« Pendant qu’on s’émerveille de ChatGPT, la vie, le magique, sont en train de mourir autour de nous », lance Aurélien Barrau ouvrant le Marathon des Transitions, ce 9 août pendant le 33ème festival d’Astronomie de Fleurance (Gers). Le directeur du centre de Physique théorique et biologique de Grenoble est le premier des six conférenciers à s’exprimer. Il ne vient pas pour nous rassurer mais plutôt provoquer sursaut et électrochoc. L’Astrophysicien nous rappelle que le climat n’eest qu’un petit aspect du cataclysme à venir ou plutôt qui est déjà là. Puisque « deux tiers des arbres, deux tiers des mammifères sauvages […] et deux tiers des insectes ont disparus », énumère notamment Aurélien Barrau. Le chercheur au CNRS1 estime nos sociétés ensorcelées à la technique dont l’Intelligence Artificielle (IA), qui pour lui est le problème plutôt que la solution. « Nous cherchons comment continuer en décarbonant un peu ». En effet, l’ère numérique et technologique aura toujours besoin de plus d’énergies et de matériaux quels qu’ils soient. La découverte, demain, d’une ressource illimitée, transformerait la « planète en déchet ». Une manière de prévenir ses collègues scientifiques persuadés que la technique ou la technologie peuvent nous sauver. Le professeur à l’Université Grenoble-Alpes tacle notre société occidentale « colonialiste et paternaliste » et rappelle que nous sommes « la civilisation la plus meurtrière à l’échelle de la biosphère ! ».
Les intervenants suivants abordent en profondeur les problématiques de l’eau (Florence Habets2), de l’énergie (Maxence Cordiez3), l’économie (Cédric Villani4). Laurent Castaignède, ingénieur5, montre le mythe des transports propres qui créent toujours plus de demandes, de véhicules et de transformation des paysages pour les utiliser. Enfin, Marc Dufumier, agronome et professeur à Agro Paris Tech6, termine ce marathon en apportant de la bonne humeur et quelques notes d’espoir. Il affirme qu’il y a bien assez de nourriture disponible sur le marché mondial et que c’est plutôt une question de meilleure redistribution des revenus pour alimenter tous les humains. L’agronome captive la salle en racontant la photosynthèse et le rôle de chaque élément dans la préservation de la biodiversité. Inutile d’utiliser des pesticides et d’importer du soja brésilien, Marc Dufumier confirme que « tous les peuples du monde ont intérêt au circuit court ». En conclusion, l’ancien président de Commerce équitable France déclame tel un mantra : « tous les rayons du soleil doivent tomber sur des feuilles vertes » pas un seul ne doit s’échapper et « on commence tout de suite ». Chiche !
Les six conférenciers du jour se rejoignent alors pour clore le marathon des Transitions. Ils répondent à quelques questions d’un auditoire plein (plus de 1000 personnes), à l’écoute et soucieux d’informations et de solutions concrètes pour la planète. Pendant ce long moment essentiel au Centre Culturel, le centre-ville de Fleurance accueille, comme chaque jour du festival, des enfants, mais aussi des adultes, en leur proposant des jeux ludiques, éducatifs et sollicitant l’imaginaire. Tout cela, histoire de proposer, comme le planétarium gonflable (à tester) en l’église St Laurent, un espace encore vierge où rêver de solutions alternatives, pratiques, non possessives ou addictives pour notre terre. Le festival d’astronomie se termine demain avec la fête Astro-Jeunes.
1 Chercheur au Laboratoire de Physique Subatomique et de Cosmologie du CNRS. 2 Directrice de recherche CNRS en hydroclimatologie. 3 Ingénieur de Chimie ParisTech, intégré au CEA (Énergies Atomiques et Alternatives). 4 Mathématicien et membre de l’Académie des Sciences. 5 Bureau d’études BCo2 Ingénierie, spécialisé dans l’analyse des projets de transports (notamment). 6 Professeur honoraire en agriculture comparée et développement agricole à l’AgroParisTech.
Photos: Festival d'Astronomie de Fleurance