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Choeur - Page 30

  • Éternels Erynn et Bakari

    On ne sépare pas les morts d’amour, Muriel Zürcher, Editions Didier Jeunesse, Oriol Vidal, Robin des graffs, Roméo et Juliette, West Side Sory, adolescence, cité, mai 2023.« - Dossier d’admission Bakari Dialloré et Erynn Amezki. Merci aux écoutanges d’accueil d’aller s’asseoir dans la salle. »

    Et ils meurent à la fin. Dur de commencer un livre en connaissant déjà le couperet terrible ! Pourtant, On ne sépare pas les morts d’amour aux Editions Didier Jeunesse nous intrigue. Peut-être est-ce d’abord le nom de l’autrice. En effet, Muriel Zürcher nous a déjà provoqué un coup de cœur avec les personnages attachants de Robin des graffs. Sans doute est-ce la magnifique couverture de l’ouvrage, entre rêve et réalité, illustré par Oriol Vidal. Enfin, un Roméo et Juliette dans une cité, de nos jours, avouez que c’est terriblement tentant ! Et, dès les premières lignes, qui se passent dans un tribunal de l’au-delà où des êtres votent pour Paradis ou Enfer, après avoir scruté votre vie sous tous les angles, c’est déroutant et immédiatement prenant. Ainsi, la vie d’Erynn et de Bakari nous fascine, comme elle tient en haleine les « écoutanges » du jugement dernier. On se prend au jeu des nombreux flashback. D’ailleurs le roman pourrait facilement être adapté au cinéma. Petit clin d’œil appuyé à West Side Sory.

    « Son sourire sonne faux, alors j’insiste : - Y'a quelque chose que je devrai savoir ? - Je te jure que j’étais pas au courant, me répond-elle. »

    Le quotidien d’Erynn et Bakari n’est pas de tout repos. La première est livrée à elle-même avec une mère trop jeune qui ne pense qu’à sortir. Le deuxième s’occupe de ses petits frères et sœurs car sa mère travaille beaucoup trop, histoire de pouvoir élever ses enfants. Les deux semblent fait pour s’entendre et s’aimer de par leur sensibilité et leur détermination. Seul infime problème : ils ne sont pas du même quartier. Vallon et Gâtines : deux citées séparées par le centre-ville qui se font la guerre depuis … sûrement la nuit des temps ! Erynn ne peut pas dire qu’elle côtoie Bakari à sa meilleure amie, en couple avec le caïd de Vallon. Bakari n’osera jamais confier à Ryan, dont le frère est mort dans une rixe entre les deux cités, qu’il fréquente une « ennemie ». Et difficile aux deux amoureux d’avouer leurs sentiments respectifs quand tout leur interdit de les vivre.

    « Le visage d’Erynn apparaît dans l’encadrement de la porte. Aussitôt, une bouffée de son odeur m’aère l’esprit et me réchauffe le cœur. »

    Un roman qui nous submerge et nous secoue jusqu’au point final. Des personnages qui vont nous hanter encore longtemps grâce au talent de Muriel Zürcher. Les seconds rôles sont d’ailleurs aussi intéressants que les deux protagonistes. L’autrice sait multiplier les points de vues et les façons de vivre de chacun.e sans les juger. Elle permet ainsi aux lecteurs et lectrices de s’y reconnaître tout en se mettant à la place de l’autre et de sa vision du monde. Quitte à coller au 7ème art, on pourrait facilement imaginer une suite ou un préquel qui se penche sur la vie de Délicia, Ryan, Diango ou encore Djibril, le petit frère de Bakari. On ne sépare pas les morts d’amour et on ne met pas non plus de mot FIN à une si belle histoire. Pour les grands ados, à partir de 15 ans.

    Image: Edition Didier Jeunesse

  • Identité complex(é)e

     La langue de mon père,Sultan Ulutas Alopé,théâtre des Clochards Célestes,Production Bal de Loutres,Jeanne Garraud,Vincent Chrétien,turco-kurde,racisme,poids des rôles,sentiment de honte,famille,étranger en France,Avril 2023

    Dans La langue de mon père, joué au Théâtre des Clochards Célestes, Sultan Ulutas Alopé nous fait part d'un lourd passif familial (racisme turc envers les Kurdes, violence socio-culturelle, rôles imposés...) théâtralisé et digéré, avec une distance interprétative qui permet le passage de la gravité à l'humour.
    Le jeu sobre, le regard tendre et intelligent posé sur l'histoire familiale, l'écriture d'une épopée qui confine a l'universalité (être un.e immigré.e en France), donne à cette pièce co-mise en scène par Jeanne Garraud, un charme délicat pour un premier seule en scène, qui impose écoute et respect.
    La complexité d'une identité culturelle multiple et stigmatisée permet de relativiser notre situation ethno-centrée et d'ouvrir notre regard sur l'autre et sa différence.

    Entretien avec Sultan Ulutas Alopé à l'issue de la représentation du 8 Avril :

    podcast
    Image : Théâtre des Clochards Célestes

  • Le beat a encore frappé

    Le paradis c'est le réel embrassé, étreint de tout ton cœur plutôt que repoussé en tordant le nez au nom de je ne sais quelle réalité alternative soi-disant paradisiaque mais totalement imaginaire...le réel, voilà le paradis mais étreint, embrassé, avalé tout cru sans faire la grimace...(p.160)

     

    beat.jpgÉtienne Appert signe chez la boîte à bulles une nouvelle BD palpitante et hallucinée : Au crépuscule de la Beat Génération - le dernier clochard céleste. Dans ce nouvel exercice périlleux de retracer une époque mythique, il évite toute forme d'idolâtrie et présente les acteurs dans leur humanité crue englobant les contraires et paradoxes de chacun. Le Beat c'est le flow, c'est l'impro, c'est la pulsation qui advient lors de la co-naissance. Au bout de l'ego qui se donne et s'oublie, prend forme l'être au rythme soutenu, soucieux d'autrui, désintéressé, a-mental avec ses qualités de cœur, la bonté, l'innocence ou la candeur.
    Le livre se situe à la fin des années 80 quand Gilles Farcet se rend comme jeune journaliste à New York pour interroger Allen Ginsberg et s'imprégner, tout du moins comprendre l'esprit Beat ou ce qu'il en reste et l'angle choisi vaut crédit pour le témoignage de cette époque. Entre flashbacks et sauts dans le futur, Étienne Appert rend hommage à certaines de ses sources d'influence  tout en questionnant les fruits de ce mouvement. Outre le business encore actif sur les cendres fumantes de ses figures emblématiques, la poésie, les  enthéogenes, l'initiation intérieure ou encore les traces de l'homme sauvage ont encore cours dans un monde où le "Moloch" (le mental d'après Ginsberg qui en voyait sa drôlerie, à la fois très rationnel et sautant d'un sujet à l'autre sans lien apparent) s'accapare en apparence toutes les richesses. Des îlots de résistance ont fleuri épars a travers le monde pour en narrer sa beauté intrinsèque dans un "regard neuf et frais", comme celui de l'enfant.
    C'est ce regard émerveillé que porte d'ailleurs l'auteur en plaçant au centre de sa BD la "parole de Hank", comme pour redéfinir au sens Beat la sainteté (non religieuse), qui est ici l'ouverture à l'invisible esprit de vérité qui souffle sur les adorateurs de la Vie et de sa grande pulsation.
    Rendre familier est le réel talent d’Étienne Appert pour ces monstres sacrés (dont Jodorowsky en préface) rendus ici à leurs couleurs psychédéliques ou à leurs perceptions symbolico-numineuses, transcendant les portes du mental aveugle. Après les écrits des fondateurs, quoi de mieux que le dessin inspiré d'un converti pour retranscrire visuellement ce battement de cœur de l'Univers.

     

  • Islam : l'état des lieux

     

    perrin.jpgNaissance de l'Islam par Michel Orcel, paru aux éditions Perrin, est la réédition revue de l'Invention de l'Islam de 2012. Il s'agit d'une enquête historico-critique sur des preuves écrites de l'existence avérée du Prophète, de la mise sur papier assez rapide du Coran, de l'antériorité islamique de la Mecque et de la Kaaba, enfin de la réfutation du Dôme du Rocher comme lieu alternatif de pèlerinage.
    Les sources utilisées par l'auteur sont à la fois traditionnelles mais aussi surtout païennes ou judéo-chrétiennes pour l'époque susdite, excentrées. Michel Orcel évoque également les études universitaires récentes sur le sujet, blâmant par la rhétorique les essayistes à succès islamophobes par des contre arguments déductifs ou autrement sourcés.
    Le livre est en outre agrémenté d'un glossaire fourni et foisonnant comme la  bibliographie.
    Lecture plaisante de cet essai concis, pointu et érudit, qui est plutôt en faveur du rayonnement de l'Islam, de son authenticité et de la continuité du message prophétique, tout en rappelant son positionnement strict, dés le départ à l'égard du Messie (reconnaissance du statut mais pas de sa nature). On eût aimé ceci dit que l'islamologue et psychiatre développe le parallèle entre l'illettrisme de Mahomet et la naissance virginale de Jésus...une affaire de Fiat Lux (du silence le Verbe) qui n'oppose pas mais unit en un sens ésotérique et symbolique, les deux prophètes.
    Le Moyen-Orient reste le berceau du monothéisme et cette étude a le mérite de mettre à jour les connaissances en la matière, en faisant de l'ordre, comme Dieu s'actualise et évolue à travers siècles, par des révélations adaptatives grâce à des êtres hors du commun, les visionne-ères.

     

  • Aux couleurs de l'Alliance

    Or, l'Éternel règne en souverain sur le monde et sur l'homme, à travers la vision universelle ; et pour nous permettre de retrouver cette vision que nous avons perdue, il nous a donné son fils, qui est la clé qui nous permet d'entrer de nouveau dans ce jardin, et d'y retrouver notre place (p.36)

     

    Agnès Gauret,Dieu l'Univer le Fils de l'Homme et l'Esprit,éditions de l'Onde,Christ,Amour,Plan divin,dessins abstraits,symboles,Mars 2023Agnès Gauret publie aux éditions de l'Onde un essai concis, mûri et presque scientifique dans l'approche, intitulé Dieu, l'Univers, le Fils de l'Homme et l'Esprit.
    Horlogère de profession (pendant 13 ans), elle en commença ce projet d'écriture qui lui prit 40 ans pour sa forme actuelle. Agrémenté de dessins aux crayons de couleur, numineux, symboliques et méditatifs à souhait (proche de mandalas pour certains), le texte est bref mais chaque mot vaut son poids. Au total pour cet opus, 44 notes imbriquées avec à chaque fois un titre synthétique, un extrait de la Bible et une méditation en miroir, explicative et christo-centrée.
    Nourrie de la Bible synodale protestante, sa vision du Plan divin se rapproche de celle de Teilhard de Chardin, avec une incarnation du Fils de l'Homme pour infléchir le cours de l'Histoire et multiplier (comme les pains) les fils de l'Esprit ou élus de Dieu.
    L'auteure oppose l'esprit de la foi à celui du matérialisme, l'humilité  à l'orgueil, l'obéissance au doute, et (dé)montre l'intervention christique (le Verbe fait chair) pour éveiller en chaque disciple à travers siècles, la conscience illuminative capable de transfigurer la matière, pour la faire passer peut-être sur un autre plan vibratoire ? Plus simplement des victoires sur des déterminismes aveugles liés à une mémoire cellulaire acquise ? Ou la victoire sur la mort in fine, à l'image d'une résurrection individuelle et collective ?
    Sur l'ère eschatologique néanmoins, Agnès Gauret devient plus suggestive qu'elle n'affirme et laisse le lecteur libre de toute interprétation.
    Au final les fruits de l'esprit (discernement, pardon, joie...) sont bien schématisés avec l'Amour comme étendard et cette œuvre singulière d'une vie (plusieurs livres sur le même thème avec variantes ou focales sont sortis) illustrée par une âme convertie et innervée en profondeur mérite une attention soutenue.

     

  • Tordantes ténèbres

    Tenebria, le manoir Darkshire, Les Petits Monstres, Flammarion Jeunesse, Fabrice Colin, Gérald Guerlais, Projet Otaxan, Les étranges sœurs Wilcox, Golden Age, vampires, fantastique, mars 2023Il y fait sombre, les vieux manoirs pullulent, on y rencontre de drôles de bestioles et l’école est remplie de personnages étranges tels des vampires, des démons et autres gorgones. Nous ne sommes pas exactement à l’académie Nevermore de Mercredi* (série plus sombre et moins enfantine) mais on s’en rapproche. Voici Tenebria, un univers dont raffolent beaucoup d’adolescents et pré-ados. Ça tombe bien puisque Tenebria, le manoir Darkshire, publié chez Flammarion Jeunesse s’adresse aux lecteurs et lectrices à partir de 8 ans et peut plaire aux plus jeunes collégien.nes. Fabrice Colin, auteur prolifique (Projet Otaxan, Les étranges sœurs Wilcox ou plus récemment Golden Age) et Gérald Guerlais, illustrateur, les entraînent à la suite de Cassandra, vampire de son état et ses amis dont Valentin le fantôme et Jack le squelette. Point de parents dans cette histoire mais les adultes ne sont jamais loin à commencer par une maitresse-momie (à tester quand même) ou un vieil hibou, le directeur.

    Même en vivant dans un sombre manoir, en se promenant dans "la forêt que Personne ne Conseille" ou en côtoyant des dragons et des arbres-parlants à tous les coins de brume, on peut parfois s’ennuyer à Tenebria. Heureusement les Petits Monstres (Cassandra et sa bande) inventent des mensonges aussi gros qu’un œuf de poule, non d’autruche, mais non c’est pas ça non plus … Bref, les amis doivent ensuite résoudre les embrouilles qu’ils déclenchent plus vite qu’un tour de magie.

    Pas facile de les suivre jusqu’au fond du Lac-sans-Fond mais l’illustrateur a eu la brillante idée de dessiner la carte du territoire de Tenebria. Tant de choses encore à visiter que les monstres n’ont pas eu le temps d’explorer. Le pays des loup-Tarés ou les Carries du Démon sont bien intrigants.

    Les lectrices et lecteurs peuvent toujours compter sur Fabrice Colin qui a plus d’une histoire dans son sac. Venez donc découvrir Le rire du Vampire. Dans cette seconde aventure, on rencontre Karlov, l’oncle de Cassandra, aussi drôle qu’une porte de manoir grinçante et glaçante (et très bien croqué par Gérald Guerlais). L’univers s’étoffe au fil des années puisqu’on peut retrouver la suite dans la série Les Petits monstres (Tenebria rassemblant les deux premiers tomes). Les jeunes hésitent entre frisson et humour. Ici pas besoin de choisir, il suffit de se rendre à Sombrelune … enfin à ses risques et périls !

    * Série à suivre sur Netflix (attention seulement à partir de 13 ans)

    Image : Flammarion jeunesse

  • Succulente soupe

    Léon n’a pas faim, Violette Vaïsse, Éditions L’Agrume, Léon s’ennuie, à partir de 3 ans, mars 2023Tous les renards ont faim ! Oui, mais pas Léon. Non, la soupe, vraiment, cela ne lui dit rien, lui, il veut commander son menu ou décider lui-même des ingrédients. Dans Léon n’a pas faim de Violette Vaïsse, aux Éditions L’Agrume, on découvre la soupe orange que le petit renard orange doit manger dans une cuisine au tapis orange. Ce bougon préfère parler à une voix imaginaire pendant que sa maman discute avec la voisine. La table toute propre se transforme bientôt en laboratoire d’expérience ou en épreuve Top chef. C’est vrai qu’un sandwich pastèque-fromage-cornichon n’est pas banal et plus tentant qu’une soupe de carotte !

    Les dialogues du petit renard têtu, au vocabulaire soutenu et à l’imagination débordante sont très amusants. Les dessins faits de ronds et carrés sont simples et regorgent pourtant d’une foule de petits détails à découvrir avec l’enfant. On ne vous dévoilera pas si Léon a finalement mangé sa soupe mais peut-être le retrouvera t-on dans quelques années à Top Renard Gourmand… D’ici là, bon appétit à tous les flippés de la soupe et aux papas et mamans qui les préparent.

    Vous pouvez retrouver le petit renard dans Léon s’ennuie, même autrice, même édition.

    À partir de 3 ans

    Image: L'Agrume éditions