Est-on quelqu'un quand on reçoit le dharma comme guide d'un certain bouddhisme zen (branche tch'an) ? Fabrizio Bajec nous répond par la négative, se situant en cela dans la droite lignée spirituelle dudit zen, mettant en avant l'absence de sujet dans ses nombreuses expériences numineuses d'éveil. Le point zéro - un zen radical, titre du livre paru chez l'Originel-Accarias, est un voyage dans l' univers spirituo-culturel du poète franco-italien, en compagnie des maîtres prestigieux de sa lignée et du concret de sa pratique actuelle au dojo. L'important ici c'est l'impersonnel, l'absence de tête, le regard neuf émerveillé d'un bébé et plus même, cela (pour ne pas dire celui) que l'on était avant de naître, une conscience unifiée avec le tout, éternelle. L'effacement de ces êtres alignés et tendus entre ciel et terre (ayant saint Bouddha pour maître) rappelle la posture des musulmans pieux de la dernière religion révélée qui, à force de s'humilier (par la prière) finissent par être relevés (d'en haut ?).
Portant l'univers ou Dieu en soi, l'infini en tous cas, la personne s'annihile t'elle ou peut elle s'allier à la grandeur sans s'identifier ? Médian, le chemin christique porte l'alliance matière-lumière au pinacle sans ombrage ni remord. L'auteur évoque et respecte d'ailleurs cette voie qu'il qualifie de "sauvage", loin des rituels, et qui comme tout autre chemin demande à l'être humain de se souvenir qu'il est pont. Pour parler d'ailleurs qu'en soit, devenir point, relié verticalement, axe-homme...et faire feu de tout bois !
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Les esseulés radicaux
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La lumière de l'âge sombre
Quant à la dixième et dernière descente, celle du Kalki, elle est attendue pour la fin du cycle actuel. Les hindous vivent donc dans l'attente d'une parousie avatarique de Vishnu comparable à celle de Jésus dans les traditions chrétiennes et islamiques (p.24).
Dominique Wohlschlag publie chez l'Harmattan (collection Théôria) le Kali-yuga ou l'ambivalence de l'âge sombre.
Indianiste et sanscritiste, il connaît la cosmogonie hindoue et son découpage de l'histoire de l'humanité en 4 âges ou phases décroissantes en temps. Même si ces phases sont cycliques et symboliquement identifiables aux 4 âges initiatiques de l'humain, elles n'en demeurent pas moins linéaires et promises a une eschatologie, comme c'est le cas dans les religions monothéistes révélées. Le Kali-Yuga (l'ère du démon) ou âge de fer pointe notamment des correspondances avec d'autres prophéties bibliques (la vision du colosse par Daniel) ou moyen-orientales et des auteurs contemporains comme Martin Lings (la onzième heure) ou René Guénon (le règne de la quantité) ont établi des parallèles avec notre époque anti-traditionnelle, anti-religieuse, désacralisée ou dénaturée (crise climatique, énergétique, alimentaire), dans laquelle règnent le matérialisme et des valeurs morales ou spirituelles inversées.
L'auteur rappelle néanmoins que cette époque, si elle s'avère, est plus propice à la réalisation et à l'avancement spirituels (ce qui était caché se dévoile ?) que jamais. La miséricorde divine l'emporte également sur le courroux, faisant des derniers hommes de bonne volonté les premiers, selon l'adage christique et ceux de la onzième heure égaux à ceux des premiers de cordée.
Dans un siècle où l'information pullule, c'est la faculté de discernement qui devient la pierre d'angle de l'homme avisé ou son archétype intériorisé, pour s'opposer ou dénoncer le faux.Lien permanent Catégories : Christianisme, Histoire, Islam, Livre, Nature, société, Spiritualité, Voie non duelle 0 commentaire -
Le deuil change la focale
Pascale Chapaux-Morelli, psychologue, publie aux éditions Tredaniel un manuel assez complet sur le deuil, ses phases, sa palette émotionnelle, son "recouvrement d'âme". Le chemin du deuil - comment survivre et vivre est agrémenté de témoignages et de mémo pratiques.
Elle montre bien dans cet ouvrage comment la disparition physique devient possession psychique d'abord puis lien relationnel avec le temps. Elle dresse également un parallèle entre la période de deuil et une balade en forêt dont on ressort, après une confrontation avec l'inconnu, vivifié (l'Autre est intégré), lavé (clarification de la mémoire) et recentré (capacité de résilience).
L'autrice ne fait cependant qu'effleurer les croyances religieuses ou chamaniques concernant l'au-delà ou l'existence d'une réalité parallèle mais s'accorde sur la surexistence d'un lien vivant (en soi) avec le défunt.
L'outil psychologique qu'est ce livre peut être un bon compagnon de route, un livre guide pour toute personne ayant perdu récemment un être cher, à défaut de s'ouvrir à une personne qualifiée dans l'écoute et la gestion des émotions. Le chemin du deuil est balisé de signes et de jalons que d'autres ont traversé et qui sont ici retranscrits et synthétisés, cartographiés même pour ne pas trop s'éloigner de la route principalement empruntée pour se remettre à flot. -
Dissection de l'angélisme
Ce retrait des affaires du monde n'est pas une fuite des responsabilités ni des soucis de la vie en société. C'est un certain détachement qui permet une distance, celle d'un esprit désapproprié, désintéressé, pour tenter de voir les choses en Dieu, c'est a dire telles qu'elles sont, et donc d'avoir un regard juste. (p.10)
Soeur Catherine publie aux éditions du Relié un "manuel de vigilance spirituelle" pour "éviter les problèmes de l'esprit". Fortifiée par trente années d'érémitisme, l'autrice fait preuve d'une saine raison, aiguisée sur les mécanismes psychologiques à l'œuvre dans les cas d'emprise notamment. On sent le vécu dans un milieu spirituel où abondent les faux gourous, le pseudo éveillés ou les fraîchement élus. C'est le silence et le retrait du monde qui a sans doute permis à sœur Catherine une certaine distanciation et humilité sur le chemin relationnel vers dieu afin d'éviter l'inflation égotique.
Ce manuel peut constituer une boussole psychico-spirituelle (savoir où l'on en est sur le chemin) même s'il focalise sur des cas extrêmes quasi possessifs. Il se veut en outre un complément théorique à son précédent ouvrage La Joie du Réel, apportant aussi sa part d'outils pratiques, de jalons et d'indices (la joie plénière !) sur un voyage forcément personnel et singulier.
Peut être plus dans le domaine religieux qu'ailleurs, l'angélisme est une ombre qui, si l'on ne la conscientise ou ne la combat pas, risque, et on l'a vu à travers siècles, de néantiser les efforts étriques de ceux qui illuminent jusqu'à la noirceur de l'être humain. -
Pierres vivantes
"Le chemin d'une seule personne qui s'éveille nourrit l'universel. Ce pouvoir là n'a pas été donné à la Bête immonde". (p.201)
Apocalypse - passage d'un monde à l'autre, paru chez Accarias l'Originel, est une ode à l'esprit qui souffle et inspire les hommes de bonne volonté, les "justes". C'est aussi un plaidoyer pour la conscience concernant les personnes qui ont su "faire des deux l'un", qui se vivent comme des sujets reliés.
L'autrice, Lily Jattiot a coutume d'interpréter les rêves de ses patients, selon l'approche jungienne. Une première partie zoome avec hauteur, sur la psyché, "trait d'union entre esprit et matière". Le texte de l'apocalypse constitue ensuite bien le cœur de l'ouvrage, avec son interprétation symbolique mais le reste est une amplification du thème sur la période actuelle, assimilant le "dévoilement" à une cartographie mentale.
Le propos est judicieux et probant, faisant des "élus" des quidam disséminés ici ou là, sans autre ressemblance qu'êtrique. On est loin d'un peuple élu mais plutôt d'une communauté d'êtres unifiés (individués selon Jung), en chemin pour une maturation psychique et spirituelle.
Adepte d'une voie non-duelle, Lily Jattiot s'adresse à des adultes consciencieux mais minore cependant la foi (monothéiste par exemple) comme moyen de transcendance intérieure, de co-naissance. L'essentiel n'est-il pourtant pas d'abriter ce commun hôte, qu'il soit personnifié (le Vivant) ou immanent à l'être (le Je Suis) ?...car il est dit que "la foi déplace des montagnes".
L'autrice rappelle enfin la chance de vivre en Occident, malgré ses maux, concernant notamment le droit et respect de la personne, terreau du travail d'élévation de soi. La Bête et son chiffre sont pour elle l'état d'indifférenciation duquel il est bon d'extraire un îlot d'individualité, un regard témoin et donc miséricordieux sur ce monde.Lien permanent Catégories : Christianisme, Histoire, Livre, méditation, psychanalyse, Spiritualité, Voie non duelle 0 commentaire -
L'essence-ciel du Cheikh Al-Alawi
Cheikh Ahmad Al-Alawi - vinificateur de la voie soufie par Eric Geoffroy est un petit livre sorti chez Albouraq dans la collection "je veux connaître". Il retrace les grandes étapes/dates/phrases clés de la vie d'Ahmad Benalioua (1873-1934) qui fonda la confrérie Alawiyya à Mostaganem, après son initiation (due à sa maturité spirituelle) par le maître soufi Al Darqawi, héritier du prophète par un chaînon spirituel fort.
Son rayonnement fut intense et son message modéré, notamment à l'égard de l'occident, dont la modernité constituait à ses yeux une chance. Souvent qualifié de christique en attitude et regard, son parcours et message reste cependant dans la droite lignée de Mohammad par son caractère autodidacte (une douzaine d'œuvres écrites), sa vision métaphysique du Christianisme et sa fidélité absolue au Coran.
On le sait moins, il fut journaliste un temps, n'eut pas d'enfants malgré quatre mariages (et divorces) et mangeait peu, tant il respectait le vivant, animal et végétal inclus.
Ce beau livre est émaillé d'images, de photos, de citations et de témoignages mais n'a pas le temps de rentrer dans l'exégèse coranique dudit cheikh, format réduit oblige. Eric Geoffroy synthétise ici brillamment l'essentiel de sa vie spirituelle. Un livre mémoire et témoin d'un homme d'exception, pôle spirituel et éveilleur du siècle passé, qui en connut tant. -
Sonder l'Un-conscient
Dieu fait chair ne nous demande rien d'autre. Il n'attend pas de l'homme la perfection. Seulement, que nous tentions, de toutes nos forces, de tout notre cœur, de tout notre esprit d'aimer. D'aimer Dieu, l'autre et soi-même, car c'est tout un. D'aimer Dieu en l'autre et en soi. (p.98)
Sous les pavés le ciel, paru aux éditions Lazare et Capucine, de Jocelyne Delafraye, est un plaidoyer pour le dieu d'Amour christique. Appelée, se sentant inconditionnellement aimée, toute sa vie s'est mise au service de l'autre, qui est reflet divin.
Psychanalyse et foi se complètent dans ses écrits. Citant volontiers Maurice Zundel, elle détricote les histoires bibliques pour en narrer l'inconscient, souvent étiqueté de mal (ou péché) mais qui n'est qu'ombre mal aimée, maudite.
Pas d'excuse ici pour l'homme agissant sous le masque de l'ancien dieu (tyrannique, violent, juge...) alors que le pacte nouveau est une relation en conscience, une responsabilité créative plénière afin qu'advienne la paix au quotidien.
Jocelyne Delafraye milite pour un centre en l'être qui est personnifié et incarné en multitude, pourvu qu'on le cherche. C'est un sacerdoce de le révéler en chacun par un dévoilement de soi transfiguré.
Dans la lignée d'Annick de Souzenelle, de Lytta Basset ou encore de Françoise Dolto (même profession), l'autrice explicite les évangiles en analysant ses racines juives. Le ton est doctoral, l'essai de belle facture, le son de cloche cristallin comme la vibration du nouveau-né...à l'esprit.Lien permanent Catégories : Amour, Christianisme, Judaisme, Livre, méditation, psychanalyse 3 commentaires