
    Devenu un homme respecté dans sa prison d'état, personnage public par son combat pour être innocenté (freejarvis.org) et ses écrits étudiés à l'école, il est un parfait exemple de libéré vivant ou en voie de l'être (si le temps ou Dieu le permet), retrouvant "
    la nature pure de l'esprit" dans l'ici et maintenant, en communion avec ses frères méditants.
    Ses anecdotes de vie en prison sont pétries d'humour et d'amour pour le prochain, lucides quant au mal qui ronge les êtres ou les institutions, miséricordieuses quand il s'agit d'essayer de se voir sans concessions.
    Il s'agit aussi d'un témoignage sur les conditions de vie dans un centre pénitentiaire rude abritant souvent des détenus à perpétuité, leurs codes et règles de survie, leurs fragilités, les touches d'espoir mais aussi quelques perles de sagesse.jay 2.jpg
    Au-delà de toute étiquette, l'auteur reste un écrivain doué pour l'écriture (réalisme, talent de conteur, épure du style), libérée ici de son pesant pour ne garder que la légèreté des êtres.
    Méditations d'un condamné” reste un ensemble de textes poignants, une façon de survivre pacifié dans un monde ultra violent et une belle leçon d'humilité.


    “Le temps doit toujours être apprécié, à chaque moment de nos vies, comme si c'était le dernier instant. Quand nous sommes capables de faire cela véritablement - être constamment dans le présent et voir ce moment dans tout ce que nous sommes, sans avoir le temps d'abriter de la haine, de garder de l'amertume dans nos cœurs, ou d'apporter de la souffrance ou de la douleur aux autres - chaque instant de nos vies peut être apprécié totalement, maintenant, et non demain. Parce que notre existence demain n'est pas assurée”. (p.169)

     

  • L'effi(s)cience psychanalytique

    "Comme c'est quelqu'un d'intelligent (W.Pauli), il a très bien compris que, lorsqu'un homme est en difficulté et que son esprit conscient est bouleversé ou dérangé, l'inconscient, qui est la partie la plus instinctive de la psyché, parvient peut être à générer certaines compensations (de même pour le corps et l'esprit), parce que c'est un système organique qui s'autorégule". (p.334)



    c.g jung,symboles oniriques du processus d'individuation, la fontaine de pierre,W.Pauli,mandalas,Soi, indivuduation,aout2021La Fontaine de Pierre édite un inédit de C.G. Jung en français : "Symboles oniriques du processus d'individuation". Il s'agit de la retranscription de deux séminaires donnés en Amérique (Bailey Island et New York) avant la seconde guerre mondiale, à un public averti par la résonance de l'inconscient. Ce matériau brut (on entend Jung dans son oralité) préfigure les thématiques et concepts que le psychiatre zurichois développera quelques années plus tard dans ses différents livres (Tout est déjà là en l'état), avec une focale sur les mandalas, figures et symboles de compensation et d'auto-guérison du Soi lorsque des conflits submergent la conscience.
    Quelques dizaines de rêves du physicien W. Pauli (prix Nobel en 45 et découvreur de la physique quantique) parmi des centaines sont ainsi analysés et éclairés par la science et l'érudition d'un des pères fondateurs de la psychanalyse,  puisque c'est par paquets (de rêves) que se discerne un changement ou une évolution dans la psyché de l'analysé.
    Notons l'importance accordée au contexte , comme toujours, pour l'interprétation des rêves ou la mise en perspective de concepts ou paroles clés.
    A ce propos, l'individuation ne semblerait, à la lecture dudit livre être destinée qu'à des esprits brillants, ici un scientifique émérite, faisant de la psychanalyse une science élitiste, ce qu'elle fut sans doute à l'époque des balbutiements.
    L'épais document (près de 500 pages d'exposés suivis de questions-réponses) offre un condensé d'images et de récits numineux proches de la symbolique unitive (le 4, le carré, le cercle, la pierre angulaire) et de la complétude au sens de la conjonction réussie des opposés (le processus d'individuation).
    Les quatre fonctions (pensée, sentiment, intuition, sensation) prennent une large place chez l'analysé et s'insèrent ici dans un contexte universaliste où chacun puisera une nourriture pour son âme en quête d'un peu de lumière ou d'une vérité toute expérimentale.


    "L'individuation signifie simplement que vous trouvez votre place dans la tourmente, que vous restez au cœur du conflit, que vous êtes dans le conflit et pourtant au-dessus de lui...car sans conflit pas de mouvement, ni d'énergie". (p.128).

     
  • Notre mémoire extra-terrestre

    "Nos ancêtres extra-terrestres prendront contact quand nous serons devenus pleinement humains" (p.57).

    "Rencontrer l'humain, c'est incarner dans toute sa chair, de tout son corps, l'énergie la plus puissante de l'Univers, qui est l'Amour".(p.28)

     

    don.jpgDon Marcelino publie discrètement  son 5eme essai, tous centrés sur la sagesse amérindienne aux éditions Louise Courteau. Avec "Les Amérindiens et les extraterrestres" il donne une vision à la fois personnelle et culturelle de l'existence d'êtres venus d'ailleurs. Temples, pyramides, empreintes, agroglyphes...autant de traces laissées. Télépathie, voyage sacré, rêves, quête de vision, auto-guérison... autant d'héritages légués.
    Les Amérindiens sont coutumiers et se sentent proches, biologiquement parlant, de leurs frères des étoiles. L'esprit (au sens corps-âme- esprit) est d'ailleurs pour eux de nature extra-terrestre, à l'image du Grand Esprit cosmique qu'ils vénèrent.
    Leur connaissance est empirique plutôt que religieuse et s'acquiert moins par la foi que par l'expérimentation et l'intuition première.
    Le silence (qui est un palier et niveau sur le plan de l'être), la méditation, les marches dans la forêt ou l'observation de la nature permettent de purifier le cœur et de toucher une énergie plus subtile afin de rejoindre les mondes vibratoires supérieurs (4ème dimension et au-delà). Par ces techniques simples les ancêtres peuvent être contactés, des défunts (puisque la mort n'existe pas) aux créateurs mythiques de l'humanité (la femme bison, la femme cosmique...).
    Ce livre pratique (des photos, des questions-réponses, des encarts synthétiques) est aussi un moyen pour Don Marcelino d'évoquer le sens de l'incarnation et les mondes parallèles aux nôtres, avant et après notre existence sur terre.
    Un rapprochement de la sagesse amérindienne est fait avec le druidisme mais on mesure à quel point elle a pénétré nos croyances et intuitions sur l'invisible. Un des sens de l'incarnation est par exemple de purifier notre arbre généalogique, une fois notre famille choisie.
    Une bonne ouverture d'esprit est nécessaire pour adhérer à la cosmogonie amérindienne, d'autant qu'elle perçoit les religions comme contre-nature (ce qu'en ont fait les prêtres) et finalement à l'opposé du message sain, lui, des prophètes. Petit bémol, l'étude des textes sacrés peut, contrairement à ce que pense l'auteur, amener à cette ouverture de cœur ou à une prise de conscience cosmique en méditant sur ses images ou personnages archétypiques, de nombreux savants ou mystiques l'ont montré.
    Il est également  heureux et comique de constater que les Amérindiens sont tous fous, selon nos critères  psychiatriques, puisqu'ils invoquent l'invisible et vivent des réalités non tangibles...et pourtant personne ne les juge ou ne leur tient rigueur raisonnable.
    Tout est question de mémoire, de se souvenir d'où l'on vient (l'univers ou poussière d'étoile) pour accomplir au mieux sa destinée, en se sachant accompagné, avant de rejoindre un monde infini où rien n'a de limites. 

     

  • Se réapproprier le féminin mythique

    "Les antécédents des romances médiévales populaires sont plus larges que concentrés autour de l'individu et de sa guérison possible. Ils parlent d'un monde dans lequel la puissance et la sagesse féminine ont été perdues, dans lequel la nature a été violée et les trésors de l'Autre Monde ont été pillés, un monde devenu une Malterre. La quête du Graal, le principe féminin, la donneuse et gardienne de vie, n'est pas simplement une quête pour nous restaurer personnellement, c'est une quête pour restaurer le monde". (p.319).

     

    femmes 1.jpgDans "Femmes enracinées-femmes qui s'élèvent" de Sharon Blakie, publié chez Véga-Trédaniel, le constat est amer mais la solution est amour, comme toujours.
    La planète agonise, les hommes et leur quête héroïque ont accéléré le processus de destruction, le statut inférieur des femmes est une des causes du désenchantement du monde...et l'autrice projette de donner des clés pour que le féminin refleurisse et ensemence fertilement la planète, pour ce qui peut encore être sauvé.
    Sur près de 500 pages s'entremêlent son vécu, ses rencontres avec des femmes fortes et inspirantes et quelques histoires et légendes celtes mythiques, dans une forme de psychologie narrative. On pense à des pionnières du genre comme Clarissa Pinkola Estès ou Marie-Louise Von Franz mais Sharon Blackie veut pousser plus loin le curseur de l'explication archétypale rationnelle classique, en convoquant le mystère irrationnel de la pleine incarnation charnelle et sensation-elle. Elle questionne les terres habitées ou visitées en se rapprochant des éléments  (saisons, paysages, folklore, mythes et légendes...) pour retrouver le sens profond et la magie de la connaissance intuitive ou "iomas" qui provient de l'Autre monde, l'imaginal évoqué par H. Corbin, la hiérohistoire éternellement présente dans l'instant, l'esprit hors espace-temps.
    A la différence pourtant d'un Joseph Campbell et de sa "quête du héros", Sharon Blackie propose un parcours résolument féminin, non calqué sur celui de l'homme, car ce parcours rend la femme amnésique de ses valeurs, de ses atouts (son corps  et sa matrice plus que sa tête et son mental) et de son rôle depuis toujours dévolu de sage, gardienne et protectrice de la Terre, bien avant que les religions et leur Dieu ne vienne compliquer les choses et spolier leur génie (La "Malterre").
    Dans ses conclusions cependant, même si une forme d'animisme est préférée au monothéisme "masculin", l'autrice évoque un sain courroux, une miséricorde matricielle envers créatures et création ou encore une forme de co-naissance intuitive, proche du verbe insufflé, autant de preuves que le Dieu des textes sacrés est autant et c'est dommage, méconnu sous son aspect féminin et universel.
    Faire œuvre féminine c'est donc se réapproprier sa souveraineté et son énergie bien souvent accaparées. C'est aussi descendre en corps et creuser les souvenirs du cœur jusqu'aux instants d'un pacte contre (sa) nature pour survivre dans un monde apparaissant parfois comme inhospitalier. C'est enfin s'ancrer où les pieds portent et en ce centre si typiquement féminin des matrices pour à nouveau rayonner de soi. Autant de chemins que de prises de consciences, autant de jalons que de retours à l'enfance.
    Le récit est plaisant et enchanteur. Le style coule de source alternant moments intimistes et coups de projecteurs sur une altérité nourrissante et riche en créativité.
    La selkie, Cerydwen, Rihanon  n'auront plus de secrets pour vous, vous saurez ce qu'est une Elder, une "Cailleach" ou la "bean feasa" en vous plongeant dans ce livre fleuve qui se lit comme un bon roman, avec cette idée que la descente en soi, le désencombrement de ce qui ne nous appartient pas ou plus, la quête du centre dans un corps souvent égocentré, permet de s'alléger et de s'élever spirituellement et moralement, afin de ne pas passer à côté de sa vie...et retrouver ce qui sourd comme potentiel intérieur trop souvent méprisé, occulté ou jalousé.

     

    "La femme sage est l'héroïne, de retour de voyage, ancrée enfin dans sa souveraineté intérieure et dans la Terre où elle vit. Elle est prête à offrir son savoir et ses cadeaux à la communauté" (p.374).

     

  • Les dialogues avec l'Ange

    Coran 35,28. Il y a pareillement des couleurs différentes, parmi les hommes, les animaux et les bestiaux. Parmi Ses serviteurs, seuls les savants craignent Allah. Allah est, certes, Puissant et Pardonneur.

     

    jambet.jpgLes élus de Dieu sont de tout temps, éternels, exemples vivants d'une relation inspirée à Dieu. Une intelligence commune ou lumière de l'esprit, accompagne ces témoins de vérité pour un discernement au-delà des apparences, pouvant aller jusqu'à "la révélation de l'intériorité diversifiée des êtres humains"(p.228), ce qui constitue en soi un événement eschatologique.
    Dans "Le philosophe et son guide - Mullâ Sadrâ et la religion philosophique" paru chez Gallimard, Christian Jambet se fait à nouveau l'herméneute du philosophe shiite (1571-1641) dans sa conception élogieuse et rehaussée du savant qui vient après les prophètes et les Imams duodécimains (qui sont les preuves de Dieu selon Mohammad-Ali Amir Moezzi) mais dont l'existence est caution jusqu'à la fin des temps.
    Le savant ou philosophe (en référence au néoplatonisme hellénistique) n'a de cesse de perfectionner son intellect, la fine pointe de l'âme, en vue de percevoir le Réel (ou dévoilement de l'essence) conformément à l’œil divin. Cette illumination du "cœur spirituel" le place de facto dans la "vie dernière" ou vie véritable, évoquée dans le Coran comme étant destinée aux rapprochés de Dieu, puisqu'il s'agit d'un effacement (de progressif à définitif) de la personne au profit du Messager intérieur (l'Autre en soi, le double lumineux) qui est Présence.
    Mullâ Sadrâ fustige les tenants de la religion exotérique, essentiellement des juristes, qui ne s'intéressent qu'au monde d'ici-bas et à la perpétuation de l'ignorance, contrairement au contenu de la gnose composé de connaissances théologiques, psychologiques ou eschatologiques, qui sont la base d'un juste discernement. Les fidèles de son époque, ritualistes et littéralistes sont pour lui les ennemis véritables de la religion, qu'il définit par "l'ensemble des savoirs ésotériques directement inspirés par Dieu" (p.291).

    On le perçoit, l'Islam politique et conquérant récent a tout d'une hérésie aux yeux du philosophe platonicien, pour qui "en sa perspective eschatologique, l'ici-bas se révèle pour ce qu'il est, le miroir inversé de l'ordre réel"(p.242)...
    Christian Jambet fait œuvre de traducteur et d'exégète (alternant le dense et l'ardu avec le limpide et les fulgurances) du philosophe dont la réflexion et les conclusions apparaissent plus que jamais contemporaines. Les savants ou exégètes spirituels de la Parole inspirée, passés ou présents constituent bien des jalons essentiels à la révélation ésotérique du message. Dans un souci d'élévation (perfectionnement moral) et de rapprochement du chœur divin, ils essentialisent la connaissance jusqu'à tendre a l'objectivité de leur science, un moyen pour tous de se repérer et progresser encore, en ces temps troubles mais passionnants.


    "Par ses alliances comme par ses effets politiques, la religion du savant eschatologique s'est transformée en une religion de ce monde , réduisant progressivement à peu de choses le pouvoir des authentiques tenants de la voie spirituelle comme celui des esprits animés de volonté messianique, tout cela par la toute puissance de l’État" (p.337).